Publié le 20 Jan 2016 - 11:49
PR SOULEYMANE MBOUP SUR LES HEPATITES VIRALES

‘’La vaccination a permis d'éviter plus de 800 000 nouvelles infections chroniques’’

 

Avec un traitement très coûteux et pas du tout accessible, les hépatites virales constituent de véritables problèmes de santé publique. La vaccination devrait permettre d’éviter de nouvelles infections.

 

Les hépatites B et C touchent un grand nombre d’individus dans le continent africain, et entraînent une morbidité et une mortalité très élevées. Pour trouver une solution à ces infections, le premier sommet africain sur les hépatites virales est organisé depuis hier à Dakar. Selon le Professeur Souleymane Mboup de l’hôpital Aristide Le Dantec, le Sénégal est l’exemple d'un pays d'Afrique de l'Ouest fortement endémique pour l’hépatite virale B (VHB), avec une prévalence approximative de 11% HB. ‘’Au Sénégal, la vaccination universelle des nourrissons a été intégrée dans le Programme élargi de vaccination (PEV), en 2004. Les taux de couverture élevés ont été atteints et la vaccination de la dose de naissance vient d'être introduite. Les données de modélisation préliminaires au Sénégal ont montré que d'énormes progrès ont déjà été réalisés avec la vaccination des nourrissons. Cela a permis d'éviter plus de 800 000 nouvelles infections chroniques du VHB, à ce jour’’.

Toutefois, selon le Professeur Mboup, sans une mise à l'échelle dans le traitement, il y aura une projection de 50 000 décès liés au VHB, au Sénégal, entre 2015-2030. ‘’Un programme global de santé publique pour l'hépatite B, avec la prévention, la prévention de la transmission mère-enfant, le dépistage et le traitement, pourrait éviter 20 000 décès en 2030, avec un retour sur investissement d'environ 2.5 CFA pour 1 CFA investi. Toutefois, le succès et la réalisation de ces objectifs dépendent de nombreux facteurs, y compris des réductions de prix des médicaments et des tests de laboratoire, le renforcement des capacités à la fois dans les services cliniques et virologiques.’’, a-t-il soutenu.

Environ 1 million de personnes meurent, chaque année, (~2,7 % de l’ensemble des décès) de causes liées à l’hépatite virale, le plus souvent de maladies du foie, dont le cancer hépatique. ‘’L’hépatite virale chronique est un problème mondial de santé publique grave mais sous-estimé. Son diagnostic et sa prise en charge restent complexes et beaucoup de pays n’ont pas les ressources humaines et l’infrastructure médicale nécessaires pour assurer les traitements.

Ces infections sont contractées le plus souvent au cours de l’enfance, ou à l’occasion des soins de santé et des pratiques traditionnelles et évoluent vers la chronicité, exposant les sujets à un risque de cirrhose et de carcinome hépatocellulaire’’, explique Prof Mboup. Ainsi, la forte prévalence du VIH sur le continent entraîne, selon le professeur, des coïnfections avec les virus des hépatites B (15 %) et C (7%). ‘’Il existe de nombreux vaccins très efficaces et peu coûteux contre le VHB. Certains pays d’Asie voient ainsi la prévalence du VHB  reculer, sous l’effet de vastes programmes de vaccination des enfants. Ce n’est malheureusement pas le cas en Afrique où stopper la transmission périnatale serait pourtant un objectif réaliste’’.

Le Pr Mboup de poursuivre que ‘’la mise à disposition récente d’une nouvelle génération d’antiviraux d’action directe constitue une révolution dans les traitements des personnes porteuses d’infection chronique par le virus de l’hépatite C’’.

Manque d’informations sur les hépatites

Actuellement, il n’existe pas de vaccin contre l’hépatite C, mais la recherche dans ce domaine se poursuit, a rassuré le Professeur Mboup. Pour Danjuma Adda de l’Alliance Mondiale contre l’hépatite, pendant que les autres pays mettent l’accent sur le traitement, en Afrique, on souffre du manque d’informations, de l’absence de dépistage et de diagnostic. ‘’Le principal défi, c’est le déficit d’informations sur l’hépatite. Malheureusement, à cause du faible niveau des informations, la majeure partie des cas sont diagnostiqués à des stades tardifs. Il y a aussi l’absence des estimations exactes, la couverture vaccinale est insuffisante. A cela s’ajoute l’inaccessibilité aux soins de qualité’’, dénonce-t-il. C’est pourquoi il invite les gouvernements à créer un environnement propice pour les populations. ‘’Ce sommet vient à son heure, parce qu’une stratégie mondiale sur le secteur de la santé, en matière d’hépatite, sera mise en œuvre au mois de mai de cette année. Donc, il faut une approche multisectorielle pour combattre les hépatites’’, dit-il.

VIVIANE DIATTA

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