Publié le 11 May 2023 - 18:12
CRISE DANS LA COALITION YEWWI ASKAN WI

Barthélemy/Khalifa Sall, la stratégie du bouclier et de l'épée

 

Les deux piliers de YAW semblent acter leur séparation, à l’aune du prochain dialogue. Pour réaliser ce dessein, le ‘’dynamiteur’’ Barthélemy Dias a décidé de solder ses comptes avec Sonko et ses partisans, dans le but défendre la décision de Taxawu à participer au dialogue et à l’obtention d’une amnistie pour l’ex-maire de Dakar.

 

À quelques encablures de la Présidentielle, le duo de choc de la coalition Yewwi Askan Wi (YAW), Khalifa Sall et Ousmane Sonko, s’achemine vers une rupture totale. Si les deux protagonistes semblent vouloir afficher une entente de façade, le fossé entre l’ancien maire de Dakar et son jeune camarade s’agrandit de jour en jour. Si l’élément déclencheur semble avoir été l’appel du chef de l’État au dialogue pour lequel les deux hommes politiques ont des positions divergentes, la rupture de confiance était bien entamée depuis les Locales. Beaucoup de partis dans Yeewi Askan Wi ont eu quelques difficultés dans les investitures, surtout à Dakar où Taxawu Ndakaru s’était taillé la part du lion.

En outre, l’invalidation puis la réintégration de la liste département de YAW à Dakar en vue des Législatives avaient jeté un froid entre les deux personnalités politiques. Les responsables de Pastef/Les patriotes avaient fustigé en interne les ‘’manœuvres’’ de Khalifa Sall qui, soucieux de caser ses lieutenants, avait mis en péril la parité de la liste. Une situation qui avait même suscité l’ire de Barthélemy Dias, tête de liste, qui y voyait une manœuvre politique visant à l’écarter de la course pour les Législatives.

Charles Maurice de Talleyrand, ancien chef de la diplomatie de Napoléon Bonaparte, nous renseigne qu'“en politique, il y jamais d’alliances, mais que des circonstances”.  

Barthélemy Dias, le dynamiteur de YAW

Dans la perspective de ce dialogue politique, Taxawu Sénégal compte adopter la stratégie du bouclier et de l’épée. Sabre au clair, Barthélemy Dias décide de charger contre toute la galaxie Sonko et de YAW en général. Du berger à la bergère, il répond point par point à ce qu’il considère comme une attaque contre son leader Khalifa Sall. Tout le monde y passe, accusation de manipulation des masses, apologie de la violence, double jeu dans le processus du dialogue. ‘’La manipulation a trop duré, le mensonge a trop duré. (...) La politique de la pensée unique ne passera pas’’, peste-t-il dans une vidéo publiée sur sa page Facebook hier.

Enfonçant le clou, il ajoute que le leader de Pastef/Les patriotes Ousmane Sonko ‘’était au cœur du dialogue’’.

De son côté, Khalifa Sall, plus mesuré dans ses propos, joue la carte de l’unité et de l’apaisement. ‘’Nous sommes une famille. Que personne n’ose espérer que nous allions nous séparer. Yewwi Askan Wi est une famille et elle le restera’’, a clamé Khalifa Sall avant-hier lors de la conférence de YAW. 

Le prochain rassemblement du F24 prévu le 12 mai risque d'apparaître comme le vrai révélateur d’une exacerbation des tensions au sein de YAW. Si les militants de Taxawu Sénégal sont pris à parti par les sympathisants de Sonko, cela risque d’exacerber les tensions. Une situation qui pourrait découler d'une rupture définitive entre Khalifa et Sonko.  Sa tournée nationale, entamée le 14 janvier, qui l’a conduit dans divers départements comme Rufisque, Diourbel et Tambacounda, vise à consolider son électorat.  Sans oublier sa tournée à l’étranger, notamment en Europe et aux Etats-Unis, avait aussi pour but de consolider sa candidature pendant que le leader de Pastef était empêtré dans des déboires judiciaires. 

La possibilité inéligibilité de Sonko découlant du procès en appel pour diffamation dans l’affaire l’opposant à Mame Mbaye Niang, peut-elle rebattre les cartes ? Le maire de Ziguinchor aurait tout à gagner d’une réforme du Code électoral (articles L29 et L30) qui pourrait aboutir à l’issue du dialogue. La perspective d’une nouvelle condamnation dans l’affaire Sweet Beauté rétrécit sa marge de manœuvre et peut conduire l’ancien inspecteur des impôts à se montrer moins radical dans son opposition au dialogue.

Donc, dans cette optique, la dispute actuelle ne pourrait être qu’une simple brouille pour deux leaders qui, pour l’essentiel, mènent une bataille commune pour ‘’valider’’ leur participation à la Présidentielle de 2024.

F24 pour relancer la dynamique de YAW

Si le choc des ambitions paraît acter cette séparation, la perspective d’une victoire de l’opposition après 12 ans du régime de Benno Bokk Yaakaar aiguise un peu plus les appétits dans les deux camps. Khalifa Sall compte sur le report de voix et des structures d’une partie du Parti socialiste frustrée par la prédation de l’APR au sein de Benno. Tandis qu’Ousmane Sonko, dont le dossier pour viol est aussi en attente, compte sur la pression populaire afin de faire plier l’État et la justice sénégalaise.

L’appel à la manifestation le 19 mai de YAW constitue un révélateur de la dimension populaire d’Ousmane Sonko qui espère une démonstration de force contre le régime de Macky Sall.

En outre, il compte au passage relancer le dynamisme au sein des troupes de Pastef que le pouvoir tente de décapiter avec l’emprisonnement de nombreux leaders et responsables patriotes. Sur ce, les patriotes comptent sur une probable déclaration de candidature de Macky Sall qui permettrait de ressouder la contestation au sein du mouvement F24. 

Mor AMAR

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