Publié le 28 Sep 2016 - 17:59
ASSANE DIOMA NDIAYE SUR LA MUTINERIE DE REBEUSS

‘‘L’Etat consent à la présence des avocats durant la garde à vue’’

 

Après la mutinerie à la Maison d’arrêt de Rebeuss (Mar), des mesures à l’initiative des défenseurs de droits humains sont prises pour éviter que ces événements ne se reproduisent.

 

La mutinerie à la prison de Rebeuss du mardi 20 septembre aura au moins le mérite de faire bouger les choses. Une annonce du ministre de la Justice est attendue sur un projet de loi relatif au Code pénal et au Code de procédure pénale, dans les jours à venir. ‘‘On espère que le ministre de la Justice va annoncer cette mesure à l’Assemblée nationale qui consacre la présence des avocats pendant la garde à vue. L’Etat consent à aller dans cette direction’’, déclare au téléphone le président de la Ligue sénégalaise des droits humains, Me Assane Dioma Ndiaye. Après la mutinerie, les propositions des défenseurs de droits humains ont été avalisées à travers les annonces faites par l’Etat (construction d’une nouvelle prison annoncée pour janvier 2017, mensualisation des sessions de Chambres criminelles, diminution des mandats de dépôt à titre transitoire). Seul point d’achoppement, la limitation légale de la détention provisoire en matière criminelle.

Pour marquer le coup, son alter  ego d’Amnesty International, Seydi Gassama, informe d’un grand rassemblement de la société civile à la place de l’Obélisque demain, pour marquer la solidarité avec les détenus de Rebeuss, mais appelle à la retenue. ‘‘Nous appelons les détenus au calme, car c’est notre rôle. Mais, nous tenons surtout l’Etat pour responsable de la situation. Il a la responsabilité de les juger dans des délais légaux, au bout de six mois ou deux ans, et c’est à lui de les mettre dans de bonnes conditions de détention, d’assurer leur prise en charge alimentaire, médicale et leur formation pour leur réinsertion. C’est son rôle’’, précise-t-il.

Prudence

Les défenseurs de droits de l’Homme sont unanimes sur les causes de ‘‘cette folie passagère’’. Accumulations de frustrations combinées aux insuffisances structurelles ont fait exploser la cocotte-minute de Rebeuss. Me Ndiaye trouve inédit que 600 prisonniers aient décidé de s’évader, et se félicite du sang-froid  dans la gestion policière de cette émeute, tout en déplorant une victime. Les droits-de-l’hommistes restent toutefois circonspects face aux réactions à chaud des autorités. Des mesures pour remédier à la situation sont annoncées, mais n’emportent pas Seydi Gassama. Pour lui, il est question de réformes en profondeur.

‘‘Lorsqu’il y a des événements, on fait de grandes sorties. Mais dès que la situation se calme, il se peut qu’on oublie les mesures annoncées. Il faut que celles sur la tenue de session mensuelle de Chambres criminelles soient respectées ; ainsi que celle de la construction d’une nouvelle prison par l’Etat. On ne parle pas d’un quartier de 500 places à Sébikotane, comme annoncé par Sidiki Kaba, pour oublier la promesse de construction d’une prison. Nous demandons à l’Etat du Sénégal de tenir sa promesse de fermer Rebeuss et la remplacer par une prison moderne de 1 500 places qui répond aux normes et standards internationaux’’, défend le secrétaire d’Amnesty International.

Assane Dioma Ndiaye est beaucoup moins catégorique et espère que l’Etat va tirer des leçons de cette situation. ‘‘Le fait qui s’en déduit, c’est que forcément des solutions sont prises. Nous ne pensons pas que le gouvernement soit dans les dispositions de ne pas faire en sorte que ces faits ne se reproduisent plus’’, déclare Me Ndiaye. Une option d’autant plus envisageable que le contexte n’a jamais été profitable à un ministre de la Justice de remporter un arbitrage budgétaire et matérialiser cette attente.  

OUSMANE LAYE DIOP

 

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