Publié le 5 Mar 2021 - 12:48
DE L’AVENUE CHEIKH ANTA DIOP AU QUARTIER FASS DELORME

La poursuite d’un présumé nervi crée de nouvelles tensions

 

Hier, les affrontements entre manifestants et forces de l’ordre n’ont pas épargné le quartier Fass Delorme. Les manifestants, à la poursuite d’un homme qu’ils ont qualifié de ‘’nervi’’, ont attiré leurs adversaires vers ce quartier. De 15 h à 19 h, les habitants de ce secteur étaient dans l’inconfort.

 

Hier, le quartier Fass Delorme a été le prolongement des affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestants qui faisaient la loi sur l’avenue Cheikh Anta Diop. Un homme, portant un gilet noir, que les manifestants ont pris pour un nervi, a été poursuivi avec des jets pierres qui pleuvaient sur ses pas jusqu’au quartier Fass. Longeant le Canal 4, il a trouvé refuge dans une maison tout près de la rue longeant la boutique Tapis Rouge et bordant le quartier Fass.

Mais ses poursuivants n’ont pas tardé à le cueillir sur la terrasse. Un groupe de jeunes coléreux l’ont fait descendre de force, le rouant de coups de poing. Assis par terre, le monsieur, transpirant à grosses gouttes en haletant, suppliait ses bourreaux d’arrêter de le tabasser. Mais en vain. Un manifestant encore plus nerveux, se munit d’un gros morceau de bois pour fracasser la tête du ‘’nervi’’. Il a fallu l’intervention d’un monsieur pour que l’irréparable ne se produise pas. Mais ses envies de meurtre ne faiblissaient pas. ‘’S’il vous plait, vocifère-t-il, donnez-moi une machette que je le tue. Pour 15 000 F, il maltraite des gens. Nous allons le tuer’’.

Les habitants de l’immeuble où il avait trouvé refuge lui ont demandé de vider les lieux.  Il est accueilli dans la maison d’à-côté. Des manifestants se ruent alors devant le portail. Pendant une heure, ils ont réclamé sa tête, pour assouvir leur ‘’vengeance’’.

Un jeune homme, constatant son incapacité à ouvrir la porte, a accusé un des samaritains d’être de connivence avec le ‘’nervi’’. ‘’Toi-même, est-ce que tu ne serais pas un nervi ? Pourquoi tu protèges ce gars ? Mon petit frère, jure-t-il, a le bras fracturé depuis hier à cause de ces gens-là. Livrez-le nous qu’on le tue !’’.

Un autre qui est en phase avec ce jeune manifestant s’obstine. ‘’Ici, au Sénégal, nous aimons trop manifester de la compassion envers ces gens. Ils ne méritent la pitié de quiconque’’, dit-il sous le hurlement des manifestants.

A leur grande surprise, le ‘’nervi’’ a disparu comme par miracle. A en croire certains, il a été aidé par des tierces à l’intérieur. Il aurait ainsi escaladé le mur pour s’éclipser.

Il a pu partir du quartier vivant, mais y a laissé une vive tension ayant entrainé de violents heurts. Pendant que les insurgés pensaient toujours qu’il était à l’intérieur de cette maison et suppliaient le samaritain d’ouvrir la porte, une dizaine d’hommes en tenue, avec leur bouclier, étaient visibles à quelques encablures. Leur présence a ainsi fait de cette ruelle, par moments, un terrain d’affrontements. Des pierres atterrissent sur le goudron, alors que des grenades lacrymogènes tombent devant les maisons.

De 15 h jusqu’à 19 h, les habitants de ce quartier n’ont respiré que l’odeur fétide du gaz lacrymogène.

 Les affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestants s’y sont ainsi prolongés. Des barricades ont été érigées un peu partout. Rendant impraticables les deux rues qui bordent le canal. Seuls les motocyclistes arrivent à se faufiler dans ce chaos.

Il aura fallu attendre au-delà de 20 h, pour que la circulation revienne à la normale.

IBRAHIMA MINTHE (STAGIAIRE)