Publié le 27 Mar 2023 - 21:29
DENRÉES ALIMENTAIRES

Entre hausse et pénurie

 

Sucre, œuf, loyer... Les ménages sont confrontés à un éternel recommencement, malgré les multiples annonces du gouvernement rarement suivies d’effets. Quand ce n’est pas des hausses tous azimuts, c’est tout simplement des pénuries qui viennent perturber les schémas des consommateurs.

 

C’est à grand renfort médiatique que le gouvernement avait annoncé au mois de novembre dernier un ensemble de mesures portant baisse des prix des denrées de première nécessité. Plus de quatre mois plus tard, cela reste presque sans incidence sur le panier de la ménagère.

Pour la plupart des produits concernés, c’est comme si le gouvernement n’avait jamais pris de dispositions. Sur le marché, les ménages n’ont de cesse de se plaindre face à la cherté du coût de la vie. Mais dans cette myriade de difficultés, c’est le sucre en poudre qui inquiète le plus, en ce moment. Il est devenu introuvable dans beaucoup de secteurs. Dans d’autres, son prix est tout simplement monté en flèche. ‘’Je l’ai acheté à 800 F au boutiquier du coin, alors qu’auparavant, c’était à 600 F le kilo. C’est vraiment exagéré’’, rouspète cette ménagère d’une trentaine d’années.

Chez les boutiquiers, on accuse l’État, les industriels et les intermédiaires d’être à l’origine de ces tensions ayant abouti à des hausses de ce produit très sollicité en ce mois de ramadan et bientôt de Pâques.

Président de l’Association des détaillants et boutiquiers, Omar Diallo n’a pas le sucre en produit depuis plusieurs semaines. Il proteste : ‘’Nous sommes entre le marteau et l’enclume. Quand tu achètes le sucre au prix du marché, il est impossible de le vendre au prix homologué par l’État (575 F). Alors, l’alternative est simple : soit tu décides d’acheter et de vendre à un prix supérieur pour t’en sortir, mais c’est à tes risques et périls. Soit tu renonces simplement à vendre au grand dam de tes clients.’’

Selon lui, ce n’est pas facile, parce que souvent, certains les accusent de faire de la rétention, alors qu’ils n’ont même pas les moyens de le faire. ‘’Les détaillants n’ont pas les capacités financières nécessaires pour acheter en quantité et garder un produit. Nous n’avons ni les moyens ni les possibilités de le faire’’, insiste-t-il, demandant aux uns et aux autres de se tourner vers les industriels et autres intermédiaires.

En fait, d’après les boutiquiers, actuellement, le sac s’échange entre 30 000 et 32 000 F sur le marché, soit entre 600 et 620 F le kilo. Sans compter les frais de transport et d’emballage. Ce qui fait qu’ils ne sauraient vendre au prix exigé par l’État. ‘’Comme vous le savez, quand un produit est rare, naturellement, il y a des hausses. C’est indépendant de notre volonté. Nous sommes victimes autant que les clients, car nous n’avons aucune maitrise sur le prix. Il faut que les gens le sachent’’, se défend ce boutiquier conscient de commettre une infraction en n’appliquant pas les prix homologués.

D’après lui, c’est parce qu’il n’a pas de choix. ‘’C’est mieux que de ne pouvoir en disposer pour mes clients. L’État doit le comprendre, parce qu’il sait à combien nous l’achetons. Les amendes sont injustes et exorbitantes. Quand on se fait prendre, on peut payer jusqu’à 50 000 F. Or, même si je vends plus de 20 sacs, je n’ai pas 50 000 F de bénéfices. Vous imaginez le risque que je prends juste pour satisfaire mes clients qui, eux, ont compris ? Les gens ne frappent que sur nous parce que nous sommes les plus faibles.’’

À côté du sucre, il y a aussi le prix des œufs qui ont explosé ces derniers jours. Introuvables à certains endroits, les œufs sont vendus au prix d’or aux boutiquiers qui ont du mal, là aussi, à respecter les directives gouvernementales. Omar Diallo : ‘’Moi, par exemple, j’ai acheté la tablette à 3 000 F, soit 100 F l’unité. Or, le prix fixé par l’État est de 100 francs. Je pense qu’il faut une application intelligente de la loi. L’objectif de l’État, c’est de protéger le client et de lui faciliter la vie, non le contraire. Si je n’achète pas le produit pour vendre à un prix raisonnable, le produit va se raréfier. Et les spéculateurs risquent de s’en emparer pour le vendre à des prix exorbitants. La loi, au lieu de protéger, expose dans ce cas le consommateur et ce n’est pas le but recherché, je crois.’’

Une homologation en questions

Malheureusement, regrette le président des commerçants détaillants, les contrôleurs ne veulent rien comprendre. ‘’Tu as beau leur présenter toutes tes factures, ils te disent carrément de ne pas vendre, s’il n’est pas possible de respecter les prix homologués. Je pense que ce n’est pas une communication responsable. Il faut plutôt trouver des solutions qui arrangent tout le monde et qui permettront de rendre le produit disponible’’, exhorte-t-il. Pour lui, l’homologation n’est pas toujours la meilleure solution, dans la mesure où la concurrence peut se charger toute seule de cette mission de réguler les prix.

‘’Par exemple, souligne-t-il, sur les produits comme la pomme de terre, l’oignon et l’huile, on est revenu aux réalités du marché. Et pourtant c’est vendu à des prix raisonnables. Quand le produit est disponible, personne n’a intérêt à vendre cher, parce que les gens vont te laisser et aller acheter chez le moins-disant. Le défi, c’est donc de rendre le produit accessible sur le marché’’.

Revenant sur le riz non parfumé homologué, il estime qu’il y a moins de problèmes, parce que ce n’est pas la denrée la plus sollicitée dans certains centres urbains comme Ouakam où il se trouve. Actuellement, les prix tournent autour de 325 (prix de l’État) et 350 F CFA.

Pendant ce temps, bailleurs et locataires continuent de se regarder en chiens de faïence, en ce qui concerne la baisse des prix du loyer.

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Un dépôt de la CSS à Dakar pour approvisionner directement les détaillants et grossistes

En ce qui concerne la pénurie de sucre, la grogne des détaillants ne semble pas tomber dans l’oreille d’un sourd. A en croire les services du ministère du Commerce, des solutions sont en passe d’être mises en place pour régler le problème de l’approvisionnement du marché. À partir de ce lundi, annonçait le chef du Service régional du Commerce Serigne Diaw, la Compagnie sucrière sénégalaise (CSS) va ouvrit un dépôt à Hann Bel-Air pour ne plus laisser les détaillants à la merci des grands commerçants.

‘’Nous avons essayé de regrouper ces détaillants pour qu’ils puissent acheter directement auprès de la CSS. Nous avons tenu deux réunions pour les aider à disposer du sucre, mais ils n’avaient pas les capacités financières requises. Dès lundi, la CSS va ouvrir un dépôt à Dakar pour approvisionner les détaillants et les demi-grossistes’’, souligne-t-il dans le journal ‘’Le Soleil’’, non sans rappeler que les capacités de l’entreprise ont été sensiblement augmentées.

*Reste à savoir si l’ouverture d’un dépôt à Dakar va permettre de résoudre toutes les difficultés.

MOR AMAR

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