Il n’y aura pas de défense commune au procès

Le procès de Khalifa Sall s’ouvre ce matin, devant la deuxième Chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Dakar. Même s’il est très fort probable que les débats ne démarrent pas aujourd’hui, les avocats des co-prévenus du maire de Dakar espèrent que ‘’le droit sera dit’’.
‘’Quand la politique entre au prétoire, le droit sort par la fenêtre’’. Au regard de cette assertion, les partisans de Khalifa Sall restent très sceptiques quant au sort de leur mentor dont le procès s’ouvre aujourd’hui, à Dakar. Ce sentiment se justifie par le fait qu’ils restent convaincus que le maire de Dakar, poursuivi pour détournement de deniers publics portant sur 1,8 milliard de francs Cfa, est tout simplement victime ‘’d’un règlement de comptes politiques’’. Alors, ses co-prévenus doivent-ils craindre d’être les victimes collatérales de ce que les avocats et proches du député-maire appellent ‘’un procès politique’’ ou ‘’acharnement’’ ?
En tout cas, les co-prévenus de Khalifa Sall, du moins certains de leurs avocats, espèrent que ‘’le droit sera dit et rien que le droit’’, même si, du reste, ils n’émettent aucune appréhension sur le président Magatte Diop, Président de la deuxième Chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Dakar et ses deux assesseurs.
Dans cette affaire, le maire de Dakar comparait avec ses cinq agents. Il s’agit de son Daf Mbaye Touré, de la secrétaire Fatou Traoré, d’Amadou Mactar Diop qui siégeait au niveau de la commission de réception et Yaya Bodian, Chef du bureau du budget, ainsi qu’Ibrahima Yatma Diaw, Chef de division financier et comptable. Deux anciens percepteurs municipaux, notamment Mamadou Oumar Bocoum et Ibrahima Touré, sont également prévenus, mais ils comparaissent libres.
Toutefois, à quelques heures du démarrage du procès, Me Bamba Cissé, constitué pour Mbaye Touré, souligne qu’il ne saurait y avoir de défense commune, dans la mesure où, argue-t-il, ‘’en droit, la responsabilité pénale est individuelle et personnelle’’. Par contre, il se dit optimiste non seulement pour son client, mais également pour tous les prévenus. ‘’Tout ce qui nous intéresse, c’est que le droit soit dit et ce n’est pas nécessairement une responsabilité collective’’. Un argument que semble partager Me Mamadou Guèye Mbow, conseil de Mamadou Oumar Bocoum et Ibrahima Touré. ‘’Nous avons une posture très technique et, en droit, il n’y a aucun élément qui peut nous impliquer de près ou de loin dans cette affaire’’, plaide la robe. L’avocat s’étonne que ses clients soient renvoyés en jugement, alors que, rappelle-t-il, ils ont été mis en liberté provisoire par le doyen des juges sur la base de contestations sérieuses.
Poursuivant son argumentaire, Me Mbow relève que ses clients sont des comptables publics, alors que Khalifa Sall a une posture d’ordonnateur. Or, indique-t-il, ‘’le texte sur la comptabilité publique distingue très nettement leurs responsabilités’’. Par conséquent, précise le conseil, ‘’les prévenus ne sont pas soumis au même sort, car les deux régimes de responsabilité sont distincts’’. Lui également se montre optimiste et ajoute que ‘’la même posture technique’’ adoptée devant le magistrat instructeur sera de mise devant le juge correctionnel pour que ses clients soient blanchis.
‘’Personne ne s’accuse’’
Me Khassim Touré, conseil de Mbaye Touré et aussi de Khalifa Sall, dit pour sa part appréhender avec ‘’sérénité’’ le procès qui s’ouvre. Parce que, dit-il, ‘’nous sommes blancs comme neige. Et tout ce que nous attendons des juges, c’est une bonne application de la règle de droit. Nous espérons que le droit sera dit dans toute sa plénitude’’. Pour la robe noire, les prévenus ont ‘’le même destin juridique’’, même si, souligne-t-il, ‘’Mbaye Touré n’est un politique comme Khalifa Sall, mais un fonctionnaire qui l’a toujours servi dans la loyauté et la fidélité’’. Plaidant pour l’innocence du Daf, Me Touré souligne qu’il a toujours agi en toute bonne foi et la ligne de défense sera la même pour ses deux clients.
Me Amadou Aly Kane, qui défend tous les prévenus, abonde dans le même sens. ‘’Je crois qu’il n’y a pas de contradictions. Personne ne s’accuse. Une défense commune de tous les prévenus est conforme à la déontologie des avocats’’, soutient l’avocat ‘’droit de l’hommiste’’. Au demeurant, anticipe-t-il déjà, ‘’les faits pour lesquels sont poursuivis ces clients ne sont pas susceptibles de poursuites, sur le plan pénal’’.
Tous ces avocats espèrent, donc, que les prévenus soient relaxés ou même renvoyés des fins de la poursuite.
FATOU SY