Publié le 24 May 2022 - 22:07
BOUBACAR SADIO, COMMISSAIRE À LA RETRAITE ET SPÉCIALISTE DES QUESTIONS DE SÉCURITÉ

‘’L’insécurité est inhérente à la vie en société’’

 

Deux anciens commissaires de police analysent, suivant leur expérience, la situation actuelle au Sénégal avec ces meurtres, assassinats, etc.

 

Dans cette période de psychose liée à la montée de la violence et de l’insécurité avec comme point d’orgue la série d’homicides notée le week-end dernier à Dakar, le commissaire divisionnaire de police à la retraite, Boubacar Sadio, invite les populations à ne pas tomber dans la paranoïa.  D’après le spécialiste des questions de sécurité, il y a une nette différence entre le phénomène de violence et l’insécurité. ‘’Il faut faire le distinguo entre la montée de l’insécurité et celle de la violence. Mais il faut reconnaître aussi que l’insécurité au Sénégal est à un niveau contrôlable. Aucune société ne peut se targuer de pouvoir garantir une sécurité totale à sa population. L’insécurité est inhérente à la vie en société.  Il s’agit de la maintenir à un niveau acceptable.  Sur la même lancée, il ne faut pas confondre l’insécurité et le sentiment d’insécurité. On définit la sécurité comme un état d’esprit confiant et tranquille qui résulte d’une absence réelle de danger’’, déclare l’ancien limier.

D’après l’ancien directeur de la police municipale de Dakar, l’absence d’une politique sécuritaire participe à cette montée du climat d’insécurité dans la capitale. ‘’On a constaté une montée des actes de violence et de l’insécurité avec la multiplication des vols à l’arraché. Les premiers responsables de cette situation sont nos autorités qui doivent définir une bonne politique sécuritaire bien élaborée. Il y a trois ans, il était prévu de mettre en place un plan national consensuel de lutte contre l’insécurité, ainsi qu’une loi d’orientation sur la sécurité intérieure qui devait changer l’architecture sécuritaire du pays. Mais, malheureusement, ces politiques n’ont pas été mises en œuvre”, a-t-il déclaré.

Même si la gendarmerie et la police déploient beaucoup d’efforts pour sécuriser les populations et leurs biens, un renforcement des effectifs et des équipements est nécessaire pour maintenir un haut niveau de sécurité à Dakar, estime notre interlocuteur.  ‘’Il faut que la sécurité soit une priorité pour l’État. Ainsi, la police et la gendarmerie pourront se déployer dans tous les quartiers pour lutter contre la délinquance et multiplier les rondes dans les quartiers’’, affirme-t-il avant de se montrer sceptique face aux opérations de sécurisation qui consistent à multiplier les contrôles dans la ville.  ‘’Ces opérations de sécurisation doivent être permanentes, pour être réellement efficaces.

Il ne faut pas attendre que l’opinion publique s’émeuve pour faire des rafles. Les délinquants sont conscients de cela. C’est pourquoi, la plupart du temps, ils se mettent en retrait et attendent que la tempête passe. Pour lutter contre l’insécurité, il faut renforcer la prévention et la proximité. Le taux de couverture sécuritaire est en deçà des normes internationales qui sont d’un policier pour 1 000 habitants. Il faut plus de ressources humaines dans la police. Il faut aussi impliquer les acteurs sociaux dans cette lutte contre l’insécurité. Il faut rechercher le concours du ministère de l’Éducation, de la Jeunesse, les chefs de quartier, sociologues, psychologues afin de bâtir une stratégie de proximité qui a deux dimensions : la première, spatiale, avec la construction de commissariats dans les quartiers et la deuxième, institutionnelle, avec plus de relations et d’interactions entre les policiers et les civils pour garantir la sécurité de la ville’’, a conclu l’ex-coordonnateur des volontaires de la ville de Dakar. 

Massamba Camara commissaire divisionnaire à la retraite : ‘’La société sénégalaise devient de plus en plus violente’’

Pour sa part, le commissaire divisionnaire à la retraite, Massamba Camara, en appelle aussi à une plus forte implication des populations pour mettre fin à l’insécurité et à la montée de la violence. ‘’Beaucoup de violences domestiques mettent aux prises des individus qui se connaissent, partagent les mêmes quartiers, qui se fréquentent, etc. Ces cas, bien qu'ils créent de l'émotion et de la sensation, ne peuvent pas être imputés à la défaillance de la police et de la gendarmerie. Ce sont des cas isolés. On ne peut pas mettre un policier ou un gendarme derrière chaque individu pour assurer sa protection. Les forces de défense et de sécurité ont certes l'obligation d'assurer la sécurité des personnes et de leurs biens, ce qui est une obligation régalienne, mais les cas de violence passionnelle ou domestique doivent trouver leur réponse dans l'éducation et dans les familles d'abord.

Ce qui nécessite la participation de tous dans l'éradication de ces cas particuliers qui commencent à se généraliser’’, a déclaré l’ancien officier de police. Avant d’ajouter : ‘’Le constat général qu'on peut faire actuellement, c'est que la société sénégalaise devient de plus en plus violente et cela a plusieurs causes, notamment le chômage des jeunes, l’inégalité sociale, la consommation de la drogue, une urbanisation mal maîtrisée, les multiples crises scolaires et sociales, etc. Les forces de défense et de sécurité continueront à effectuer leurs missions régaliennes, mais les populations doivent aussi apporter leur collaboration en signalant et en dénonçant les cas suspects dont elles auront connaissance’’.

MAKHFOUZ NGOM

 

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