Pourquoi ça casse !

En 2000, un mariage sur trois se soldait par un divorce au Sénégal, selon une étude de l’Institut de recherche pour le développement (Ird). Les chiffres ont galopé entre-temps, même si les statistiques ne déterminent pas le nombre exact de divorces enregistrés. Dans la même étude, l’Ird fournissait quelques explications, en soulignant que dans 80% des cas, c'est la femme qui avait demandé le divorce.
‘’Dans bien des cas, elles assurent à elles seules les revenus du couple, tout en restant sous l'autorité de leur mari. De ce fait, nombreuses sont celles qui souhaitent se libérer de la tutelle de leur conjoint. Ainsi, plus de la moitié des femmes interrogées à Dakar comme à Saint-Louis ont rompu le lien conjugal pour défaut d'entretien de leur époux. Les deux autres causes majeures de divorce sont le manque d'amour et les problèmes avec la belle-famille.’’
Il ne suffit plus d’attendre plus d’une quinzaine d’années de vie commune, pour buter sur les écueils de la vie de couple. Désormais, après deux ou trois mois de mariage, des jeunes mariés découvrent la lune de fiel. Les masques tombent. Quels que soient l’âge et le statut social des deux partenaires, les regrets sont au tournant aussi bien chez les hommes que chez les femmes.
L'avis de Oustaz Alioune Sall
Interpellé sur la question, l’islamologue et célèbre animateur d’une émission religieuse sur la radio Sud Fm, Oustaz Alioune Sall ne manque d’inciter les hommes à un examen de conscience. ‘’Ils ignorent ce qu’est la vie de couple, de même que le sens des responsabilités d’un mari. Ils assimilent le mariage à une simple partie de plaisir. Ils ont en tête l’idée qu’une épouse ne doit leur procurer que du bonheur à l’état pur. Si jamais ils ne trouvent pas leur compte dans leur mariage, ils les délaissent pour une autre. Cet esprit est contraire à la religion, de même qu’à la morale’’, fait-il remarquer dans un bref entretien au téléphone.
Hommes divorcés
Malick Kane est un jeune cadre très à cheval sur la tradition et la religion. Il raconte son divorce : ''J’ai dû me séparer de mon épouse, après 13 ans de vie commune intenable. Elle était invivable. Elle ne cherchait aucunement à me faire plaisir. Elle n’en faisait qu’à sa tête. Pendant deux ans, on a partagé le même toit, sans s’adresser la parole. J’ai voulu la maintenir à la maison dans l’intérêt des enfants, mais je n’en pouvais plus….’’. Serigne Saliou Faye, la quarantaine, a connu deux mariages ratés. Il lui a fallu juste 6 mois de vie de couple pour se rendre compte de l'évidence : ‘’Mon mariage, dit-il, est une catastrophe. J’ai fait preuve de compréhension, en vain’’.
‘’Depuis notre mariage, ajoute-t-il, c’est la guerre. Entre jalousie, indiscipline, arrogance, irrespect, orgueil, suffisance, elle m’en a fait voir de toutes les couleurs. Mes proches me conseillaient la patience, mais j’étais déjà mort. Il y a des choses que je ne peux dire par pudeur. J’ai fait preuve de patience, d’endurance, pendant tout ce temps, mais il est difficile de savourer le bonheur de la vie de couple avec certaines femmes''. Selon lui, un problème de communication et le manque d'éducation à la vie conjugale sont fatals au mariage.
Mais comme d’autres hommes, il déplore que ‘’le mougne’’ ne soit plus de mise. Si un couple dure, c’est parce que la femme tolère, quoi qu’il advienne. Même si l’homme est infidèle, c’est à la femme de le remettre sur le droit chemin. Vous êtes les piliers de la société, si un mariage réussit, c’est parce que la femme tolère beaucoup’’, dit-il.
Matel BOCOUM