Publié le 1 Aug 2021 - 09:57
OUSMANE SONKO SUR LA CRISE SANITAIRE 

‘’Macky Sall est le seul et unique responsable’’ 

 

Le leader du Pastef a passé, hier, en revue la situation sanitaire et la gestion de la pandémie, depuis sa survenue au Sénégal. Ousmane Sonko pointe du doigt le Chef de l’Etat et sa gestion de la crise sanitaire. Le préconise aussi des solutions pour venir à bout du virus.  

 

‘’Voici des semaines que des Sénégalais nous demandent de nous prononcer sur la situation sanitaire du pays. Ce qui prouve que certains de nos concitoyens ont confiance en nous et sont attentifs à nos propos. Ce qui représente une grande responsabilité pour notre formation politique. Aujourd’hui, le peuple est désespéré et n’a toujours pas les réponses qu’il voulait des autorités étatiques. Nous avons décidé de prendre notre temps, car la situation est sérieuse et suscite des réflexions. Nous avons échangé avec différents spécialistes (infectiologues, virologues, biologistes, spécialistes en santé publique…), durant deux semaines. Il y a aussi les dimensions financières, sociétales… Cela va au de-là des aspects techniques et nécessite une gestion politique. Je suis là pour m’entretenir avec les Sénégalais de ce que j’aurais fait, si j’étais au pouvoir et qui diffère de la gestion étatique d’aujourd’hui.

Ils se sont auto-glorifiés de la gestion de la pandémie au Sénégal et on a même rapporté qu’ils ont été félicités par les organismes internationaux. Ce qui n’est pas vrai. La réalité est qu’en Septembre 2020, un journal américain dénommé ‘’Usa Today’’a écrit que : ‘’Macky Sall et son gouvernement peuvent être classés parmi les deuxièmes mondiaux ou premiers en Afrique sur la gestion de la Covid-19. Ce sont ces propos qui ont été amplifiés et, en juillet 2021, le Sénégal était dernier dans tous les classements. Le ministère ne pourra pas démentir les chiffres officiels que je vais avancer et peut organiser un débat public, à ce propos, s’il le souhaite’’.

 ‘’Les statistique de la Cedeao, mis à jour le 18 juillet 2021, montrent que pour le taux de test par rapport à la population par pays, le Sénégal est classé 8e sur 15, avec un taux de tests de 3,54%. En ce qui concerne le taux de cas positifs par rapport aux tests réalisés, le Sénégal est classé 2e, avec un taux de 8, 56%, alors que la moyenne de la Cedeao est de 6, 44%. Pour le taux de cas positifs par rapport à la population, le Sénégal est classé 3e avec un taux d’infection de 0, 30%, alors que la moyenne de la Cedeao est à 0,32%’’.

Pour le taux de décès par rapport aux cas positifs, le Sénégal est classé 5e sur les 15 pays avec un taux de décès de 2, 34%, au moment où la moyenne de la Cedeao tourne autour de 1, 31%. Pour ce qui est du taux de décès par rapport à la population sénégalaise qui est de 16 millions, le pays est placé premier avec un taux de 0,0071%, alors que la moyenne de la Cedeao est de 0, 0016%. Pour les cas positifs sous traitements, le Sénégal est à la 4e place avec 14,52%, alors que la moyenne est de 4,51%. De par ces statistiques, je veux démontrer qu’on ne dit pas la vérité aux Sénégalais. Ces chiffres nous viennent des sites qui centralisent les données au niveau mondial et sous régional, donc, ce n’est pas notre invention’’.  

Force du variant Delta 

‘’Le coronavirus est de nouveau parmi nous, il est revenu en force. Si on compare les différentes étapes, on peut dire qu’on est à la troisième vague. La première a commencé à partir du 2 mars 2020, date de l’entrée de la pandémie au Sénégal jusqu’au 27 septembre de cette même année.  Il y a eu, durant cet intervalle, 181 000 tests de dépistage réalisés et 14 900 cas positifs, ce qui représente un taux de 8% avec 308 décès et un taux de létalité de 2% sur 7 mois. Pour la deuxième, elle va du 28 septembre 2020 au 26 avril dernier. Une période de 8 mois durant laquelle 304 000 tests ont été effectués, soit le double de la précédente vague. Ce qui a permis de détecter 25 000 cas positifs, soit un taux de 8%.  Pendant cette deuxième vague, au moins 31 cas graves ont été dénombrés par jour, alors qu’on était à 30 cas à la première vague. A cela s’ajoute un décompte macabre de 796 décès, soit un taux de 3%’’.

‘’L’actuelle vague, marquée par l’avènement du variant Delta, a démarré depuis le 27 avril 2021 jusqu’aujourd’hui. Nos dernières statistiques remontent au 24 juillet et 150 mille tests ont été effectués, en 4 mois avec 16 400 cas diagnostiqués positifs. On peut dire que les cas ont augmenté. Sur 8 mois, il y en avait 25 000, alors que, maintenant, sur 4 mois, on a 16 000 cas, avec un taux de positivité de 11%. Dans les statistiques gouvernementales, le nombre de cas graves en moyenne a baissé de 30 cas graves pour la première période, on est passé à 13 cas en moyenne et 164 décès.

Et je précise que les derniers chiffrent remontent au 24 juillet 2021. Pour cette présente vague, on a un taux de décès de 1%, alors que les précédentes ont affiché respectivement 3 et 2%. Ce variant est plus contagieux et les statiques l’ont prouvé, mais les chiffres montrent aussi que son taux de létalité est plus faible par rapport aux autres vagues. On peut en déduire toutefois que la situation est grave. Une seule perte en vie humaine est considérable, à plus forte raison les décomptes macabres faits quotidiennement. Cette maladie n’est pas à négliger. Les malades guéris ont été très éprouvés ; donc, soyons prudents, j’invite les Sénégalais à la prévention’’.  

Gestion Fonds Force Covid-19 

 ‘’Il faut resituer les responsabilités. 18 mois en arrière, au début de la maladie, on avait dénombré 4 à 5 cas et tout le pays a été tenu en haleine. On avait déclaré que le pays était en guerre contre un ennemi invisible. Le chef de l’Etat avait appelé à des concertations et tout le monde a répondu dans l’intérêt des Sénégalais. A ma sortie de cet entretien, j’avais déclaré que je n’étais pas d’accord avec la gestion de cette pandémie. Je n’étais pas en phase avec l’argent qui était prévu ; je pensais qu’il fallait un travail préalable pour situer les besoins et nécessités’’.

‘’J’étais contre la répartition de ces fonds, car la part réservée à la santé était faible. Seule 72 milliards étaient prévus pour le secteur sanitaire et 623 milliards pour le plan de résilience économique. A mon avis, il fallait commencer par la crise sanitaire qui est à la base même de la crise économique. J’avais marqué mon désaccord et j’avais souligné les mauvaises habitudes de détournement dans ce pays et j’ai dit qu’il fallait adopter une autre démarche, face à cette épreuve qui touche les Sénégalais. J’avais exigé une gestion transparente de ces fonds et l’histoire à montrer que l’objectif du pouvoir, à travers la loi d’habilitation, était de s’en prendre à des adversaires politiques’’.  

‘’Où sont passés les 1000 milliards du fonds force Covid-19 ? Le Chef de l’Etat n’ose plus prendre ses responsabilités pour s’adresser aux Sénégalais dans cette affaire, parce que, tout le peuple sait qu’il est le responsable de cette situation. On peut dire aujourd’hui qu’on a plus de dirigeant. Son principal objectif est de voir comment obtenir un troisième mandat ou d’éliminer des adversaires politiques. Il n’est plus crédible aux yeux des Sénégalais qui ne prêtent d’ailleurs plus attention à ses discours. Avec 4 cas, il avait un instauré l’état d’urgence assorti d’un couvre-feu, mobilisé un fonds de 1000 milliards et avait fait voter une loi d’habilitation à l’Assemblée nationale’’.

‘’Aujourd’hui, on a des milliers de cas et il n’ose pas s’adresser aux Sénégalais. Qu’est ce qui s’est passé entre temps ? C’est la crédibilité qui gouverne et non la force. La majorité des Sénégalais ne croit plus au discours de Macky Sall et c’est à juste raison’’. 

‘’Au mois de mai, un bulletin adressé au Chef de l’Etat renseignait de l’existence d’un variant très contagieux dénommé Delta qui s’est introduit au Sénégal. Il devait, dès lors, prendre des mesures pour gérer ce cas et limiter la propagation. Il a été le premier, durant ce mois à partir du 27, à faire le tour du pays avec ses militants. C’est irresponsable. Je suis surpris d’entendre des Sénégalais mettre dos à dos les hommes politique dans cette situation, disant qu’ils ont tous organisé des activités durant cette période. Il faut savoir que l’opposition n’a pas les mêmes informations que le pouvoir. Nous ne recevons pas les bulletins d’alertes. Il ne nous revient pas de prendre des mesures, car on ne gouverne pas’’.

‘’Dans tous les pays au monde, on déconfine à chaque fois qu’on note une baisse des cas, avant de durcir les restrictions à chaque fois que les menaces se représentent. Et ça c’est le rôle de l’Etat, mais pas de l’opposition, ni des guides religieux ou mouvements associatifs. C’est malhonnête de dire qu’on renvoie les acteurs dos à dos. Il revient aux gouvernants la responsabilité de prendre des décisions par rapport aux informations à leurs dispositions’’.  

‘’En mars 2020, quand on signalait le premier cas de Coronavirus au Sénégal, le pays ne disposait que de 12 lits de. Ce qui constitue une catastrophe. L’argent mobilisé pour la Covid devait être orienté uniquement dans l’aspect sanitaire. Dans les 1000 milliards, seul 112 ont été octroyés à la santé, ce qui représente un taux de presque10%. La somme restante a été éparpillée entre des futilités, alors que la santé était prioritaire. Le Sénégal disposerait actuellement que de 60 lits de réanimation, ce qui veut dire que seuls 48 lits ont été achetés à hauteur de 1,450 milliard dans ce budget de 1000 milliards’’.

‘’Cette manne est l’argent du contribuable sénégalais et les 600 milliards constituent un prêt que nos futurs enfants vont rembourser. Et cet argent n’a pas servi à l’achat de lits, de gants ou des équipements de protection du personnel médical, encore moins des outils de dépistage rapide. Est-ce que vous trouvez normal qu’un Sénégalais attende plus de 72 heures pour obtenir les résultats de ses tests ? Combien de personnes ont succombé, avant la disponibilité de ces résultats ?’’

Responsabilités étatiques 

‘’Macky Sall doit donner le bon exemple, au moment où il demande aux Sénégalais de faire des sacrifices dans ce contexte de crise, il dépense 60 milliards pour l’achat d’un avion. Avec cette somme, le Sénégal pouvait avoir 2000 lits de réanimation. En plus de cet avion, il s’est offert un bateau de plaisance dont le coût tourne autour de 3 à 6 milliards C’est un crime contre le peuple Sénégalais, de la non-assistance à un peuple en danger. Macky Sall n’est pas légitime à diriger ce pays. Il n’a jamais été intéressé par la crise sanitaire ; il est le seul et unique responsable de ce qui se passe dans ce pays. Il a profité de l’Etat d’urgence pour signer des décrets d’honorariat, des rapports scandaleux sur la bonne gouvernance ont été publiés, ainsi que sur la distribution de l’aide alimentaire’’.

‘’C’est durant cette période que des complots contre les opposants ont été préparés et la suite, on la connait. Ils ont également profité de cette situation pour officialiser le compagnonnage ‘’mbourok soow’’. Ils justifiaient cette alliance par la lutte contre la Covid-19, aujourd’hui que la situation se dégrade, ils sont introuvables. En plus d’être incompétent, il n’a aucune empathie pour les Sénégalais’’.  

‘’Chapeau à notre personnel médical qui brave des risques dans cette crise sans bénéficier d’un minimum de soutien. La situation est grave, l’Etat a démissionné et a étalé son incompétence. Cela ne doit pas nous pousser à démissionner, c’est nous qui subissons les affres de cette pandémie et non l’Etat. Alors arrêtons de nier l’existence de cette maladie. Nous le peuple, devons être responsable’’.

  Ses propositions  

‘’Je pense d’abord que le confinement n’est pas la solution pour venir à bout de cette crise. Dans des pays comme le Sénégal, des chercheurs ont informé que le confinement ne peut pas donner de résultats. La maladie peut se développer dans les maisons, car nous avons des familles élargies. Ensuite, ils ne peuvent plus allouer des kits alimentaires, ils n’ont plus la capacité de le faire. Tous les pays font face à la crise sanitaire. Cette situation remet en cause notre stabilité économique. Les Sénégalais sont dans des difficultés à cause de l’échec de notre politique économique, donc, on ne doit plus accepter d’être confinés’’.

‘’Il faut prendre des responsabilités individuelles avec le respect des mesures barrières, réduire les déplacements et les rassemblements inutiles. On peut gagner ce virus. Il faut réorganiser les hôpitaux et suspendre toutes les interventions qui ne sont pas urgentes, afin de réserver les lits aux malades du coronavirus. Les médecins et professionnels de santé doivent être formés à gérer les cas simples, car ils se concentrent plus sur les cas graves et négligent ces cas, ce qui aggrave la situation. Il faut aussi approvisionner le pays en oxygène. C’est honteux pour le Sénégal d’avoir ce problème au 21e siècle. Il faut également augmenter les lits de réanimation’’.

‘’Pour trouver des fonds, on doit supprimer les institutions budgétivores comme le Cese, le Hcct… qui n’ont aucun impact sur la vie des Sénégalais et mettre à leur disposition des tests rapides. C’est inconcevable d’attendre des jours pour avoir les résultats des tests. Pour ceux qui perdent la vie dans les maisons sans effectuer des tests, il faut penser à leur faire des prélèvements et analyses avant enterrement ou procéder à un protocole sanitaire’’.

Problématique du vaccin 

‘’Tous les continents ont produit des vaccins, sauf l’Afrique, parce que nous n’avons pas investi sur le capital humain, mais, on n’a plutôt préféré miser sur la politique. Je ne suis pas contre les vaccins et je ne crois pas à la thèse de complot, mais, nous avons tous le droit de s’interroger pour être éclairés sur les garanties du vaccin et sa capacité de résistance. Et jusqu’à présent, nous ne sommes pas édifiés sur certaines questions’’.   

HABIBATOU TRAORE    

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