Publié le 12 Apr 2021 - 21:52
KHALIFA SALL SUR LE RESPECT DU CALENDRIER ELECTORAL

‘’C’est par la lutte que nous obtiendrons ce que nous voulons’’

 

Le leader de la coalition Taxawu Senegaal a mobilisé ses troupes, ce samedi. Cette grande mobilisation a été l’occasion, pour Khalifa Sall, d’exiger l’audit du fichier électoral et le respect du calendrier électoral. L’ancien maire de Dakar a aussi parlé des différents problèmes qui assaillent la capitale.

 

Le leader de la coalition Taxawu Senegaal, Khalifa Sall, ne compte pas laisser le terrain politique à ses adversaires politiques. Il vient d’initier une série de manifestations dénommées "Jokko ak askanwi’’. La première édition s’est tenue, ce samedi, à Dakar, et a eu pour cadre la salle du City Business. Ses militants et sympathisants ont massivement répondu à l’appel.  Engagés et déterminés, ils ont envahi les lieux, dès le début de l’après-midi.  Ceux qui ont réussi à accéder à la salle de conférence ont dû se bousculer pour se faire une petite place.  C’est dans cette ambiance surchauffée que Khalifa Sall est arrivé, sous bonne escorte de gros bras. Dans son sillage, le maire de Dakar, Soham El Wardini, de celui de la commune de Mermoz – Sacré-Cœur, Barthélémy Dias, de l’édile de la commune de Fann-Point E, Palla Samb et du leader de la plateforme GFC - la Grande force citoyenne.

Dans un désordre organisationnel qui caractérise les mobilisations politiques sénégalaises, le dirigeant des Forces de gauche a pris la parole. Khalifa Sall a demandé à ses militants de se mobiliser pour préparer les prochaines échéances électorales. Il a surtout exigé du gouvernement l’audit du fichier électoral. Mais il s’est empressé de préciser que cela ne doit pas être un prétexte, pour le pouvoir, de repousser les élections. ‘’Les élections locales ont été reportées à plusieurs reprises. Mais cela ne nous a pas surpris. L’audit du fichier ne signifie pas forcément qu’on ne peut pas tenir les élections en 2021. Ce n’est pas une conséquence automatique. Parce que l’audit, c’est un processus. Le frère de Talla Sylla, Ndiaga Sylla, a raison. On peut jouer sur les délais’’, dit-il, invitant Macky Sall à respecter le calendrier électoral.

‘’Si le gouvernement a la volonté de tenir les élections en décembre 2021, elles se tiendront. C’est ce que toute l’opposition demande. Et ce n’est pas trop demandé ; c’est un droit'', considère le socialiste qui se demande comment on pourrait reporter les élections en 2022, alors que le budget 2021 est déjà voté. À ses yeux, il est infaisable de coupler les élections locales et les Législatives.

‘’Nous connaissons tous la nature de ces élections. L’Etat ne va jamais décaisser le budget devant permettre l’organisation des élections couplées. On n’est pas dupe. Le cumul des élections ne cause que des problèmes. Les élections locales doivent se tenir en 2021 ; les Législatives en 2022 ; la Présidentielle en 2024’’ précise-t-il, soulignant que les gouvernants ont juré sur la Constitution de respecter ce calendrier.

Ainsi, il compte se battre pour que les échéances soient maintenues. Et appelle à l’union des forces de l’opposition. ‘’Dans une démocratie, il doit y avoir une opposition forte qui s’oppose. Nous qui sommes du côté de l’opposition, nous devons comprendre que rien ne nous sera donné. C’est par la lutte que nous obtiendrons ce que nous voulons. Il va falloir l’arracher. Je demande à toutes les composantes de l’opposition de descendre rapidement sur le terrain. Le camp de la majorité est en train de faire des meetings. Allons donc vers les populations pour s’adresser à elles’’.

Problèmes de Dakar

L’ancien maire de Dakar s’est ensuite appesanti sur les problèmes dont la capitale est confrontée. Notamment, la décentralisation. A ses yeux, les collectivités locales n’ont pas assez de compétences distinctes de celles de l’Etat. ‘’On a 19 communes à Dakar, 16 à Pikine, 5 à Guédiawaye, 7, voire 8 à Rufisque. Mais c’est l’Etat qui fait tout à la place des élus locaux. Même quand il s’agit d’une simple construction de marché, c’est l’Etat qui décide et qui fait tout. Alors qu’aujourd’hui, dans une vraie politique de décentralisation, il y a des ministères qui ne devraient plus exister. Il y a 9 domaines de compétence, mais ces derniers ne sont que de la poudre aux yeux’’, regrette-t-il.

L’autre sujet problématique à Dakar est relatif au foncier. Khalifa Sall demande l'extension des villages traditionnels, car il estime que leurs populations ont besoin de plus d’espace. ‘’Il y a un problème de gestion de frontières dans la région du Cap-Vert. Même si Dakar est la capitale, l’expansion de ces villages est une nécessité, parce qu’on y note une augmentation croissante de la population. Les habitants de Ngor et de Yoff ont aujourd’hui un sérieux problème’’, dit-il. Et selon lui, ‘’il n’y a aucune visibilité et de planification’’ de l’occupation spéciale à Dakar.

‘’Si on ne fait pas attention, quand le cimetière de Yoff sera plein, les gens n’auront que Diamniadio pour enterrer leurs morts’’, prévient-il. ‘’Grand-Yoff avait la plus grosse réserve frontière de Dakar. Faute d’espace, jusqu’à présent, la commune n’a pas de lycée, alors qu’elle a plus de 300 mille habitants’’, dit-il. Non sans dénoncer les spoliations frontières à Diamniadio et à Sangalkam.

 L’autre problème soulevé par Khalifa Sall est lié à l’aménagement urbain. Il dénonce le fait que les résidents à Dakar peinent à accéder aux plages, alors que la région de Dakar est une presqu’île.

KHALIFA SALL SUR LES ÉVÉNEMENTS DU MOIS DE MARS

‘’Il s’agit d’une vraie révolte…’’

Le leader de Taxawu Senegaal, Khalifa Sall, voit dans les événements qui ont secoué le pays, au mois de mars, une ‘’révolte’’ populaire qu’il faut savoir décrypter, pour les tenants du pouvoir. S’insurgeant contre la propension du régime à emprisonner ses adversaires, il invite à un retour à une tradition de paix et de dialogue.

Khalifa Sall a livré sa pensée sur les récentes émeutes qui ont secoué le Sénégal et considère que le régime n’en a pas fait une bonne lecture. Au gouvernement qui met les événements de mars sur le dos d’Ousmane Sonko, il rétorque : ‘’Les événements du mois de mars nous interpellent dans notre capacité à lire la révolte des populations. Parce qu’il ne s’agit pas d’inquiétude des populations, il s’agit d’une vraie révolte. Les populations n’ont eu besoin de personne pour se soulever’’, dit-il. ‘’Les gens ont dit qu’elles avaient faim ; qu’elles ont saccagé. Mais pourquoi se sont-elles comportées ainsi ?’’.

A cette question rhétorique, il répond que les populations n’avaient plus le choix. ‘’Nous sommes dans un pays où manifester est devenu une exception. On ne peut pas marcher librement ; on ne peut pas parler librement. Tout est réprimé’’, dénonce-t-il.

D’ailleurs, Khalifa Sall pense que la prison n’est pas une solution, en démocratie. ‘’On ne peut pas tout le temps mettre les gens en prison. Finalement, ça déprécie la prison. ‘’Parce que ‘ken ragalatu fi kasso, naxte nieup dem nagn kasso’ (nul n’a plus peur de la prison, parce que tout le monde y est allé)’’, a-t-il persiflé, estimant qu’’’il y a des textes liberticides qu’il faut abroger''. L'ancien maire de Dakar appelle à un retour à la pratique saine, apaisée de la politique, à l’exercice de la démocratie.

Ainsi, aux yeux du socialiste, ‘’il n’y a pas un seul problème qu’on ne peut résoudre à travers un dialogue, au Sénégal’’, dit-il, faisant toujours référence à l’affaire Sonko. ‘’Le pays nous appartient à tous. La paix est essentielle pour la majeure partie de la population qui ne peut pas aller ailleurs. Elle doit aussi être une priorité pour le gouvernement actuel. Les membres de ce gouvernement doivent être les premiers à afficher leur volonté d’œuvrer pour la paix’’, martèle-t-il devant un parterre de militants et de sympathisants.

A ce moment, il est interrompu par les chants de louange. Lorsque le calme revient, Khalifa Sall poursuit : ‘’La paix a un prix ; ça s’achète. Ceux qui sont au pouvoir, il faut qu’ils payent ce prix, qu’on ait une paix définitive.’’ Ainsi, M. Sall considère que toute action qui ne va pas dans ce sens ne fera qu’aggraver la situation. ‘’Ils parlent de terrorisme et autre. Mais dans ce pays, aucune force extérieure ne peut nous diviser, à moins que nous le souhaitions nous-mêmes. Si nous nous unissons pour la paix, personne ne pourra rien contre nous’’.

Par ailleurs, Khalifa Sall pense que le vrai challenge, après ces événements du mois de mars, c’est de restaurer, de cultiver la confiance entre les acteurs politiques et entre l’Etat et les populations. ‘’Ce pays est une nation. Il avait un Etat respecté ; aujourd’hui, il y a un déni d’Etat. Certaines institutions sont décriées et ceux qui sont au sein de ces institutions, eux-mêmes, ont des difficultés à se faire respecter ou à se faire entendre’’, souligne-t-il.

‘’C’est la faute, d’abord, de l’Etat, puisqu’il incombe à ceux qui nous gouvernent, de par la conscience des populations, de faire jouer, normalement, à nos institutions leurs véritables rôles. Si, aujourd’hui, les Sénégalais doutent de leur justice, s’ils ont des problèmes de confiance avec le représentant au niveau de l’Assemblée, c’est parce qu’ils ont la sensation qu’ils ne sont pas entendus, qu’ils ne sont pas compris, mais surtout, qu’on ne prend pas en charge leurs préoccupations, leurs sollicitations, leur souffle’’, déclare Khalifa Sall.

BABACAR SY SEYE

 

Section: