Publié le 19 Sep 2020 - 18:28

Donald Trump à nouveau accusé d'agression sexuelle

 

Ancienne top model, Amy Dorris accuse le milliardaire de l'avoir agressée en septembre 1997 à New York. Les faits, prescrits, s'ajoutent à une très longue liste d'allégations visant l'actuel président américain.

 

Déjà bien fournie, la fiche Wikipédia consacrée aux accusations d’abus sexuels visant Donald Trump vient de s’enrichir d’une nouvelle victime. Amy Dorris, ancienne mannequin américaine de 48 ans, s’est confiée au quotidien The Guardian : elle accuse le milliardaire de l’avoir agressée sexuellement en septembre 1997 à New York.

Agée à l’époque de 24 ans, Amy Dorris, qui vit en Floride, passe quelques jours à New York en compagnie de son petit ami Jason Binn, fondateur de plusieurs magazines de mode et ami de Donald Trump. Le 5 septembre, après un crochet par la Trump Tower à Manhattan, le couple se rend, en compagnie du magnat de l’immobilier, à l’US Open de tennis, situé dans le quartier du Queens, où Trump dispose d’une loge VIP.

Au Guardian, Amy Dorris raconte s’être rendue aux toilettes, séparées de la loge par une cloison, pour ajuster ses lentilles de contact. A sa sortie, Trump l’attend à l’extérieur : «Initialement, j’ai cru qu’il attendait pour aller aux toilettes, mais ce n’était pas le cas, malheureusement.» Après un bref échange, poursuit-elle, le milliardaire se jette sur elle : «Il a fourré sa langue dans ma bouche et j’essayais de le repousser. Il a alors resserré son étreinte. Ses mains étaient très baladeuses, sur mes fesses, ma poitrine, mon dos, partout.» «Non, s’il vous plaît arrêtez», se souvient-elle d’avoir lancé à Trump, 51 ans à l’époque, mais «il s’en moquait».

«Un tourbillon»

Après l’agression présumée, Amy Dorris, «choquée», rejoint son ami et les autres invités. «J’essayais simplement de retourner parler à tout le monde et de passer un bon moment parce que, j’ignore pourquoi, j’ai senti la pression de me comporter comme ça.» Dans les jours qui suivent, elle revoit Donald Trump à plusieurs reprises, à la Trump Tower, de nouveau à l’US Open puis à une cérémonie en mémoire de Gianni Versace, assassiné quelques semaines plus tôt. Elle y croise plusieurs célébrités également invitées par le milliardaire, dont Lenny Kravitz, Puff Daddy et Leonardo DiCaprio. S’il ne l’agresse pas à nouveau, Trump, assure-t-elle, lui fait à plusieurs reprises des avances appuyées.

Pourquoi l’avoir revu dans les jours ayant suivi l’agression ? l’interroge le Guardian. «J’étais venue de Floride et j’étais avec Jason. Je n’avais pas d’argent, aucun endroit où aller. Nous allions d’événement en événement, c’était un tourbillon», répond-elle, expliquant avoir eu besoin de temps pour assimiler ce qui lui était arrivé.

Vingt-trois ans plus tard, Amy Dorris, mère de deux filles adolescentes, a décidé de parler publiquement. «Mes filles vont bientôt avoir 13 ans et je veux qu’elles sachent qu’on ne laisse personne nous faire quelque chose qu’on ne veut pas […]. Je veux qu’elles voient que je ne suis pas restée silencieuse, et que je me suis élevée contre quelqu’un qui a fait quelque chose d’inacceptable.» Dans l’Etat de New York, les faits décrits par Amy Dorris sont prescrits au bout de cinq ans.

Accusations «politiques»

Contactés par le quotidien britannique, les avocats de Donald Trump ont balayé les accusations de Amy Dorris et nié tout comportement inapproprié de la part du milliardaire. Selon le Guardian, la défense du Président a estimé que si les faits rapportés avaient vraiment eu lieu, «il y aurait eu de nombreux témoins», et que le timing des révélations, à un mois et demi de la présidentielle du 3 novembre, suggérait de possibles «motivations politiques».

Plusieurs éléments semblent toutefois contredire cette hypothèse. Amy Dorris s’est confiée pour la première fois au Guardian il y a près d’un an et demi. Surtout, juste après l’agression présumée, elle a raconté les faits à sa mère et à un ami new-yorkais, qui ont confirmé son récit au journal britannique.

Depuis les années 1970, Donald Trump a été accusé de viol, d’agression sexuelle ou de harcèlement par des dizaines de femmes. Parmi ces multiples allégations, deux seulement avaient été rendues publiques avant sa candidature à la Maison Blanche, notamment par sa première femme, Ivana Trump, qui l’accusa de viol lors de leur procédure de divorce en 1989, avant se rétracter.

Les autres victimes présumées se sont manifestées depuis 2016, en particulier après la diffusion, peu avant l’élection, d’une vidéo de l’émission Access Hollywood, à laquelle Trump avait participé en 2005. Dans une conversation vulgaire et misogyne, Trump se vantait d’embrasser les femmes «tout de suite», sans attendre un quelconque consentement. «Quand on est une star, elles nous laissent faire. On peut faire tout ce qu’on veut. Les attraper par la chatte. On peut faire tout ce qu’on veut.»

Fragilisé par la diffusion de ces propos obscènes, Trump avait présenté ses excuses mais exclu d’abandonner la course. Plusieurs accusations d’agression et de harcèlement sexuels avaient émergé. Mais quelques semaines plus tard, le magnat de l’immobilier remportait l’élection. Une victoire utilisée par sa garde rapprochée pour balayer les accusations, comme si les urnes avaient remplacé la justice : «Le peuple de ce pays, lors d’une élection décisive, a apporté son soutien au président Trump. Et nous avons le sentiment que ces allégations ont trouvé une réponse à travers ce processus [électoral]», déclarait ainsi sa porte-parole en décembre 2017.

Près de 70 accusatrices

Depuis, d’autres victimes présumées de Trump se sont fait connaître. Dont l’auteure E. Jean Carroll, éditorialiste renommée de la version américaine du magazine Elle, qui a accusé l’an dernier Donald Trump de l’avoir violée en 1995 ou 1996 dans la cabine d’essayage d’un magasin de luxe new-yorkais, ce qui celui-ci a fermement démenti. Aujourd’hui âgée de 76 ans, elle a porté plainte pour diffamation contre le Président, qui l’a traitée de «menteuse». La procédure est en cours.

Dans un livre sorti l’an dernier aux Etats-Unis, et traduit en juin en France (1), les journalistes d’investigation Barry Levine et Monique El-Faizy se sont intéressés au rapport aux femmes du «prédateur» Donald Trump, de son enfance à son ascension politique, en passant par sa carrière dans l’immobilier et la télévision. L’ouvrage a révélé une quarantaine de nouvelles allégations, portant à près de 70 le nombre de femmes accusant le président américain de harcèlement, agression sexuelle ou viol. En rompant le silence après plus de deux décennies, Amy Dorris vient de s’ajouter à la liste.

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