Les dés sont pipés, selon les avocats de Karim Wade
A quelques jours de l’audience de la Cour suprême pour l’examen de la demande de l’Etat du Sénégal portant annulation d’un arrêt rendu en février dernier en faveur de Karim Wade, les avocats de l’ex-ministre sont montés au créneau pour dénoncer une instrumentalisation de la justice.
Lors de l’inculpation de Karim Wade le 17 avril 2013, la défense avait soulevé une exception, en invoquant l’incompétence de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI) à poursuivre leur client. Mais cette exception d’incompétence avait été rejetée par la CREI. La défense avait alors introduit un recours au niveau de la Cour suprême. Dans son arrêt rendu le 6 février, la chambre criminelle de la Cour suprême avait déclaré recevable cette requête. Seulement, il y a deux mois, l’Etat du Sénégal a introduit un rabat d’arrêt pour attaquer la décision rendue en faveur du fils de l’ex-président Wade.
La Cour suprême se penche mardi prochain sur cette requête de l’Etat. En attendant, les conseils de Karim Wade ont donné hier une conférence de presse pour indiquer que la messe est déjà dite. Car selon Me Demba Ciré Bathily, ‘’Karim est dans une procédure avec un adversaire déloyal. Et tout ce qu’il gagne par le droit, on le lui retire par la force, l’arbitraire’’. Les avocats soupçonnent un revirement de la juridiction. ‘’Si l’arrêt du 6 février 2014 est annulé, ce serait une preuve de plus sur le complot politico-judiciaire dont est victime le prisonnier politique Karim’’, avertit Me El Hadj Amadou Sall.
‘’Le 19 août, ce sera un infanticide et un fratricide’’
Son confrère Me Ciré Clédor Ly est plus catégorique. Il affirme ‘’qu’il y aura une formation spéciale et que celle-ci va désavouer la chambre criminelle de la Cour suprême’’ qui, poursuit-il, ‘’est la bête noire de la CREI et la tête de turc de la justice, du fait de son caractère rebelle’’. Ainsi, sa conviction dans cette affaire est très claire : ‘’La résolution de l’Etat est de détruire Karim Wade, quitte à détruire physiquement ceux qui l’accompagnent’’. ‘’Le 19 août, ce sera un infanticide et un fratricide. Ils n’ont qu’à nous dire la peine qu’ils ont déjà décidée, car l’audience de mardi, c’est pour baliser le terrain à la compétence de la CREI’’, soutient Me Ly.
Les requêtes en souffrance
Le 19 février 2014, le Garde des Sceaux avait sorti un communiqué pour démentir ‘’Le Quotidien’’ qui avait écrit que ‘’la Chancellerie a rencontré les chefs de parquet pour un rabat d’arrêt’’. ‘’La Chancellerie n’a jamais envisagé de faire un rabat d’arrêt’’, soutenait le document. Après que cette information s’est finalement révélée juste, Me Ciré Clédor Ly estime que ‘’l’autorité de l’Etat est souillée et discréditée’’. L’avocat déplore l’empressement de la Cour suprême à enrôler le dossier dans un délai de deux mois. Alors que, renseigne Me Sall, ‘’une procédure de rabat dure en moyenne neuf mois’’.
Pire, en ce même moment, renchérit-il, ‘’le prisonnier politique Karim Wade dispose de sept recours devant la même Cour Suprême, depuis plus de 15 mois’’. Parmi ces recours, il y a celui contre l’ordonnance de rejet de requête aux fins d’annulation d’expertise et de contre-expertise, contre le rejet de la requête aux fins déclinatoires de compétence et de refus d’informer, le recours pour excès de pouvoir contre le décret portant nomination d’Antoine Félix Diome comme adjoint du procureur spécial près la CREI. Or si l’on en croit Me Ciré Clédor, ‘’la CREI n’aurait jamais dû programmer ce dossier tant que la Cour suprême n’avait pas vidé ces requêtes’’.
FATOU SY