Le Pr. Mamadou Koulibaly dégage les préalables

Pour sortir du franc Cfa et créer une nouvelle monnaie, il y a des préalables. Ceux-ci ont été dégagés par l’ancien ministre de l’Economie de Côte d’Ivoire. Mamadou Koulibaly prenait part à la spéciale conférence internationale de Dakar contre la ‘’servitude monétaire’’.
Dans sa lutte contre la servitude monétaire zonale, le front anti-Cfa veut passer de la critique à la proposition de solutions concrètes. C’est dans cette nouvelle perspective que s’inscrit la séance spéciale des samedis de l’économie de ce weekend, co-organisée à L’Harmattan par Arcade et la Fondation Rosa Luxemburg, et dirigée par le Pr. Samir Amin. A cette rencontre internationale spéciale, ont pris part d’éminents chercheurs et théoriciens de la création d’une nouvelle monnaie venus du continent. Au nombre desquels le Pr. Mamadou Koulibaly, ancien ministre des Finances de Côte d’Ivoire, qui a fait une communication sur le thème : ‘’Sortir du franc Cfa et créer une nouvelle monnaie : principes et conditions’’.
‘’C’est aux chefs d’Etat de décider de la sortie de la Zone franc. Ce n’est pas la rue, ni la société civile qui décide’’, a d’emblée précisé M. Koulibaly. Pour réussir cette sortie, cet ancien ministre sous Robert Guéï montre la voie à suivre : ‘’Pour la création d’une union monétaire de la Cedeao ou du Golfe de Guinée, il faudra, avant tout, un traité qui crée et définit le nom de cette instance monétaire, ses institutions, la question des réserves d’échanges, les relations entre cette monnaie et celle des grandes puissances comme le dollar, l’euro, le yuan, etc. Une fois rédigé, le traité doit être adopté par les chefs d’Etat. Après, le texte doit être adopté par les peuples par voie référendaire ou parlementaire’’, a-t-il préconisé.
Pour accélérer la cadence de la lutte contre le franc Cfa en vue d’une séparation avec l’ancienne puissance coloniale, le Pr. Mamadou Koulibaly envisage le recrutement d’un pool d’avocats composé de conseils anglais, français et américains compétents et audacieux qui connaissent le monde et qui va prendre le dossier en charge pour attaquer les traités et accords financiers entre la France et les pays de la zone à la Cour internationale de justice. Ensuite, mettre en place un cabinet d’experts financiers et juridiques qui sera chargé d’auditer les accords signés depuis 1960 pour savoir entre le Trésor français et les pays africains qui doit à l’autre et combien. ‘’On ne peut pas se séparer sans élucider cette question de fond’’, estime-t-il.
Au plan politique, l’ancien ministre pense qu’il serait judicieux d’exiger aux hommes politiques, surtout candidats aux élections présidentielles, qu’ils inscrivent cette question dans leurs programmes de société et posent le débat à l’intérieur des formations politiques. Toutefois, prévient-il, la sortie de la Zone franc ne sera pas ‘’gratuite’’ pour ses pays membres. Elle engendrerait des effets aussi bien positifs que négatifs. Mais il ne faudrait surtout pas avoir peur des conséquences négatives d’un tel choix.
De son côté, Demba Moussa Dembélé, après avoir battu en brèche l’argument de la stabilité de la Zone franc que certains chefs d’Etat mettent en avant pour justifier le statu quo, a fait lecture du communiqué final intitulé ‘’Appel de Dakar’’, adressé aux chefs d’Etat : ‘’Nous, participants à la conférence internationale de Dakar contre la servitude monétaire, lançons solennellement aux dirigeants africains pour leur demander de prendre la pleine mesure de leur responsabilité vis-à-vis de leurs peuples et d’aller dans le sens de l’histoire.’’ Les participants à cette conférence internationale de Dakar sur le franc Cfa ont également invité les dirigeants de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), à relever le défi lancé par le président français Emmanuel Macron en adoptant une feuille de route claire sur leur divorce avec le Trésor français devant aboutir à une rupture définitive avec le franc Cfa.
MAMADOU YAYA BALDE