Publié le 15 Jan 2013 - 23:35
GUERRE AU MALI

 

 Repli stratégique ou débandade des groupes islamistes armés ?

 

 

Les groupes islamistes armés, ciblés depuis cinq jours par les raids aériens français, ont quitté les grandes villes du Nord-Mali. Pour certains experts, ce qui ressemble à une retraite précipitée serait en réalité un replis stratégique bien calculé.

 

Au cinquième jour de l'opération Serval, les différents groupes islamistes armés ont évacué les grandes villes du nord du Mali qu'ils contrôlaient depuis neuf mois. Selon plusieurs experts, ce départ s'apparente plus à un « repli stratégique » qu'à une débandade sous les tirs des avions français. Depuis le 11 janvier, date de la contre-offensive des forces françaises et maliennes à Konna, les islamistes radicaux d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), d'Ansar Eddine (Défenseurs de l'islam) et du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) ont quitté plusieurs grandes villes du Nord, notamment Gao et Tombouctou. La situation est plus incertaine à Kidal. Une partie des jihadistes seraient notamment repliés dans les régions montagneuses entourant la ville.

 

Lundi 14 janvier, au moment où leurs frères d'armes abandonnaient une partie de leurs bastions, une katiba d'Aqmi, dirigée par l'émir algérien Abou Zeid, prenait la localité de Diabali, dans l'ouest du pays, après de violents combats avec l'armée malienne. Dans la nuit de lundi à mardi, l'armée française a mené des bombardements pour tenter de les déloger. Au moins cinq islamistes auraient été tués mais la ville serait toujours tenue par les jihadistes. Idem pour Konna. D'abord annoncée reprise par l'armée malienne, la petite ville proche de Mopti serait finalement restée aux mains de ceux qui l'avaient prise.

 

Guérilla

 

Jean-Charles Brisard, expert en affaires de terrorisme, estime, dans une interview accordée à l'AFP, que le retrait de ces différents groupes armés n'est en réalité qu'un « repli stratégique » de leur part. Selon lui, ils profitent de « l'immensité du désert » du Nord-Mali qu'ils connaissent parfaitement. Les islamistes radicaux anticiperaient déjà le déploiement d'une force ouest-africaine au Mali. « Ils se dispersent pour rendre l'offensive africaine beaucoup plus difficile sur le terrain. Ils se disséminent pour nous entraîner dans une logique de guérilla. Ils peuvent prolonger le conflit indéfiniment », affirme-t-il.

 

Pour empêcher un repli des islamistes armés sur leur territoire, l'Algérie a fermé ses frontières avec le Mali et la Mauritanie a renforcé ses patrouilles dans les zones frontalières. Il reste cependant difficile de contrôler les milliers de kilomètres de frontières du Mali, d'autant plus que les islamistes se contentent pour l'instant d'évoluer par petits groupes très mobiles. « Les jihadistes comptent sur une guerre de longue haleine. Ils sont à l'aise dans cette situation : le grand désert, les reliefs difficiles, une situation sécuritaire précaire », analyse Alaya Allani, universitaire tunisien, spécialiste des mouvements islamistes. D'après lui, « ils feront un repli tactique pour reprendre leur souffle, mais ni l'armée malienne ni les Français ne peuvent les anéantir. » Outre la crainte d'attentats au Mali, dans la sous-région et en France, l'inquiétude est également à son paroxysme concernant le sort des sept otages français détenus par les groupes islamistes radicaux au Sahel.

 

Renforcement du contingent français

 

En visite à Dubaï, le président français François Hollande a affirmé que « la France n'avait pas vocation à rester au Mali ». Devant la presse, il a rappelé les trois objectifs de l'intervention française : « arrêter l'agression terroriste », « sécuriser Bamako » et permettre au Mali de préserver son « intégrité territoriale ». Outre les 800 militaires français déjà présents sur place, la France a annoncé mardi le déploiement à terme de 2 500 soldats au Mali. De leur côté, les chefs d'état-major ouest-africains se sont retrouvés à Bamako pour préparer la « libération » du Nord en formant une force internationale africaine. À Paris, le Premier ministre français Jean-Marc Ayrault a assuré devant l'Assemblée nationale que la France était « en première ligne » face aux groupes jihadistes et que les « forces africaines » se déploiraient « d'ici une semaine ».

 

La Cedeao doit former une force d'intervention de 3 300 soldats conformément à une résolution de l'ONU. Baptisée Misma (Force internationale de soutien au Mali), cette unité sera dirigée par un général nigérian, Shehu Abdulkadir. Le Nigeria doit fournir 900 hommes. Les premiers arriveront « dans les prochaines 24 heures », selon Abuja. Le Niger, le Burkina Faso, le Togo et le Sénégal ont également annoncé l'envoi d'environ 500 hommes, le Bénin 300, la Guinée et le Ghana une centaine chacun. Par ailleurs, lors d'une rencontre avec François Hollande à Abou Dhabi, le président mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz a affirmé que son pays était prêt venir en aide à l'armée malienne. Un peu plus tôt, l'Algérie avait déclaré qu'elle fermait sa frontière avec le Mali et qu'elle autorisait les avions français à survoler son espace aérien.

 

Jeuneafrique

 

 

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