Publié le 3 Jun 2020 - 17:41
LES CHAUFFEURS RECLAMENT LA REPRISE DES ACTIVITES

Scènes de guérilla à Touba et Diourbel 

 

Les chauffeurs ont manifesté, hier, à Touba et à Diourbel. Ils demandent au chef de l’Etat de revoir les mesures qui leur interdisent de travailler. Ils réclamaient la reprise du trafic.

 

Pneus brûlés, barricades érigées pour la circonstance. Les chauffeurs ont donné de la voix, hier à Diourbel. Ils exigent la réouverture des gares routières et la levée de l’interdiction du transport inter-régions. En colère et remontés contre l’autorité, ils se sont dirigés vers la gouvernance, après avoir laissé éclater leur colère. Mais ils ont été chassés comme des malpropres par le maître des lieux qui a eu des mots durs envers eux. ‘’Vous vous croyez où ? Ici, ce n’est pas un marché. Si vous voulez que je vous reçoive, demandez à vos supérieurs de me contacter et en fonction de mon calendrier, je verrais’’. Joignant l’acte à la parole, Gorgui Mbaye, vêtu d’un habit traditionnel, a demandé au policier en faction devant la porte de les évacuer.

Cinq minutes après, est arrivé un renfort de policiers avec à leur tête le commandant du corps urbain. Avec pédagogie et tact, le lieutenant Ousmane Diop est parvenu à disperser la foule composée pour l’essentiel de chauffeurs et d’apprentis. Faisant mauvaise fortune bon cœur, les manifestants dont certains voulaient en découdre avec les limiers, se sont dirigés vers la préfecture où le préfet Ibrahima Fall les a attentivement écoutés. 

Prenant la parole, Ndary Bèye, un des responsables du Regroupement des chauffeurs et transporteurs de la gare routière de Diourbel, a déclaré : ‘’Nous ne pouvons pas comprendre qu’on nous mette dans cette situation de précarité. Nos familles se disloquent, parce que nous n’avons plus de revenus. Nous sommes restés trois mois sans travailler. C’est difficile et incompréhensible. Ceux qui nous interdisent de travailler devraient se mettre à notre place pour comprendre les difficultés que nous vivons.  Si nous sollicitons des laissez-passer, ils refusent. Qu’est-ce qui explique qu’à Dakar, qui est l’épicentre, les transporteurs travaillent, et à Diourbel, on nous le refuse ?’’
 
Serigne Sall, le président du Regroupement des transporteurs et chauffeurs de Diourbel, de renchérir : ‘’Nous n’avons pas encore reçu l’argent destiné aux chauffeurs et transporteurs, parce qu’au préalable, il y a des vérifications à faire. Le secteur est très affecté. Nous demandons à l’Etat de nous laisser travailler. Il est incompréhensible que les mosquées soient ouvertes, que le secteur de l’éducation fonctionne et nous, on nous interdit de travailler. Nous ne l’accepterons pas. La situation est intenable. Figurez-vous que des chauffeurs vont même jusqu’à vendre les batteries de leurs voitures. Trop, c’est trop.’’ 
 
A sa suite, Khady Fall, vendeuse, a déclaré : ‘’Je suis en service dans la gare routière depuis 1983. Nous sommes très fatigués. Il n’y a pas un autre secteur aussi impacté que le transport. A côté, les activités connexes exercées par les ‘coxeurs’, les vendeurs, les anciens chauffeurs sont à l’arrêt. Nous sollicitons du chef de l’Etat que le transport reprenne.’’ 
 
Plusieurs arrestations à Touba
 
Les ayant attentivement écoutés, le préfet a tenu d’abord a rappelé les règles : ‘’Les marches sont au préalable soumises à une autorisation. A l’avenir, il faudra s’y conformer, parce que si des dérapages étaient notés, c’est vous les responsables qui allaient être les premiers à répondre.’’ Ensuite, il s’est montré compatissant, en ajoutant : ‘’Si ces mesures sont prises, c’est seulement pour éviter la propagation du virus. Mais je sais que c’est difficile. J’ose espérer que d’ici peu, tout cela sera un mauvais souvenir.’’ 
 
Ailleurs à Touba, également, les chauffeurs ont manifesté. Ce qui est une première dans la cité religieuse. De l’ancienne gare routière jusqu’à l’intercession en allant vers Mbacké, les chauffeurs-transporteurs ont manifesté pour décrier l’état d’urgence qui a freiné toutes leurs activités. Ils réclament la reprise du trafic. Ils ont brûlé des pneus pour montrer leur mécontentement. On annonce qu’il y a eu plusieurs interpellations.
 
 
DEUXIEME NUIT D’ECHAUFFOUREES A TAMBACOUNDA 
 
Excédés par le couvre-feu, les jeunes se rebellent
 
Hier et avant-hier nuit, jeunes et forces de l'ordre se sont livrés à de violents affrontements à Tambacounda. Il y a eu des arrestations.
 
La ville de Tambacounda est le théâtre d’affrontements entre jeunes et forces de l'ordre, depuis 48 heures. Hier nuit, des échauffourées ont été notées partout, de Gourél Diadié au quartier Plateau. La principale revendication des manifestants est la levée du couvre-feu. Selon ces jeunes, il n'a plus sa raison d'être, sinon que de leur priver de leur liberté. Dans la ville, la police, la gendarmerie et l'armée sont mobilisées pour contenir ces jeunes déchaînés. Plusieurs arrestations ont été notées du côté des manifestants.
 
Cette manifestation est consécutive à celle de la veille au Camp Navetane. En effet, dans la nuit du 1er au 2 juin, vers 23 h, dans les artères du quartier, les éléments du commissariat central de Tambacounda, en patrouille dans la ville, ont trouvé des jeunes dans les rues dudit quartier. A la vue des limiers, certains jeunes ont couru se réfugier dans leurs maisons. D'autres ont attendu que les policiers retrouvent leur véhicule pour leur lancer des pierres. Les policiers ont riposté en tirant des grenades lacrymogènes. Et s'en est suivi un violent affrontement entre les deux parties. 
 
Dans un premier temps, les policiers en sous-effectif se sont repliés pour attendre des renforts. A leur arrivée, les éléments du commissaire Diédhiou ont pu disperser ces nombreux jeunes déterminés à en découdre avec eux. Mais c'est surtout grâce à l'intervention du préfet du département que tout ce monde s'est calmé.
 
"On en a marre’’
 
"On en a marre ! On est fatigué de ce couvre-feu !", ont martelé les jeunes. Selon qui le couvre-feu a assez duré et n'est pas du tout pertinent, en cette période où on leur demande d'apprendre à vivre avec le virus. Ils estiment que le couvre-feu n'a plus sa raison d'être. En temps normal, ces jeunes restent dans les coins et recoins du quartier à boire du thé et à se divertir pour mieux apprivoiser la forte chaleur qui sévit à Tambacounda. Depuis que le président de la République a décrété cet état d'urgence, les jeunes ont perdu cette opportunité. Ils étouffent dans les maisons, sans possibilité d’aller prendre l'air. Car, disent-ils, "dès que nous pointons le nez dehors, nous sommes cueillis par les limiers et amenés au cachot" où ils passent la nuit. 
 
Les manifestants disent ne rien avoir contre les forces de sécurité, mais qu’ils sont juste fatigués et agacés par le couvre-feu qui leur prive de leur liberté d'aller et de venir. Par conséquent, hier nuit, ils ont mis à exécution leur menace de ne plus respecter la mesure et d’en découdre avec les policiers.
 
Déjà, l’avant-veille, le commissaire divisionnaire central Ousmane Diédhiou avait regretté que ses éléments aient fait usage de grenades lacrymogènes, au lieu de gérer les choses avec tact pour ne pas envenimer la situation et faire sortir tout le monde. De ce fait, il demande à la population, surtout aux jeunes, de comprendre le véritable rôle des forces de l'ordre. "Nous sommes là pour protéger les biens et les personnes". Par conséquent, il précise que la police ne doit pas être perçue comme un ennemi. C'est dans ce sens qu'il a invité le délégué de quartier, l'imam et son adjoint autour d'une table pour trouver une solution à cet incident malheureux. 
 
A en croire le commissaire, d'autres stratégies sont peaufinées par son service pour une bonne collaboration entre la police et la population.
 
Boubacar Agna CAMARA (TAMBACOUNDA)

 

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