Publié le 10 Mar 2013 - 23:05
3 QUESTIONS À... IBRAHIMA DIOUF (DIRECTEUR DES PME)

''C'est l'accès des PME à la commande publique qui pose problème''

 

Directeur des PME, Ibrahima Diouf fait un diagnostic des maux qui plombent le développement des Pme parmi lesquels on peut citer l'accès faible de ces deniers aux financements des banques.

 

L'environnement des affaires semble grippé entre dettes impayées et marchés grippés. Comment l'expliquez-vous ?

 

Il faut dire que l'environnement à été marqué d'abord par la crise énergétique qui constituait un handicap majeur pour le développement des PME. Celles-ci utilisaient à hauteur de 65% ce facteur de production qu'est l'énergie électrique. Il y avait ensuite la concurrence déloyale d'autres produits importés de manière souvent frauduleuse et qui posaient problème pour les produits et services fournis par les PME locales. L'environnement fiscal aussi souffrait de certaines distorsions, notamment celle de la contribution globale unique qui ne s'appliquait qu'aux personnes physiques alors que beaucoup de structures étaient des personnes morales. Les contraintes qui persistent ont trait à l'ampleur de la dette impayée qui est due au PME et qui freine leur croissance, parce que ne disposant pas de ressources pour faire face aux charges fixes, comme celle locative, salariale et les autres telles électricité, téléphone et transport. Cette question de la dette se pose avec acuité. Elle mérite de trouver rapidement des solutions durables, afin que les entreprises entrent dans leurs fonds pour soulager leur trésorerie. C'est une contrainte de taille et qui limite la croissance des entreprises.

 

Concernant les marchés, il faut dire qu'ils existent, mais l'accès des PME à la commande publique pose problème. Il y a des exigences comme la garantie de bonne exécution. On demande souvent une expérience de dix années dans le secteur. Je crois que ce sont ces barrières à l'entrée que les PME et PMI dénoncent. Si on entend par commande publique tout ce que l'Etat et ses démembrements expriment comme besoin en terme de travaux ou de service, on peut dire qu'elle n'a pas reculé. Au contraire, elle a augmenté. C'est la part des PME qui n'est pas très importante.

 

Quels sont les secteurs les plus affectés par la crise ?

 

Il y a le secteur de la pêche qui connaît des difficultés énormes. Les industries de transformations de produits halieutiques ont des problèmes liés à des infrastructures souvent obsolètes, à la chaîne de froid. L'industrie textile, comme la confection et l'habillement, la filature connaissent aussi des difficultés. Il y a de même les BTP, qui ont des difficultés avec des variations saisonnières. Entre la fin d'un chantier et le début d'un autre, il peut y avoir quelques mois, ce qui fait que l'activité tourne au ralenti.

 

Pourquoi les banques rechignent à accompagner les PME et PMI ?

 

La frilosité des banques pour octroyer des crédits au PME se pose depuis des décennies. Les raisons avancées sont aussi bien imputables à une insuffisance de l'offre de crédit qu'à une absence de solvabilité de la demande de crédit. Les banques, dans leur configuration dominante, sont des banques dites commerciales. Elles ont pour mission de rentabiliser les dépôts des épargnants. Ces banques très souvent travaillent avec des ressources courtes qui ne prêtent pas en faveur de l'octroi de crédit pour une utilisation de longue durée. Alors que les PME dans la majorité des cas ont besoin d'investissement à moyen et long terme, qui rencontre de la disponibilité à court terme ; forcément il y a problème. Deuxièmement, les banques perçoivent les PME comme des entités à risque compte tenu de leur structuration. Car la PME est très souvent marquée par le sceau d'une personne. C'est son promoteur qui fait tout et s'il tombe malade, c'est l'activité qui s’estompe. Les banquiers ont peur de cette caractéristique-là. Ils hésitent à donner du crédit et s'ils le font, c'est à un taux très cher, pour couvrir les risques inhérents à la PME. L'autre facteur, c'est que le promoteur de PME ne maîtrise pas trop souvent son activité. Il y a aussi l'absence de production d'états financiers fiables de la part des PME qui explique la réticence des banques. Tout cela tend à expliquer le faible niveau de financement des PME par les banques. Aujourd'hui, si on met place des instruments comme le Fonds de garantie des investissements prioritaires (FONGIP) et le Fonds souverain d'investissement stratégique (FONSIS), je crois qu'à côté de la future Banque nationale de développement économique (BNDE), l'économie pourrait être financée de manière conséquente, notamment les PME qui constituent l'essentiel de l'activité de l'économie.

 

 Pierre Birahim DIOH

 

 

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