Publié le 18 Feb 2012 - 15:59
RASSEMBLEMENT DU M23

La place de l'Indépendance ''bunkerisée''

Ibrahima Fall avait appelé hier à un rassemblement à la place de l'Indépendance. Ni lui, ni Cheikh Bamba Dièye, encore moins Youssou Ndour n'ont pu franchir le cordon de sécurité mis en place par la police. L'instant d'un après-midi, la place était devenue un no man's land.

 

 

Cheikh Bamba Dièye a été bien inspiré de déclarer hier que c'est ''la police qui était en campagne électorale sur la place de l'Indépendance'', en lieu et place des candidats. Car, jamais de mémoire de Sénégalais, on a vu autant de policiers au mètre carré dans cette place devenue, aujourd'hui, le symbole de la contestation contre la candidature ''inconstitutionnelle'' de Me Abdoulaye Wade. Impressionnant ! Le mot n'est pas de trop pour décrire le déploiement des policiers qui ont tôt fait de barrer tous les accès y menant. Et Dieu sait qu'ils étaient nombreux. Ainsi, malgré les stratégies déployées par les candidats à la présidentielle, aucun d'eux n'a pu accéder à la place de l'Indépendance. C'est le candidat Ibrahima Fall qui est venu en premier, après 16h, accompagné de son staff. Il sera stoppé à hauteur de l'hôtel La Croix du sud sur l'avenue Albert Sarraut. En effet, sous la houlette du commissaire central Arona Sy à la tête des éléments de la police, la marche vers la place de l'Indépendance est vite enrayée à coups de grenades lacrymogènes. C'est sur ces entrefaites, qu'est arrivé Cheikh Bamba Dièye.

 

 

Cheikh Bamba Dièye embarqué par la police

 

C'est la ruée des journalistes vers le candidat. Plus tard, le candidat déclarera avoir usé de stratégies et fait parler sa connaissance des arcanes du centre-ville pour parvenir à déjouer la vigilance des policiers et accéder à la place de l'indépendance. Toujours est-il que le leader du Fsd/Bj, après une première prise de bec avec un élément de GMI et des échauffourées avec les policiers qui utilisent des gaz lacrymogènes et font deux blessés parmi son staff, sera très vite rejoint par le commissaire Arona Sy, avant que la situation ne dégénère. Car, il avait décidé de ne pas se laisser faire. D'ailleurs, ''je ne bougerai pas d'ici'', rétorque-t-il au commissaire. Toutefois, après de vifs échanges et devant son refus, il est embarqué dans une 4x4 Touareg bleue en compagnie du commissaire central. Très vite, le bruit court que Cheikh Bamba Dièye a été interpellé par la police. ''Comment peut-on arrêter un candidat à la présidentielle ?'' s'étonne Jacques Sagna debout en face de l'Immeuble Soxna Anta, sur l'avenue Georges Pompidou. Devant le déchaînement de violence, sous ses yeux, le jeune entrepreneur déclare : ''Je ne sais pas pourquoi je suis revenu au Sénégal. On ne travaille pas. On est saigné par les taxes, les impôts et les patentes. Avec les cotisations à l'Ipres pour mes employés, je me retrouve avec rien''. Et pendant que les jeunes de Y en a marre sont dispersés par les forces de l'ordre, arrive Youssou Ndour. Malgré sa détermination, le leader de Fekke ma ci boole est également empêché d'accéder à la place de l'Indépendance devenue le temps d'un après-midi une zone interdite. Banques, agences de voyage, restaurants, pâtisseries, ministères tout est fermé. Même les habituels vendeurs à la sauvette ont déserté les lieux. Il faut montrer patte blanche pour traverser la place, au grand dam de cette dame qui rouspète. ''Il faut bien que l'on rentre nous !'', fulmine-t-elle devant l'intransigeance des policiers. Une place fantôme balayée par un vent glacial.

 

 

RÉACTIONS

Les leaders venus hier prendre part au rassemblement du M23 convoqué par le candidat Ibrahima Fall ont laissé exploser leur colère devant le dispositif mis en place par la police qui a brutalement enrayé toutes les tentatives de rallier ladite place.

 

Ibrahima Fall

''C'est une honte''

 

''J'ai écrit au préfet de Dakar pour lui signifier qu'il n'avait pas le droit d'interdire la manifestation que j'ai prévue cet après-midi à la place de l'Indépendance. Il faut croire que nous sommes désormais dans un pays de non-droit. Abdoulaye Wade et son ministre de l'Intérieur Ousmane Ngom ont décidé de faire ce qu'ils veulent. Que les gens sachent que ce sont eux les fauteurs de troubles. Si quelque chose m'arrive d'ici à la tenue de l'élection présidentielle, ils en porteront la responsabilité. Nous ne sommes ni au royaume du bour Sine, ni au royaume du bourba Djolof, encore moins dans celui du damel du Cayor. Nous sommes dans une République où les citoyens ont des droits. Idem pour le président qui ne peut pas tout se permettre. Si Abdoulaye Wade et Ousmane Ngom ont décidé de faire ce qu'ils ne veulent, nous allons faire face''.

 

Plus tard, le candidat s'exprimera sur la bombe lacrymogène lancée à l'intérieur de la Zawiya El Hadji Malick Sy : 

''Cette attaque contre des fidèles qui ne font rien d'autre que pratiquer leur religion, c'est une honte. Mais, cela ne nous surprend pas, parce que le régime de Abdoulaye Wade est ainsi fait. Il n'a aucun respect pour personne, ni pour les citoyens, ni pour les cultes, ni pour le peuple sénégalais. J'espère que le peuple prendra ses responsabilités pour le mettre hors d'état de nuire. Demain nous aurons la même manifestation à la place de l'Indépendance ''.   

 

 

Youssou Ndour, Fekke ma ci boole

''Le président doit se ressaisir''

 

'' C'est une situation inacceptable. Les citoyens sénégalais qui ont juste demandé la vérité, rien que la vérité sont en train d'être matraqués. Il faut qu'on libère les jeunes de Y en a marre qui ont été arrêtés hier, sans condition. Immédiatement. Le Sénégal était connu pour être une vitrine de la démocratie. Aujourd'hui, cette image est écornée. Le président est isolé. Il n'est pas au courant de ce qui se passe, de la réalité. Il est dans des nuages. Je pense qu'il est temps qu'il se ressaisisse ''.

 

 

Bara Tall

''Abdoulaye Wade est l'homme le plus violent du Sénégal''

 

Nous étions venus soutenir le candidat Ibrahima Fall. Mais, il a été empêché d'exercer l'un de ses droits les plus élémentaires de candidat, c'est-à-dire battre campagne. Face à la reconnaissance d'un candidat qui n'a pas le droit de participer à l'élection, le rejet de citoyens qui remplissaient toutes les conditions pour être candidat et enfin l'empêchement d'une partie des candidats à exercer leur droit de battre campagne, comment voulez-vous qu'il y ait des consultations électorales sincères ? Nous sommes en train de nous leurrer. On est en présence d'une dictature. On est en train de subir la violence d'un système. Abdoulaye Wade est l'homme le plus violent du Sénégal. Nous citoyens sommes prêts à nous battre avec ou sans les hommes politiques pour reconquérir notre droit le plus élémentaire, notre droit de citoyen.

 

Gaston COLY

Section: