L'UGB expose ses doléances à la tutelle
Le ministre de l’Enseignement supérieur, Abdourahmane Diouf, et son équipe étaient, vendredi dernier, à l'université Gaston Berger. Une visite qui entre dans le cadre de la tournée nationale de prise de contact avec les institutions relevant de son département. Une occasion que le ministre a saisie pour s'enquérir des doléances des différents acteurs et annoncer les décisions prises pour régler les problèmes de l'UGB.
Plus de dix tours d'horloge durant, le ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation et sa délégation ont visité les différents services et rencontré les acteurs de l'université Gaston Berger (UGB). Des moments qui lui ont permis de faire l'état des lieux et d'échanger directement avec les étudiants sur leurs difficultés.
Pour le ministre de l'Enseignement supérieur, ce fut une visite inclusive qui lui a permis de rencontrer tous les acteurs, sans exception, et d'aborder tous les problèmes de l'UGB sans tabou. “Il faut retenir qu'il y a trois gros problèmes notés au niveau de l'UGB. Il s'agit du budget, du manque de personnels administratifs, techniques, de services et d’enseignants-chercheurs. Il y a aussi le problème des chantiers à terminer pour que les étudiants soient dans de bonnes conditions de vie et d'études. Des difficultés qui sont également celles de la majeure partie des universités publiques du Sénégal. Le plus gros problème demeure le budget de fonctionnement, puisque toutes les universités en souffrent. Pour les budgets 2024, pratiquement toutes les universités n'ont reçu que pour neuf mois sur douze. Toutes fonctionnent au ralenti, parce que les budgets n'ont pas été donnés à la valeur attendue. Donc, le problème, ce n'est ni le recteur ni le directeur du Crous ou le ministre, mais c'est un problème structurel pour l'année 2024. Nous avons constaté que nous avons un besoin de 120 milliards F CFA pour régler les problèmes des universités d'ici la rentrée d'octobre 2024”, a-t-il reconnu.
Toutes les universités ont besoin d'un statut spécial
Le deuxième gros problème, ce sont les travaux des chantiers à l'UGB. “La plupart des chantiers, à savoir les chapiteaux, sont terminés ; il faut tout juste les réceptionner pour pouvoir y faire des cours magistraux. Ils peuvent accueillir jusqu'à plus de 1 500 étudiants. Pour les restaurants, les projets sont assez avancés et nous savons maintenant sur quel levier actionner pour augmenter le nombre de places. Tous les chantiers qu'on a vus ici sont exécutés à 80 %. Néanmoins, je vais retourner à Dakar et travailler avec les autres ministres concernés pour finaliser les chantiers le plus rapidement possible”, a rassuré M. Diouf.
La visite a été également une occasion pour les autorités universitaires d'interpeller leur tutelle sur le manque de personnel pour la bonne marche de l'institution, surtout au niveau académique. “Les collègues enseignants font des efforts surhumains pour tenir l'université, mais leur nombre est insuffisant. Raison pour laquelle nous avons décidé de recruter un certain nombre d'enseignants ; nous y travaillons. D'ailleurs, l’objectif de cette opération de coup de poing, c'est le recrutement de 1 500 enseignants pour la première année”, a signalé M. Diouf.
Pour les responsables des différentes structures estudiantines de l'UGB, leur université mérite un statut spécial pour faire face aux différents problèmes sociaux auxquels ils sont confrontés. “J'ai constaté avec vous les différents problèmes, mais je vous invite à fournir encore des efforts pour que l'UGB continue d'être une université d'excellence. Je suis conscient de vos problèmes, mais je suis impressionné par votre sérénité et votre civilité. Toutes les universités du Sénégal ont besoin de statut spécial parce que les problèmes sont les mêmes partout. L'UGB est une ville, c'est plus qu'une université et mérite de gros efforts. Quand je suis allé à Bambey, j'étais choqué par la situation. À mon avis, c'est l'université qui a le plus besoin d'investissements en infrastructures. Ce sont les mêmes constats que j’ai faits à Thiès, à Kaolack et à Ziguinchor. Ce qui prouve que c'est l'enseignement supérieur qui a besoin de statut spécial”, a répondu Abdourahmane Diouf.
L'avenir de l’enseignement supérieur, c'est le bimodal
Avant de rappeler que si l’on parvient à gérer les tensions d'ici la fin de la rentrée, l'université pourra se reposer, réfléchir et penser à son avenir. “On parle peu de l'avenir de l'université. On s’occupe plus de nos problèmes quotidiens. Alors que quand on est confiné dans ces histoires quotidiennes, on n'a plus la lucidité qui nous permet de nous projeter dans l'avenir et avoir des universités d’excellence. Il faut que nous autres dans notre gouvernement, qu'on règle d'abord les problèmes quotidiens, mais qu'on ait aussi une projection sur les 10, 20, 30 ans pour avoir une excellente université sénégalaise. C'est cela ma mission”, a-t-il révélé. Ajoutant qu'il n’a pas envie d'être un ministre sapeur-pompier qui ne sert qu'à éteindre des feux. “ Je veux être un ministre qui réfléchit. Nous sommes le ministère du savoir, nous sommes dans un milieu de réflexion, nous sommes dans un condensé de matière grise. Il ne faut pas qu’elle soit inhibée par les problèmes quotidiens que nous vivons. Ce sont des problèmes, mais il faut que nous apprenions à les surmonter pour donner au Sénégal une forme d'intelligence qui nous permet de rembourser les investissements qu'on a faits”, a invité le ministre.
Selon lui, pour amoindrir les difficultés, c'est le bimodal parce qu'on ne peut plus travailler à l'université en 2024 comme on le faisait dans les années 1990. “On peut continuer à construire des amphis, des résidences universitaires, mais il faut améliorer l'enseignement à distance ; c'est cela qui amoindrit les investissements et de les mettre dans le capital numérique pour obtenir un capital humain. Ce sont les réformes que nous voulons initier pour qu'il n'y ait pas de massification, pour que les universités puissent respirer et que les résultats soient meilleurs. Il ne doit pas avoir de discrimination entre les bacheliers sénégalais. Qui veut poursuivre ses études supérieures doit être aidé par l'État pour construire un Sénégal meilleur”, a soutenu Abdourahmane Diouf.
IBRAHIMA BOCAR SENE (SAINT-LOUIS)