Une crise monétaire qui exacerbe les frustrations

La monnaie gambienne traverse une période de turbulence sans précédent. En l’espace d’un an, le dalasi a perdu environ 44 % de sa valeur face au franc CFA, une dépréciation inquiétante qui affecte le pouvoir d’achat des ménages à l’approche de la fête musulmane de l’Eid-ul-Adha.
Il y a un an, 5 000 F CFA permettaient d’obtenir entre 435 et 440 dalasis – soit une moyenne de 437,5 dalasis. Aujourd’hui, cette même somme donne droit à 630 dalasis, traduisant une perte nette de 192,5 dalasis, soit une chute d’environ 44 %.
Cette détérioration rapide du taux de change reflète la perte de confiance des marchés dans la stabilité macroéconomique du pays. Elle survient dans un contexte où les prix des denrées importées ne cessent d’augmenter, accentuant la pression sur des consommateurs déjà fragilisés.
Face à cette situation, l’économiste Musa Basad Jawara, formé au Japon et diplômé aux États-Unis, tire la sonnette d’alarme.
Selon lui, la volatilité monétaire qui secoue la Gambie n’est plus simplement conjoncturelle, mais s’est installée comme une crise monétaire structurelle. ‘’La volatilité du marché monétaire gambien s’est transformée en une crise à part entière, mettant en péril la situation des ménages qui se préparent aux festivités musulmanes à venir, notamment les achats traditionnels de moutons’’, a-t-il déclaré.
Jawara, ancien fonctionnaire du Département d’État américain, critique également l’attitude des décideurs économiques du pays, qu’il juge trop passive face à une conjoncture internationale instable.
‘’Je suis préoccupé par le fait que les opérateurs économiques gambiens se concentrent excessivement sur des questions budgétaires de routine, au détriment de la mise en place de mécanismes de réponse aux fluctuations de l’économie mondiale. Cela laisse le pays vulnérable face aux chocs économiques internationaux’’, a-t-il souligné.
Pour Jawara, la réponse à cette crise ne peut plus attendre. Il appelle à une refonte stratégique de la gestion macroéconomique, incluant des outils de stabilisation des taux de change, une diversification des réserves de devises et un appui renforcé aux secteurs productifs nationaux.
Dans le climat actuel, où l’économie mondiale reste instable et les dépendances extérieures marquées, la Gambie doit, selon lui, adopter une posture plus résiliente et anticipatrice, si elle veut éviter une spirale inflationniste prolongée.