Publié le 10 Sep 2024 - 09:48

El Hadji Abdoul Aziz Sy et la consolidation des relations inter-confrérique au Sénégal

 

Le Dimanche matin du 14 Septembre 1997, El Hadji Abdoul Aziz Sy appelé affectueusement Mame Dabâkh a rendu l’âme à l’hôpital principal de Dakar. Son corps sera évacué à Tivaoune où il sera inhumé. Ses quarante ans de calife, de 1957 à 1997, est marqué par des prises de position en faveur de l’Islam et des intérêts de son pays.

L’une des plus grandes figures de l’histoire, le fils d’El Hadji Malick Sy et de Sophiétou Niang, a contribué davantage à une meilleure connaissance mutuelle des musulmans sénégalais. D’ailleurs, c’est cela qui faisait sa particularité, il s’était distingué pour son amour à l’égard de toutes les confréries mais aussi par son combat spirituel et social dans le cadre de leur consolidation.

El hadji Abdoul Aziz Sy fit d’abord ses études auprès de son père avant de les achever avec d’éminents Muqaddams tel que Serigne Hady Touré. Conscient du rôle qu’il pourra jouer dans l’avenir, ses professeurs l’ont inculqués les comportements d’un vrai soufi. Son amour pour le savoir lui a permis d’avoir une solide instruction dans toutes les disciplines islamiques lors de sa formation religieuse et intellectuelle.

Avant même son accession au Khalifat, Dabâkh œuvra inlassablement à côté de son frère Ababacar Sy a vulgarisé les principes de l’Islam et de la tidianiyya.

Nous pouvons retenir qu’El Hadji Abdou était un homme d’action. En effet, l’enseignement religieux qu’il exerçait ne lui a pas empêché d’être un agriculteur d’un renommé national.

Il voulait montrer aux disciples qu’à côté de la recherche du savoir, il fallait se mettre au travail.

Devenu Khalife à l’âge de 53 ans, ce fut l’occasion pour El Hadji Abdou de remplir son devoir de guide spirituel tout en appelant aux fils du pays à l’unité. Le petit fils d’Ousmane savait bien que, pour réussir sa mission, il devait briser les barrières existantes entre les confréries, il fallait un message qui s’adressait à tous au-delà des appartenances confrériques.

C’est la raison pour laquelle, il a prêché tout au long de son existence à l’amour et à la fraternité pour l’harmonie des cœurs. Ainsi, ses prêches et recommandations spirituelles ont fortement contribué à la cohésion sociale et la bonne cohabitation entre les confréries.

Soucieux, à la fois, du temporel et du spirituel, Dabâkh n’a oublié ni les chefs religieux, ni les acteurs politiques dans ses conseils. Il a tissé de bonnes relations avec les autres confréries en posant des actes forts allant dans le sens de la consolidation des relations inter-confrériques. En référence à ce que le tout Puissant dit dans le saint Coran : « les croyants sont certes des frères » , El Hadji Abdou rendait visite ses contemporains, rédigeait des poèmes de reconnaissance à leur égard, compatissait à leur douleurs et se concertait avec eux pour la cause de l’Islam. Notons que cela ne serait pas envisageable sans la modestie de l’homme.

Le Marabout adopta un langage de vérité en levant la voix quand il ne partageait pas certains points de vue. Il aborda les questions sociales sans réserve et critiqua les tares dont souffre la société. Son œuvre écrite pourra témoigner ces dires. En effet, ayant le pouvoir de manier l’arabe avec une grande maitrise, le cheikh transmettait de par sa plume des orientations qui appellent à la raison et à la responsabilité. Ses enseignements à travers ses écritures donnent beaucoup de solutions face aux problèmes dont nous confrontons dans la société.

Il me semble nécessaire que les disciples ont le devoir de consulter les ouvrages de leur maitre spirituel car les divergences dont nous sommes témoins sont en grande partie dues à une ignorance ou à une mauvaise compréhension des enseignements de nos chefs religieux.

Pour la bonne marche du pays, le fils de Maodo était indifférent face aux crises qui sévissaient sur le pays, il a toujours monté au créneau pour le bien-être social et la prospérité du peuple.

C’est ce qui nous pousse à dire que si nous voulons que la crise actuelle des valeurs, que subit la société sénégalaise soit résolue, il faut que l’on véhicule l’enseignement de nos marabouts sénégalais dans notre système éducatif.

Ainsi, nous pensons que dans le cadre d’une bonne cohésion entre les confréries, la vie et l’œuvre d’El Hadji Abdoul Aziz Sy constitue un excellent repère et un grand exemple pour tous les disciples de confréries confondues. Ces derniers convergent vers une même croyance car adorant un Dieu unique, le transcendant, donc leur unité est indispensable. Il a œuvré avec beaucoup de diplomatie durant toute son califat pour valoriser le modèle sénégalais du vivre ensemble.

                 Il ne serait pas inutile de souligner que le vœu de El Hadji Abdoul Sy de voir toute l’humanité ensemble et unies dépassait le cercle islamique. Il joua un grand rôle pour la bonne cohabitation entre les musulmans et les chrétiens. Même s’ils ne sont pas de la même religion, Dabâkh leur rendait visite et répondait à leur invitation. Citons par exemple l’Evêque Monseigneur à qui il envoyait des cadeaux. Cette relation cordiale avec la communauté chrétienne avait fini par créer une affection qui sera le fruit des actes d’une bonté inimaginable. En effet, on note des enfants chrétiens qui portent le nom d’El Hadji Abdoul Aziz Sy .

En définitive, nous le croyons profondément, si El hadji Abdoul Aziz Sy est toujours gravé dans les mémoires c’est en grande partie par ce combat qu’il a eu à porter pour rassembler l’humanité, notamment les confréries sénégalaises.  Agir comme un rassembleur demande de la patience, des sacrifices et de la pédagogie. Pour la satisfaction d’Allah, Le fils de Sophiètou a enduré. Il a lutté contre vent et marrés pour accomplir cette mission, consolider les relations inter-confrériques au Sénégal.

 

Pape Ousmane Gaye, prof d’Arabe au Lycée de Diawara (BAKEL)

Cet Article est tiré de mon mémoire de Master

( Ucad, département d’Arabe, 2020)

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