Le cadeau de Noël du Garde des Sceaux

C’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour les magistrats. A l’occasion du Colloque national sur l’indépendance de la justice, le Garde des Sceaux a fait d’importantes révélations sur la gestion de la carrière des magistrats. Il s’est aussi prononcé sur le statut du parquet et du fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature.
L’Etat n’est pas insensible aux multiples problèmes sans cesse soulevés par les magistrats. Du moins, si l’on en croit le ministre de la Justice Ismaïla Madior Fall, d’importantes mesures ont été prises pour régler définitivement la question de la gestion des carrières. A ce titre, le Garde des Sceaux a révélé qu’un nouveau plan stratégique de modernisation des services a été adopté. Une modernisation qui va bouleverser, dans le bon sens, la gestion des carrières des magistrats.
‘’Ce plan permet de mettre à disposition une application informatique sur la gestion de la carrière du magistrat, mettant en avant des critères tels que le rendement, la rigueur, le professionnalisme, la compétence et naturellement la probité morale. En un mot, une gestion de la carrière basée sur l’égalité des chances pour tous’’.
Un plan qui, selon le ministre, a reçu l’assentiment du syndicat des magistrats. Il donne des assurances quant à sa mise en œuvre. ‘’Le plan va bénéficier de tout l’accompagnement nécessaire. Le nouveau mécanisme d’évaluation objective de l’activité professionnelle des magistrats sera désormais le soubassement de l’évolution de leur carrière. Il s’agit là, pour le ministère, d’un chantier important. Nous travaillons activement à ce qu’il y ait des mesures objectives du travail de chaque juge, lesquelles permettraient, en corrélation avec son ancienneté et d’autres critères pertinents, de faire des propositions d’affectation à Monsieur le Président de la République’’.
Ismaïla Madior Fall de rassurer les magistrats qu’ils seront tenus informés de cet important projet ‘’qui devra aboutir à un système de gestion des carrières objectif et interactif, puisque nous envisageons d’instaurer un droit de regard pour chaque magistrat sur son dossier, y compris sur les évaluations dont il fait l’objet tout au long de sa carrière ; l’évaluation contribuant au renforcement des mécanismes de gestion de la carrière des magistrats, dans le respect du principe de l’égalité des chances pour tous’’, a-t-il déclaré.
Très généreux, l’Etat envisage également, selon le ministre, ‘’de faire en sorte que les choix de carrière et les commodités familiales ou d’une autre nature puissent être pris en charge dans ce nouveau système de carrière qui va reposer d’ailleurs sur des outils de gestion des ressources humaines intuitifs et performants’’.
Toutefois, estime le Garde des Sceaux, l’indépendance, c’est aussi une affaire des juges. ‘’Il y a une dimension de l’indépendance de la justice qui restera toujours du ressort du juge, acteur central de la justice. En effet, l’indépendance qui permet au juge de décider de la liberté et du sort des biens de ses semblables n’est pas une liberté, mais une responsabilité’’. Poursuivant, le ministre exhorte les magistrats à s’armer d’éthique et de déontologie dans l’exercice de leurs fonctions. ‘’Il faut aussi l’observation scrupuleuse de préceptes d’éthique et de déontologie, qui sont, logiquement, plus contraignants chez les juges que chez n’importe quel autre fonctionnaire’’.
Sur un autre registre, le représentant du gouvernement est revenu sur le statut du parquet. Il a promis, à ce sujet, de rester attentif aux recommandations du colloque.
A ceux qui considèrent que la présidence du Conseil supérieur de la magistrature par le chef de l’Etat est un obstacle à l’indépendance de la justice, le constitutionnaliste a apporté la contradiction. Selon lui, il est des pays de la sous-région où le président ne préside pas le Csm, mais dont les systèmes judiciaires ne sont pas plus indépendants que celui du Sénégal. Il a, en outre, plaidé la cooptation au Csm de personnalités issues d’autres corporations.
Pour toutes ces raisons, Ismaïla Madior Fall pense que les Sénégalais ont de quoi être fiers de leur justice animée par des hommes et des femmes de valeur. ‘’Le colloque, dit-il, va permettre d’apporter de la rationalité et de la responsabilité dans le traitement d’une thématique qui peut aisément se prêter à la polémique contreproductive et au mélange des genres’’.
MOR AMAR