Publié le 3 Oct 2013 - 12:50
PROCÈS DU NAVIRE ESPAGNOL ÉCHOUÉ À L'ÎLE DES MADELEINES

 L'État réclame 10 milliards F Cfa de dommages et intérêts

 

 

Le substitut du procureur de la République a requis hier une peine d'emprisonnement de 6 mois contre José Atonio Azkarate et José Antonio Amparam Cuadra et 3 mois ferme contre Goodwin Emmanuel Wobenetsi, respectivement Commandant, chef de la pêche et matelot du navire espagnol échoué le 2 août 2013 à l’île des Madeleines. L'État réclame 10 milliards de F Cfa de dommages intérêts.

 

 

Si le tribunal des flagrants délits de Dakar suit le substitut du procureur de la République dans son réquisitoire, José Atonio Azkarate, José Antonio Amparam Cuadra, respectivement Commandant et chef de la pêche du navire espagnol échoué le 2 août 2013 dernier au large des côtes de l’île Madeleines, vont passer les six prochains mois dans les geôles sénégalais, loin de leur Espagne natal. Ils sont poursuivis pour les chefs d'inculpation de pollution échouement, usurpation de commandement, détention d'explosifs et non conformité aux règlements sur la sécurité. Quant au matelot Goodwin Emmanuel Wobenetsi, il encourt trois mois ferme. En plus des peines d'emprisonnement, les prévenus peuvent être condamnés à payer une caution de 2 milliards de F Cfa à l'État du Sénégal qui s'est constitué partie civile. Pour sa part, l'agent judiciaire de l'État a réclamé la somme de 10 milliards de F Cfa,  à titre de dommages intérêts.

 

C'est dans la nuit du 2 octobre que le navire espagnol a échoué à l'île Madeleine. Les enquêtes préliminaires ont révélé que la principale faute incombe au commandant du navire qui a quitté la passerelle et laissé la commande du bateau au chef pêcheur, alors que le bateau n'avait pas encore quitté la zone portuaire. De plus, ils ont activé le pilotage automatique avant de sortir de la zone portuaire de Dakar. Conséquence, le navire a dévié de sa trajectoire pour prendre la direction de l'île des Madeleines qui est une zone de reproduction des espèces halieutiques et interdite à la navigation. Ces faits, les prévenus les avaient reconnus devant le procureur de la République.

Mais à la barre hier, ils se sont rétractés, en soutenant que c'est le commandant lui-même qui pilotait le navire. De toute évidence, note le représentant de la Haute autorité chargée de la coordination et de la sécurité maritime, le commandant du navire et son équipage, qui ont pratiqué le port de Dakar à plusieurs reprises, ont commis des fautes de débutant. Suspectant un sabotage, il estime que l'équipage du navire espagnol, qui avait connaissance de l'île des Madeleines, a royalement négligé tout ce qui lui permettait de détecter les obstacles. Cela, d'autant plus que le navire disposait d'un radar sophistiqué. D'ailleurs, il accuse l'équipage de n'avoir au préalable pas défini leur destination, en sortant du port de Dakar. ''Ils n'avaient pas une destination définie, quand ils sortaient du port de Dakar. Cela est une lourde erreur'', croit-il savoir.

 

''L'État veut arnaquer les prévenus parce qu'il est dans des difficultés avec la pénurie d'eau''

 

''En plus d'une fuite de carburant qui a affecté la faune et la flore, il y a eu une fuite d’ammoniaque qui a été un danger pour les personnes qui étaient présentes sur les lieux de l'accident'', a renchéri le représentant des Eaux et forêts. S'appuyant sur ces faits, le procureur a demandé au tribunal d'infliger une peine d'emprisonnement de six mois ferme à José Atonio Azkarate et José Antonio Amparam Cuadra et trois mois ferme au matelot Goodwin Emmanuel Wobenetsi. Ce que la défense n'a pas voulu entendre. Elle estime que personne jusqu'ici n'est parvenue à prouver que l'écosystème a subi des conséquences, quand bien même il y avait des risques de pollution. Partant de là, Me Christian Faye a dénoncé un acharnement et une volonté de l'État d'envoyer ses clients en prison inutilement. Ramenant les faits auxquels ses clients sont poursuivis à un simple accident banal, il a estimé que l'État est aussi responsable dans cette affaire, dans la mesure où le parc national de l'île des Madeleines n'a pas de bouée, encore moins de balise pour identifier le site.  S'appuyant sur cette défaillance de l'État, il estime que les 10 milliards demandés à titre de dommages et intérêts n'ont pas leur raison d'être. En ce qui concerne la caution de 2 milliards réclamée par l'Anam, il souligne que le tribunal n'a pas les compétences de la fixer. ''C'est une simple affaire à laquelle on a voulu donner une ampleur qu'elle n'a pas'', a estimé Me Baboucar Cissé. Selon l'avocat, ''Pape Diouf, en tant que ministre de la Pêche, avait dit qu'il n'y avait aucune conséquence sur l'écosystème. C'est après que Ali Aïdar, qui est un plongeur qui a plongé, a dit qu'il y a des impacts sur l'écosystème''. Il dira : ''Jusqu'ici, personne n'est en mesure de prouver le préjudice subi dans cet accident.'' ''L'État veut arnaquer les prévenus parce qu'il est dans des difficultés avec la pénurie d'eau'', a-t-il persiflé. Non sans soutenir: ''c'est parce que l'Anam a exigé que l'armateur lui verse une caution de deux milliards que les prévenus ont été arrêtés''.

Délibéré le mercredi 9 octobre prochain.    

 

 

Section: