Alpha Condé promet de « libérer la Guinée » et appelle à l’unité nationale

En exil depuis sa chute en 2021, l’ancien président guinéen s’est exprimé ce 2 octobre à l’occasion de la fête nationale. Dans un discours empreint d’émotion et de gravité, Alpha Condé a dressé le bilan de sa gouvernance, dénoncé la dérive du régime militaire actuel et appelé ses compatriotes à l’unité pour restaurer la démocratie et la souveraineté nationale.
Un message d’espoir pour un pays meurtri
« À ceux qui ont perdu un proche, à ceux qui souffrent, à ceux qui observent depuis l’exil, je promets ceci : si Dieu le veut, avec la mobilisation de tous, nous allons libérer notre pays des mains de ce groupe de criminels », a lancé Alpha Condé. Dans une adresse solennelle, il a exhorté ses compatriotes à renouer avec l’esprit de 1958, lorsque la Guinée, sous la houlette d’Ahmed Sékou Touré, avait dit « non » à la colonisation. « Aujourd’hui, nous devons dire non à cette junte barbare, non aux kidnappings et oui à la démocratie », a-t-il insisté.
Pour l’ancien président, malgré les souffrances et les incertitudes, « la Guinée n’est pas vaincue » et son drapeau continuera de flotter comme « symbole de courage, de richesse et d’espérance ».
Revenant sur son bilan, Alpha Condé a tenu à rappeler le contexte dans lequel il avait accédé au pouvoir en 2011. En effet, a-t-il souligné, le pays était marqué par « des décennies d’instabilité, de corruption, de pauvreté et de fragilité institutionnelle ». Malgré tout, il est arrivé, à l’en croire, à réaliser de belles choses. Dans le secteur de l’énergie, a-t-il rappelé, les barrages de Kaléta et Souapiti ont été construits, et le projet d’Amaria lancé. Aussi, les interconnexions avec plusieurs pays de la sous-région ont-elles permis, selon lui, de tripler la capacité énergétique nationale.
En outre, des milliers de kilomètres de routes bitumées et plusieurs ponts pour désenclaver les régions et moderniser les villes de l’intérieur ont été réalisés. Dans le même registre s’inscrivent la distribution d’intrants agricoles, le soutien aux paysans et la réduction des importations alimentaires. Il a également rappelé la construction et la rénovation d’hôpitaux, de centres de santé, ainsi que d’écoles et d’universités, l’augmentation des salaires des enseignants.
Toujours dans son bilan, Alpha Condé a rappelé la relance du projet de fer de Simandou et les réformes dans la bauxite pour assurer plus de transparence et de valeur ajoutée locale. La mise en place de l’Anafic a permis de financer le développement local à travers les revenus miniers, avec plus de 799 infrastructures construites entre 2019 et 2020. Au plan de la diplomatie, il avait réussi à repositionner la Guinée sur la scène africaine et internationale, avec des partenariats jugés plus équilibrés. « Ces réalisations n’étaient qu’un début », a-t-il affirmé, estimant que son gouvernement avait jeté les bases d’un développement durable.
Reconnaissance des erreurs, mais cap sur un projet de société
Alpha Condé n’a toutefois pas nié l’existence de « manquements et d’erreurs » durant ses mandats. Il a dit s’apprêter, avant son renversement, à corriger ces insuffisances et à engager « un vaste programme de développement » soutenu par de nombreux partenaires internationaux. Il a aussi eu une pensée pour les victimes des manifestations politiques de son époque, adressant à nouveau ses condoléances et demandant « pardon au nom de l’État guinéen ».
Mais le 5 septembre 2021, rappelle-t-il, « ce chemin a été brisé ». Alpha Condé accuse les militaires putschistes d’avoir « pris en otage » le pays sous de fausses promesses de refondation. Depuis, selon lui, la Guinée vit « une situation dramatique » à cause d’une démocratie « enterrée », les institutions « confisquées », les droits humains « bafoués » à travers des arrestations et disparitions forcées, une justice « aux ordres », une corruption « sans précédent » aggravant pauvreté et chômage.
Il fustige également l’absence de nouveaux projets structurants, le détournement des grands chantiers lancés sous son mandat et « l’isolement diplomatique » de la Guinée. Malgré ce constat sévère, Alpha Condé affirme croire à un avenir meilleur pour son pays. « La Guinée appartient à son peuple », martèle-t-il, appelant à dépasser les divisions ethniques et partisanes. « Notre chemin vers la restauration de la légitimité passe par le rassemblement. L’unité est notre force », a-t-il insisté, assurant comprendre « la colère du peuple » mais préférant privilégier une voie démocratique et légale pour reconstruire le pays.
MAGUETTE NDAO