Publié le 24 Sep 2018 - 20:02
NOYADES SUR LES PLAGES

La brise mortelle

 

Les chiffres des cas de noyade font froid dans le dos. En cinq ans, plus de 1 000 personnes ont péri en voulant se donner le plaisir de la baignade. Dakar  et sa banlieue, capitales des plages dangereuses, enregistrent le plus de victimes.

 

2018 ! Cette année sera sans doute marquée dans l’histoire des noyades au Sénégal, du fait des nombreuses victimes enregistrées sur les plages sénégalaises en général, dakaroises en particulier. En deux mois (1er juin-30 juillet),  la Brigade nationale des sapeurs -pompiers (Bnsp) a dénombré 34 morts sur les 54 victimes de noyade. Comme chaque année, la période des vacances reste la plus meurtrière.

Des chiffres alarmants qui remettent sur la table la dangerosité des plages de la capitale qui, malgré tout, drainent de plus en plus de monde.  Ainsi, en fin juillet, la banlieue a été fortement ravagée par les marées, occasionnant  des pertes en vies humaines. Ces victimes sont, pour la plupart, des jeunes  dans la tranche d’âge de 14 à 29 ans. En quelques semaines, 11 personnes sont mortes à la plage de Malibu, à Guédiawaye. Un lourd bilan qui a attristé plus d’un dans cette localité de Dakar. Suffisant pour que la population sollicite auprès des autorités compétentes des maitres-nageurs pour superviser la baignade en cette période estivale ou la plage est la principale  destination des vacanciers.   Mais la journée la plus sombre est certainement celle du dimanche 29 juillet 2018 où, de Malika à Yoff, il a été dénombré  19 morts le même jour.

Ce décompte macabre avait d’ailleurs fait réagir le ministre de l’Intérieur. Aly Ngouille Ndiaye avait promis de trouver des alternatives à la population, afin qu’elle arrête de fréquenter les zones non autorisées. ‘’Quand une plage est interdite, on doit prendre les dispositions de ne pas y aller. On nous a dit que ces plages interdites sont fréquentées parce que toutes les autres sont privées. Toutes les plages ne peuvent pas être privées. J’ai demandé au directeur  général de l’Administration territoriale d’instruire les préfets de nous vérifier cette information. Nous aurons le rapport demain (mercredi 1er août). Si cela est avéré, on va immédiatement enlever la privatisation. On ne peut pas interdire l’accès aux plages aux populations’’, déclarait-il en fin juillet, en marge de la cérémonie de sortie de la 44e promotion de la Police nationale.

Il faut dire que  les soldats… de l’eau n’ont pas chômés, ces quatre dernières années. En effet, durant cette période, sur l’ensemble du territoire national, ils ont effectué 1 127 sorties avec, au total, 1 269 victimes dont 971 décès  et 298 assistées. Le tableau récapitulatif des cas de noyade de la Bnsp indique qu’il y a eu 287 victimes de noyade en 2014 ; 227 parmi elles ont perdu la vie. Un chiffre qui a connu une baisse sensible l’année suivante où il a été dénombré 175 cas de décès, pour un total de 225 victimes. 2016 a également eu son lot de morts : 265 personnes ont péri. Si on devait procéder à un classement, 2017 serait certainement en tête avec 304 décès sur les 449 victimes des plages. 

L’intérieur du pays est aussi affecté

Cependant, le bilan macabre des rives  n’est pas seulement le propre de la capitale sénégalaise et de sa banlieue. L’intérieur du Sénégal a aussi sa part du lot. La station balnéaire de Saly a enregistré 3 morts.  D’après le commandant du Centre de secours des sapeurs-pompiers de Saly, L’adjudant-chef Pape Doro Kane  qui s’exprimait sur les ondes de la radio Sud Fm, parmi les victimes, les plus  jeunes sont âgées  entre 15 et 18 ans.  Dans cette zone, le bilan entre le mois de juin et de juillet 2018 fait état de 3 corps sans vie et 1 repêché vivant. Ce qui porte le bilan à 40 morts depuis au début des vacances. L’adjudant-chef explique cependant que des dispositions ont été prises pour éviter ces pertes en vies humaines. Il s’agit, selon lui, d’une campagne de sensibilisation et de la mise sur pied d’un système de surveillance dans les différentes plages.

Dans le nord du pays, précisément à Podor, 2 personnes ont péri dans les eaux  du fleuve, dans le village de Ngouye.  Des victimes âgées, d’après nos confrères de Wal Fadjri,  de 18 et 20 ans, et identifiées aux noms de Djibril Diallo et Mohamed Konaté. Toujours dans cette partie du Sénégal, à  Ganguel Souley, localité située dans le département de Kanel, dans la région de Matam, deux talibés âgés tous de 21 ans y ont aussi perdu la vie.  Auparavant, c’est  l’enseignant Mamadou Wade et la lycéenne Dieynaba Sylla qui ont péri dans le bras du fleuve de Tiguera Ciré, dans la commune de Nabadji Ciwol, toujours dans la région de Matam. 

En fait, presque aucune localité du pays n’a été épargnée. C’est ainsi que le Centre est également affecté par le phénomène. Une bande d’amis qui jouait sur la plage de Kahone, dans la région de Kaolack, a  assisté, impuissante,  à la mort de l’un d’eux. Il s’agit du transitaire Mame Ngor qui, après des activités physiques, a voulu se rafraichir dans les eaux du Saloum. La victime était loin d’imaginer que ce moment de détente lui serait fatal. En mars dernier,  c’est le sud du pays qui prenait  sa part du lot. En effet,  2 corps sans vie ont été retrouvés dans le fleuve, à Sédhiou.

En août 2017,  c’est la région de Kédougou qui enregistre 5 décès par noyade et 2 rescapés. Parmi les victimes, 3  sont des agents  de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd), dont une femme et deux jeunes du village de Mako ont perdu la vie dans la rivière appelée Sinkountou. L’équipe de l’Ansd menait une enquête dans le cadre du Programme d’eau potable et assainissement du millénaire (Pepam) dans la zone.

HABIBATOU TRAORE

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