Publié le 10 Oct 2012 - 08:20
POST-POINT

 La rançon du totalitarisme politicien

 

 

La sortie parisienne de Khalifa Ababacar Sall est un symptôme d'alerte pour la coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY). Elle peut être sans doute curieuse si l'on se demande où était le maire de Dakar lorsque, à un carrefour de la guerre contre des vestiges du Parti démocratique sénégalais (PDS), des voix minoritaires s'élevaient pour demander clarté et transparence dans les alliances en direction des élections législatives du 1er juillet 2012.

 

Mais quand aujourd'hui un «modéré» comme le Secrétaire à la vie politique du Parti socialiste réclame ici et maintenant une nouvelle clarification du jeu politique national, on perçoit très vite que la situation actuelle dans la majorité présidentielle n'est plus tenable. Elle relève purement et simplement de l'escroquerie politique.

 

Après huit mois d'alliance, la réalité est consternante : la coalition Benno Bokk Yaakaar a affaibli et atrophié l'espace et le jeu politique en supprimant de facto tous débats publics émulateurs en son sein. Désormais solidement accrochés à leurs strapontins respectifs, les alliés du 25 mars pour lesquels l'écrasante majorité des Sénégalais a souhaité la victoire contre l'Ancien régime ne semblent plus avoir comme horizon que la conservation du pouvoir. Comme sous l'ancienne chefferie wadienne, ils tendent à commettre des aboyeurs professionnels sans aucune consistance politique ou éthique, enclins à squatter les médias et dont le passe-temps favori est désormais de livrer leur arrogance naissante à l'opinion.

 

La prise de position de Khalifa Sall, du clair-obscur en partie - ce qui n'est pas surprenant chez un modéré - a néanmoins le mérite de secouer le cocotier BBY jusque dans ses fondements, à fond dans ses incertitudes. Le monstre politique à mille têtes qu'est devenue la majorité présidentielle est un casse-tête dont la moins mauvaise des fins serait un éclatement sans gros dégâts collatéraux au niveau des chapelles qui en sont partie prenantes. Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Idrissa Seck, Abdoulaye Bathily, Amath Dansokho et leurs autres alliés savent bien que quelque chose ne tourne pas rond ni net dans la gouvernance de Macky Sall et qu'il existe un risque réel d'étouffement collectif.

 

Ils peuvent être frustrés par les choix d'un chef de l'Etat qui réaffirme à chaque occasion sa posture de leader suprême de la majorité. Cela veut dire ce que cela veut dire ! Le président le sait qui joue, comme il veut, lui où par personnes interposées, sur les nerfs d'alliés presque pris au piège : ravaler les critiques contre le régime au niveau des structures de base (jeunes, étudiants, etc.), à défaut de faire toute la troupe, est le prix à payer pour rester dans l'attelage du pouvoir et continuer à bénéficier de ses strapontins. La caricature est ramassée, brute, mais ainsi marche la politique sous nos cieux !

 

Face à la saine proposition de Khalifa Sall, des responsables de Benno Bokk Yaakaar (voir par ailleurs) sont unanimes à rétorquer qu'il n'y a pas péril en la demeure. C'est peut-être vrai car le dirigeant socialiste voudrait tailler des croupières à Ousmane Tanor Dieng qu'il n'aurait pas eu une meilleure idée tant le Secrétaire général du Parti socialiste semble devenu indispensable au président de la République. Tant mieux si la coalition BBY est en excellente santé morale et éthique ! Mais demain, ce seront les mêmes qui justifieront devant l'opinion leur décision de ne plus travailler avec Macky Sall, quand sera venu le temps calculé de la rupture programmée. Les plus ambitieux d'entre eux, à l'approche d'une élection majeure, reprendront «leur liberté». Les plus parasites, eux, s'accrocheront au wagon présidentiel... On sera alors tout heureux de ne pas finir dans un désordre de type malien.

 

 

PAR MOMAR DIENG

 

 

 

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