Publié le 27 Jul 2013 - 13:00
BOUBACAR BA BILL, VICE-PRESIDENT DE L’ADEMA/PS

“Nous sommes dans une situation anormale”

 

Dimanche, les Maliens vont aux urnes pour élire un nouveau président. Pensez-vous que les conditions sont réunies pour tenir cette présidentielle ?

Je pense qu’à l’étape où nous sommes, les conditions minimales sont réunies. Les conditions sont valables et égales pour tout le monde. Il n’y a pas de passe-droit, ni de favoritisme à quelque niveau que ce soit. En tout cas, pour moi, jusqu’à ce que les urnes parlent, que ce soit le document de base qui est la carte d’électeur, l’implantation des bureaux de vote ou les conditions d’accès aux bureaux de vote, nous sommes en pleine saison des pluies. Il y a des zones praticables et d’autres impraticables. Que ce soit les populations déplacées ou les réfugiés, je pense que c’est d’égal partage pour tous les candidats d’autant plus qu’il fallait braver ces conditions et faire en sorte que le maximum d’électeurs puissent entrer en possession de leurs cartes. (…)

Mais on a vu le candidat Tiébilé Dramé se retirer de la course présidentielle parce que, dit-il, les conditions pour un bon déroulement du scrutin ne sont pas réunies.

Nous sommes des responsables politiques. Dire qu’aujourd’hui, la circonscription globale de Kidal n’est pas totalement sécurisée et que les gens n’ont pas accès à leurs cartes d’électeur est un faux-fuyant. On peut faire une autre lecture de la situation actuelle. Tout le monde sait qu’on est dans une situation anormale depuis le coup d’État du 22 mars. Donc rien n’est comparable au passé. Il faut faire un choix et dire : nous allons ensemble

construire ensemble.(…)

Sur quoi doit se baser le futur président de la République pour engager le chantier de la reconstruction de la légalité dont vous faites allusion ?

Le président de la République devra prendre des dispositions pour que d’une part, on aille très rapidement et dans les délais aux élections législatives, d’autre part entamer le dialogue inclusif politique et résoudre l’ensemble des causes de la guerre avec le MNLA. Mais il faudra prendre ne serait-ce que deux aspects pour s’attaquer à ça. Un, qu’il y ait un président de la République et un Parlement démocratiquement élus pour que le pays puisse marcher. Cette étape franchie, nous pouvons aborder les négociations avec tous ceux qui revendiquent, les groupes armés et non armés, reconstruire la citoyenneté, reconstruire l’armée et progressivement permettre de créer les conditions pour que la communauté internationale se retire, que nous arrivions à bâtir un pays dans la légalité constitutionnelle et un pays démocratique. (…)

La crise malienne est due en grande partie à la situation sociopolitique et économique décriée. Que faut-il apporter sur ce plan ?

Le défi, c’est de jouer véritablement la carte de la reconstruction de la citoyenneté et de la démocratie. Il faut amener tout le monde à prendre conscience qu’on a des devoirs vis-à-vis de la Nation comme la Nation doit préserver nos devoirs de citoyenneté. (…)

D’aucuns ont toujours décrié l’absence de l’État dans certaines parties du pays comme le Nord, par exemple.

Il y a deux administrations : l’administration communale et l’administration d’État, qui remplit les fonctions régaliennes, la défense et la sécurité et la justice. C’est cela qui relève de l’État. Donc quand tout cela n’est pas sur place, on dit que l’État n’est plus là. C’est vrai. Parce que les fonctions régaliennes ne sont pas remplies par les collectivités territoriales. (…)

Il y a 27 candidats en lice. Est-ce qu’il n’y en a pas trop ?

Vous savez que les conditions de se porter candidat au Mali, comme dans d’autres pays, obéissent à des règles. Si vous avez un parrainage en plus de 10 millions, vous êtes candidat. Mais ceci ne veut pas dire que vous avez une audience, une implantation nationale. Et c’est cela qui va se jouer. Ce sont les candidats qui ont une implantation nationale avérée, reconnue qui vont faire la différence. Et ils ne sont pas plus de cinq dans cette course qui ont une existence réelle en tant que telle. Les autres ont de l’argent, je les respecte beaucoup, mais, en fait, ils n’ont pas d’implantation. Même à Bamako ils n’ont aucune structure. Dans tous les pays du monde, ce sont les partis structurés qui font les élections. Ce ne sont pas les conférences radiophoniques qui font les élections mais plutôt les hommes et les femmes qui sont sur le terrain. (…)

Parmi ces candidats, il y a deux ou trois qui se détachent déjà du lot. Il s’agirait d’Ibrahima Boubacar Keïta, présenté comme le principal favori et Soumaïla Cissé. Pensez-vous que l’enjeu de ce scrutin va se jouer entre eux ?

Tout est ouvert dans la mesure où chacune de ces personnalités et même d’autres que vous n’avez pas citées, ont des implantations ou sont supposées en avoir. C’est nous qui sommes sur le terrain et qui observons la situation politique au Mali depuis 20 ans. On connaît le degré d’implantation de chacun de ces candidats. L’enjeu va se jouer entre ceux que vous avez nommés et ceux que vous n’avez pas nommés. L’importance c’est de savoir si ces candidats ont des structures, des comités, des connexions et des réseaux dans ce qu’on appelle le Mali profond. C’est une somme des ces facteurs qui permet à quelqu’un d’être élu. (…)

En cas de second tour, quel candidat comptez-vous soutenir ?

Mon parti soutiendra le candidat du Front démocratique républicain qui arrivera en tête.

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