Publié le 6 Aug 2012 - 15:26
JO 2012

  Ces athlètes soudanais qui ne veulent pas rentrer

Une grande compétition à l'étranger peut être vue aussi comme une opportunité pour se faire la belle, quitter sa patrie meurtrie par la misère, la guerre ou les deux à la fois. Pour trois Soudanais, la tentation était trop forte. Al-Nazeer Abdul Gadir, Sadam Hussein et Osman Yahya ont déposé, il y a plusieurs semaines, une demande d'asile politique au Royaume-Uni. Ces trois athlètes ne participent pourtant pas aux Jeux.

 

Ces coureurs - jugés "prometteurs" - avaient réussi à obtenir un visa pour entrer sur l'île, espérant gagner leur ticket dans les ultimes instants. "Les trois athlètes faisaient partie d'un groupe qui a été envoyé pour rejoindre le camp d'entraînement pré-olympique soudanais à Middlesbrough, [nord de l'Angleterre], le 15 juin, déclare dans un communiqué Elfatih Abelaal, chef de mission. Après avoir échoué dans leur qualification aux Jeux, les trois hommes ont demandé l'asile."

 

Leur demande provoque la colère du responsable de la délégation, qui qualifie leur attitude "d'irresponsable". Elfatih Abelaal crie même au complot. "Des réfugiés économiques du Parti communiste soudanais et des groupes armés du Darfour qui vivent dans le nord de l'Angleterre ont encouragé les jeunes athlètes à demander l'asile politique au Royaume-Uni, pour embarrasser le gouvernement soudanais", argue-t-il. En contrepartie, ce parti communiste aurait promis aux coureurs, selon les officiels soudanais, des appartements meublés, un salaire hebdomadaire et même un... passeport britannique. "Evidemment que nous sommes déçus, reconnaît Khalid Mustafa, porte-parole de l'ambassade soudanaise à Londres. Ils ont la vingtaine et sont trop pressés."

 

LE SOUDAN DU SUD SANS DRAPEAU AUX JO

Depuis des années, le pouvoir central de Khartoum est en conflit avec des rebelles provenant du Darfour, région de l'ouest du Soudan. En juillet 2011, le pays a été scindé en deux. Et entre le Soudan et la nouvelle nation du Soudan du Sud, les frictions sont de plus en plus violentes, la guerre paraît proche.

 

Le jeune pays est représenté à Londres par un athlète : Guor Marial. Mais le marathonien ne pourra pas courir, dimanche 12 août, pour défendre les couleurs de sa patrie. Comme le Soudan du Sud n'est pas reconnu au sens olympique du terme - il n'existe pas de comité national ni suffisamment de fédérations sportives -, Guor Marial est considéré comme un "athlète indépendant". Lors de la cérémonie d'ouverture il a donc défilé sous l'étendard blanc floqué des cinq anneaux olympiques.

 

A Londres, le Soudan - qui participe à ses 11es Jeux - a envoyé six sportifs, dont deux femmes : quatre en athlétisme et deux en natation. Il a déjà un titre de vice-champion olympique grâce à Ismail Ahmed Ismail, sur 800 m à Pékin, en 2008.

Ce n'est pas la première fois que des athlètes demandent l'asile au pays organisateur. En 1956, aux Jeux de Melbourne, des Hongrois avaient demandé refuge à Canberra après leur victoire en water-polo. Quelques jours plus tôt, la demi-finale qui opposait la Hongrie à l'URSS avait tourné au pugilat. Avant cette rencontre, les tanks de l'Armée rouge avaient envahi Budapest pour réprimer - dans le sang - la révolte menée par les étudiants qui exigeaient plus de liberté. Le match avait dégénéré entre les nageurs : il est resté dans l'histoire comme "le bain de sang de Melbourne".

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