Publié le 1 Apr 2021 - 18:36
VIOL SUVI DU MEURTRE DE NDEYE SOKHNA LO EN 2012

Le témoin clé jette le trouble

 

Condamnés aux travaux forcés à perpétuité en 2017, Ndiaga Ndiaye, Hamidou Ly et Modou Ndiaye ont interjeté appel. Leur affaire a été évoquée hier, à la barre de la Cour d’appel du tribunal de grande instance de Dakar. Ils avaient été reconnus coupables du viol collectif suivi du meurtre de la dame Ndèye Sokhna Lo. Les faits se sont déroulés le 20 décembre 2012, à Keur Massar.

 

Le 21 décembre 2012, le cadavre de Ndèye Sokhna Lo est retrouvé dans une maison en construction, à l’Unité 11 des Parcelles-Assainies de Keur Massar. La vue de la dépouille laisse présager des circonstances atroces dans lesquelles la dame de 27 ans a été tuée. Ses jambes écartées, son slip baissé jusqu’aux pieds, ses agresseurs, après l’avoir violée et poignardée, ont mis sa tête dans une fosse septique. Grâce à son téléphone qui a été emporté, les enquêteurs de la Section de recherches parviendront à arrêter ses bourreaux. Ce, suite à l’identification des trois puces téléphoniques ayant été insérées dans ledit portable, en 48 heures.

Dans un premier temps, les gendarmes procèdent à l’arrestation de Fatou Kiné Gaye, mère d’Ibrahima Ndiaye. Ce dernier, interrogé, révèle aux gendarmes avoir reçu le cellulaire des mains de son cousin Modou Ndiaye. Tel un panier percé, Ibrahima Ndiaye ne s’en arrête pas là. En tant que témoin, il passe à table et raconte par le menu le meurtre atroce de la jeune dame qui était mariée et mère de famille.

Selon Ibrahima Ndiaye, qui avait écopé d’une peine de 5 ans en première instance pour non-assistance à personne en danger, le crime odieux a été commis par Modou Ndiaye, Ndiaga Ndiaye et Hamidou Ly. A l’en croire, ils s’étaient rendus sur les lieux du crime à bord de motos. Mais quand ils ont aperçu la victime, son cousin lui a demandé de les attendre. Ensuite, dit-il, le trio est allé à la rencontre de la dame qu’ils ont trainée dans un bâtiment en construction. Poursuivant sa narration, il déclare les avoir suivis en douce et regardait ce qui se passait à l’intérieur du bâtiment. ‘’Après s’être relayé sur elle pour la violer, Modou Ndiaye l’a poignardée, tandis que les autres lui tenaient les bras’’, avait-il soutenu à la barre, en 2017.

Des allégations qui avaient été réfutées par Modou Ndiaye, Hamidou Ly et Ndiaga Ndiaye. Malgré leurs dénégations systématiques, ils avaient été condamnés aux travaux forcés à perpétuité. 

Amnésie due à des troubles hallucinatoires

Entendu encore une fois hier à la barre, Ibrahima Ndiaye, qui a comparu libre, a réitéré partiellement ses déclarations. Il a soutenu qu’il a oublié une bonne partie de cette scène. A l’en croire, la victime était la copine de son cousin Modou Ndiaye. Il a confié qu’il les voyait ensemble, bien avant cette nuit-là.

Par ailleurs, face aux magistrats de la Cour d’appel de Dakar, il n’a pas désigné Modou Ndiaye comme étant l’auteur du meurtre. Selon ce dernier, Ibrahima Ndiaye souffre d’une amnésie due à des troubles hallucinatoires, depuis son enfance. D’ailleurs, il martèle que c’est la raison pour laquelle il l’a hébergé, car il était abandonné par ses parents. En outre, il a nié jusqu’à la dernière énergie être l’auteur de ce crime, d’autant plus qu’il ne connait même pas la victime. Il a été suivi dans ses dénégations par ses co-accusés.

Au terme des débats, la partie civile a sollicité l’infirmation partielle de la première peine, en réclamant la somme de 50 millions de francs CFA en guise de dommages et intérêts.

Le parquet général a requis la confirmation de la prison à perpétuité pour Modou Ndiaye. S’agissant de Hamidou Ly et Ndiaga Ndiaye, le maitre des poursuites a demandé que leur condamnation à perpétuité soit ramenée à 20 ans de réclusion criminelle, après avoir écarté le viol. En outre, le procureur général a noté des failles dans le déroulement de l’enquête.  ‘’On nous parle de l’utilisation d’arme blanche, de viol collectif, sans qu’on analyse le liquide séminal trouvé sur le pantalon de Modou Ndiaye. On nous parle même d’une somme de 15 000 qu’il aurait réclamée à la victime et qui serait le mobile. Mais rien a été fait dans ce sens’’, a fustigé le maitre des poursuites.

Toutefois, il n’est pas convaincu par l’amnésie d’Ibrahima Ndiaye. ‘’Tout ce qu’il a dit a été vérifié et, à aucun moment, il ne s’est pas trompé dans la description faite de la chambre de Modou Ndiaye, préalablement au moment du transport chez ce dernier’’, a indiqué le parquetier.

Selon lui, quelqu’un qui a pu faire des déclarations conformes aux faits, peut-il souffrir de troubles psychologiques ? ‘’Il était présent sur la scène du crime, à moins qu’il ne soit un ange, car il a écrit un scénario qui cadre avec les faits. On évoque son état pour obtenir l’acquittement des autres’’, a soutenu le représentant du parquet général. Qui, néanmoins, a reconnu qu’il y a des doutes le concernant, pour le délit de non-assistance à personne en danger.

A la suite des conseils de la défense qui ont demandé l’acquittement, la cour a mis l’affaire en délibéré. La décision sera rendue le 28 avril prochain.

MAGUETTE NDAO

Section: