Publié le 19 Oct 2013 - 01:25
PAR KAKATAR

Circulez, on digère !

 

L’émergence économique dont on parle risque de demeurer une formule creuse jetée dans la mare, au regard des actes que nous posons au quotidien au Sénégal et qui rament à contre-courant d'une réelle volonté de faire reculer la pauvreté. Comment comprendre qu’un pays, se voulant émergent, se permette à chaque lendemain de fête, des jours chômés et payés de fait ? Le péché ne frappe pas que l'administration, mais aussi le secteur privé, l'informel. Le virus de la paresse et de la jouissance sans effort est partout au Sénégal. Pour cette Tabaski-ci, les prolongations risquent d'aller jusqu'à la semaine prochaine. Encore faudrait-il être patient pour voir nos concitoyens prendre le bon rythme dans le courant de la semaine...prochaine. Eh oui, il faudra bien brûler la mauvaise graisse de la Tabaski, et cela prend du temps aussi. Ô temps qui n'a même pas commencé son envol, au Djoloff natal...

Le danger, c'est que ce virus du tranquille sommeil national est en train de se propager dangereusement dans la société toute entière. La culture de la paresse, c'est d'abord l'appât du gain facile. Tout le monde est endurant pour capter des sous sans transpirer. Il faut s'en mettre plein les poches, même si ce n'est pas le fruit de notre travail. Et ensuite digérer le tout, sans être dérangé. Cette culture de la facilité peut facilement se mesurer au lendemain même de baptêmes, de décès même à parenté très éloignée, de mariage d'une sœur ou frère, toutes les occasions sont bonnes pour prendre du repos et s'occuper de futilités. A coup sûr, tous ces comportements impactent sur notre productivité et notre capacité à nous positionner dans un monde où la compétition ne pardonne plus le laxisme, le ''somnambulisme'' et l'excès de ''sommeil''. Quel gâchis pour un pays qui regorge pourtant de potentialités humaines colossales !

Aujourd'hui – et c'est bien triste de le dire, ce sont les contre-valeurs d'argent gagné sans transpirer qui font recette. Combien de fois n'entend-on pas nos concitoyens déclamer que ''xaalis keen du ko ligeey...'' (ce n'est pas le travail qui rend riche...). Certains esprits tordus sont même allés jusqu'à soutenir que ''chance moo gën licence'' (mieux vaut compter sur la chance que d'avoir une licence d'étude). 0n ne poussera pas la critique jusqu'à soutenir que les Sénégalais sont naturellement paresseux et tricheurs avec le travail. Car, en vérité, ils ne le sont pas...par nature. Ce ne sont plus des ''manchots'' quand on les croise à l'étranger. Loin des frontières, ils ne se croisent plus les bras ; la preuve par mille que c'est l'environnement qui est pourri. Au contraire, ils sont bien loin de la moyenne africaine, en termes de capacité de travail et d'endurance. C'est sans doute la preuve que c'est sur l'environnement social qu'il faudrait travailler, en encourageant les valeurs de travail et d'endurance contre celles de la paresse et du repos forcé, jusqu'à la tombe.

Il faut enfin espérer que les pouvoirs publics prennent à bras le corps ce problème bien sérieux du rapport au travail, de l'éthique de la transpiration, pour casser la posture peu noble de la main tendue et construire une jeunesse. Cela demande sans doute beaucoup d'efforts, mais c'est bien là un combat qui mérite d'être mené pour le bien du Sénégal. Et pour cela, il ne faudrait pas seulement du côté de notre calendrier local riche en festivités de toutes sortes, mais aussi couper dans les fêtes chrétiennes qui sont également trop nombreuses, dans un pays constitué de 90% de musulmans. Il y a de quoi devenir...animiste.

 

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