Publié le 12 Feb 2021 - 21:54
AFFAIRE OUSMANE SONKO

L’Assemblée, le PV 078 de la SR et la saisine du juge d’instruction

 

En réunion de bureau et de la conférence des présidents hier, l’Assemblée nationale a fixé le calendrier pour la levée de l’immunité parlementaire du député Ousmane Sonko.

 

L’Assemblée nationale a posé, hier, l’acte 1 dans la procédure de levée de l’immunité parlementaire du député Ousmane Sonko. L’élément déclencheur a été la lettre déposée par le ministre de la Justice sur la table du président Moustapha Niasse. Laquelle s’est appuyée, pour l’essentiel, sur une demande de levée d’immunité parlementaire initiée par le juge d’instruction du 8e cabinet. Ce dernier ayant été saisi par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Dakar.

Dans sa demande, le juge d’instruction du 8e cabinet a visé le PV N 078 en date du 5 février 2021 de la Section de recherches de la gendarmerie. ‘’Ce PV dit, en substance, rapportent des sources parlementaires à ‘’EnQuête’’, qu’Adji Sarr, née le 3 mars 2000 à Maya, dans les îles du Saloum, a déposé une plainte contre Ousmane Sonko pour viols répétitifs sous menace d’armes après des séances de massage… Ousmane Sonko fréquente le salon de massage Sweet Beauté depuis 2019’’.

Selon toujours la source qui cite la lettre du juge d’instruction, le 2 février dernier, entre 21 h et 22 h, M. Sonko est passé audit salon pour une séance de massage effectuée par Adji Sarr et Aissatou Ba. ‘’Après ce massage, Aissatou Ba est sortie et a laissé seuls pendant 15 minutes Adja et Ousmane Sonko. Par la suite, Adji est sortie et a appelé Sidy Ahmed Mbaye qui l’a conduite à l’hôpital. Un prélèvement vaginal a été fait et du sperme recueilli. Le juge souhaite faire un test ADN sur Ousmane Sonko’’.

Selon nos interlocuteurs, les enquêteurs ont entendu la propriétaire du salon Ndèye Khady Ndiaye, son mari Ibrahima Coulibaly, Aissatou Ba et Sidi Ahmed Mbaye. Au sortir de la réunion, le président du groupe parlementaire Liberté et démocratie a fait face à la presse.

Il déclare : ‘’Le bureau s’est réuni pour demander la levée de l’immunité parlementaire du député Ousmane Sonko. Sur les 17 membres, les 15 ont voté pour. Les deux membres de l’opposition (Cheikh Mbacké et Yaye Mané Albis) ont voté contre. Par la suite, la conférence des présidents a fixé la réunion de la commission des lois, le 15 février prochain. Cette dernière va procéder à la constitution d’une commission ad hoc de 11 membres, dont 8 de la majorité, 2 de l’opposition et 1 des non-alignés.’’

Cette commission ad hoc, selon le président du groupe Liberté et démocratie, sera installée le 17 février en séance plénière. L’étape suivante sera l’audition du député Ousmane Sonko qui pourra se faire assister par un de ses collègues.

Lors de cette séance d’hier, trois lettres ont été présentées par le président de l’Assemblée nationale aux membres du bureau. Il s’agit de la lettre du ministre de la Justice, des demandes du procureur et du juge d’instruction. Monsieur Mbacké déclare : ‘’Nous n’avons vu aucun autre document. Je pense qu’on aurait dû nous présenter au moins le procès-verbal de la Section de recherches. Toutes ces autorités ont connaissance du dossier. Je pense que les députés aussi méritent d’en avoir connaissance pour donner un point de vue éclairé.’’

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AFFAIRE OUSMANE SONKO

Extraits des PV d’audition

Devant les redoutables enquêteurs de la Section de recherches de Colobane, les différentes parties ont livré, chacune en ce qui la concerne, sa part de vérité, dans la rocambolesque affaire de mœurs impliquant le député Ousmane Sonko.

Dans sa chronique d’hier, le journaliste Pape Allé Niang est largement revenu sur le procès-verbal de la Section de recherches de la gendarmerie. A cette occasion, le chroniqueur de DakarMatin a dévoilé le contenu des dépositions des principaux concernés dans l’affaire de mœurs impliquant le député Ousmane Sonko. Outre Adji Sarr dont les accusations ont largement été évoquées dans nos précédentes éditions, les hommes du commandant Abdou Mbengue ont aussi auditionné l’autre masseuse Aissata Ba, le mari de la propriétaire du salon et Sidy Ahmet Mbaye qui s’est présenté comme le fils de Maodo Malick Mbaye, leader du mouvement Gueum Sa Bopp (membre de la majorité présidentielle).

Dans sa déposition, la masseuse Aissata Ba a confié avoir travaillé 7 jours seulement dans l’institut de beauté. Le jour des faits, a-t-elle confié aux enquêteurs, c’est Adji même qui lui a demandé de sortir de la salle, à la fin de la séance de massage. ‘’Après le massage, Adji Sarr m’a demandé de sortir et de les laisser seuls. C’était la première fois que je voyais Ousmane Sonko, en dehors de la télé’’.

Sur cette question, Adji a confirmé en soutenant que c’est suite à un signe du député.

‘’Elle n’arrêtait pas de nous demander où se trouvait Ousmane Sonko’’

Pour sa part, le mari de la propriétaire a révélé que les jours précédant la venue du leader politique au salon, Adji Sarr était particulièrement agitée. ‘’Elle n’arrêtait pas de nous demander où se trouvait Ousmane Sonko. Elle disait que ce dernier se faisait rare. Il fallait qu’on l’appelle pour savoir quand il allait revenir. Un jour après, elle est revenue pour me poser les mêmes questions : quand est-ce que Sonko va passer ?’’. Le mari d’ajouter : ‘’Je lui demandais à chaque fois ce qui se passait pour qu’elle demande après lui avec autant d’insistance. Elle a ri et s’est tue.’’  

Auparavant, insiste le mari de la propriétaire, Adji lui avait dit qu’elle était enceinte, mais elle n’a pas voulu donné le nom du père de son enfant. Le jour du supposé viol, a-t-il soutenu, l’accusatrice lui a présenté un test de grossesse qui confirme ses dires. Mais toujours sans donner de nom. Toujours, poursuit ce dernier, après le départ de Sonko, Adji lui a remis 50 000 F, disant que c’est le député qui lui a remis cette somme.

Si Adji n’a pas donné de nom au mari de sa patronne, elle a bien dit à cette dernière celui qui l’aurait mise enceinte. Mais c’était après son départ. Selon la déposition de la patronne Ndèye Khady Ndiaye, son employée l’a rappelée, le mercredi 3 février, pour lui dire que son père a décidé de porter plainte contre Sonko qui l’a mise enceinte. Mais la patronne estime que sa masseuse raconte des contrevérités.

Les incohérences de la propriétaire du salon de massage

Mais dans ses déclarations lues par le journaliste Pape Allé Niang, plusieurs incohérences sont notées. D’abord, à la question de savoir pourquoi elle avait renvoyé son employée, elle répond : ‘’Je soupçonnais qu’il se passait, entre elle et plusieurs clients, plus que de simples massages.’’ Lors de la confrontation, elle a soutenu que c’est parce que cette dernière lui avait menti pour s’absenter. ‘’Elle m’avait dit qu’elle avait perdu sa maman. Après vérification, je me suis rendu compte qu’elle voulait en fait aller à un anniversaire. C’est pourquoi je l’avais renvoyée avant de la reprendre en novembre 2020’’.  

Ndèye Khady est, par ailleurs, revenue sur toutes les filles qui ont eu à masser le leader des patriotes dans son salon. D’après elle, au début, c’était une certaine Fatou. Au départ de ce dernier, Adji a commencé à masser le client de luxe. ‘’Je ne lui ai jamais dit de s’occuper de Sonko. Mais j’ai remarqué qu’à chaque fois qu’il sonnait à la porte, c’est Adji qui se précipitait pour lui ouvrir’’. Outre Fatou et Adji, la propriétaire a déclaré, dans un premier temps, avoir massé Sonko une fois. Plus tard, elle dira l’avoir fait à deux reprises. ‘’Mais il ne s’est jamais mal comporté, ni avec moi ni avec personne, à ma connaissance’’, s’est-elle empressée d’ajouter.

Le dernier élément de ce puzzle est le sieur Sidy Ahmed Mbaye, présenté comme un fils de Maodo Malick Mbaye. C’est lui qui aurait transporté, à bord d’une voiture de type 4x4, l’accusatrice, après le départ d’Ousmane Sonko. Comment il a connu la masseuse ? Il explique : ‘’On s’est connu à Liberté 6, dans une boutique de ma tante, près de chez moi. C’était il y a deux ans.’’ Le jour des faits, a-t-il estimé, Adji l’a appelé après le départ de Sonko, pour lui demander de l’emmener à l’hôpital, parce qu’elle a encore été violée. ‘’Ce n’est pas la première fois qu’elle me le disait. Je l’ai donc emmenée à l’Hôpital général de Grand-Yoff et on lui a fait des prélèvements. On a rien dit les premières fois, parce qu’on ne voulait pas que les gens pensent que c’est de fausses accusations. Et puis sa vie était menacée’’.

Tous les témoins ont, cependant, affirmé qu’ils n’ont jamais entendu ni bruit ni complaintes dans ledit institut.

Pour ce qui est du message qu’aurait envoyé Ousmane Sonko avant de passer au salon, la plaignante a précisé qu’en fait, c’est sa patronne qui lui a envoyé une capture pour lui dire que l’opposant va passer. Un message qu’elle dit avoir effacé, parce que la mémoire de son téléphone était pleine. Ces informations ont été récusées par la propriétaire, d’après les extraits du PV lu par le journaliste Pape Allé Niang.

M. Amar avec DakarMatin

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