Publié le 21 Mar 2016 - 17:49
VEILLE DU REFERENDUM A DAKAR

Le Dakar des jet-setteurs a bien vibré

 

Le Dakar qui ne dort pas, rien ne peut l’arrêter. A quelques heures du référendum, les jet-setteurs et noctambules étaient dans les rues de la capitale sénégalaise. Pourtant, beaucoup pensaient que les quartiers seraient calmes avec les violences qui ont émaillé la campagne référendaire ou que les jet-setteurs seraient juste découragés par un arrêté du préfet pour un couvre-feu. Que nenni ! Un tour dans les boîtes de nuit les plus prisées montrent bien que malgré le référendum, la fête continue.

 

En mini shorts, jupes et robes courtes, des filles de Dakar jalonnent le long des trottoirs de la route des Almadies. Il fait froid, trop froid, mais les tenues extravagantes et hyper sexy font que l’on se croirait en pleine été.  Il est 00h 30 minutes dans ce quartier de Dakar rebaptisé ‘’Las Vegas’’ par certains et connu pour sa forte affluence les samedis soirs. Les habitués des sorties nocturnes viennent en nombre. Devant le ‘’Patio’’, l’un des clubs les plus prisés de ce coin, les jeunes filles sont debout et forment des groupes de 4 à 5 personnes.  Jean Bleu déchiré assorti à un blaser ‘’so sexy’’ nombril en l’air, Aïda (nom d’emprunt) ne se sent pas bien non pas parce qu’il fait froid et qu’elle est très peu vêtue mais parce qu’elle ne va pas faire la fête comme prévu. 

‘’On ne nous a pas laissé entrer dans la boîte parce qu’on est toutes en Jean. Pourtant, nous avons nos cartes d’identité qui devraient être la seule chose exigée’’, lâche-t-elle sur un ton désespéré. Son désintéressement sur le projet de réforme de la Constitution, elle n’en cache rien. ‘’Pff, moi je ne m’intéresse pas à cela. D’ailleurs je n’ai même pas de carte d’électeur’’, dit-elle. Mais pour les autres, visages fâcheux, la réponse est non verbale mais reste identique quand même. A l’intérieur de la boîte, cette impression devient générale dans un cocktail de fumée de cigarettes et d’odeur d’alcool. Ceux dont les tenues ne posent pas problème y font leur show.

Au Blowwy Night Club, le constat est le même : les jeunes trouvés sur place bougent au rythme d’une musique assez endiablée. Ici, ce sont les étudiants de la Faculté de Médecine de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar qui y passent du bon temps. Loin du premier lot de jeunes rencontrés, eux ne dormiront que très peu ce samedi soir voire pas du tout, ayant en tête leur devoir citoyen. ‘’C’est dans le cadre de nos journées culturelles que ce bal masqué a été organisé. La commission culturelle est chargée d’organiser certaines activités pour réunir les différentes communautés de la Faculté de médecine. Notre devoir en tant que citoyen nous attend demain (hier dimanche). Donc on a toute la nuit pour nous divertir. Mais je voterai un grand NON pour des raisons qui me concernent’’, tente de préciser le président de la commission culturelle.  Bien loin du très animé quartier des Almadies, la Gueule Tapée avec le Penc Mi reçoit ce soir Kéba Seck. Habituellement, c’est son neveu Waly Ballago Seck qui y preste. Mais la salle n’en était pas moins bondée.

Les clubs refusent du monde

1h 45 minutes, au ‘’Madison Night club’’ rebaptisé depuis la semaine dernière ‘’Alizé’’ par son nouveau propriétaire, le Chanteur Assane Ndiaye. C’est le maître des lieux qui y officiait ce soir-là et la boîte était prise d’assaut par ses aficionados essentiellement composés de femmes. Avec une première partie animée par le jeune frère du leader du groupe ‘’Ngeweul gui’’, la soirée a été très rythmée. Ici aussi, on pense à la journée du 20 mars. ‘’Au Sénégal, quel que soit ce qui se passe en période de campagne électorale, ceux qui sortent la nuit le feront toujours. Beaucoup ne sont pas intéressés par ce vote’’, reste convaincu le jeune chanteur Moussa Ngom. A quelques mètres de l’Alizé, le Just 4U se dresse devant nous. La soirée y bat son plein. Après une première partie de Pape Birahim, le duo Pape et Cheikh a, par ses irrésistibles mélodies, offert une très belle scène à son fidèle public. 

Vers 2h 47 minutes, on est tenté par un retour aux Almadies. On se croirait en pleine journée. A cette heure avancée de la nuit, un embouteillage monstre sur l’axe Méridien-route de Ngor retarde les automobilistes. Les routes sont prises d’assaut. Le nombre de filles sur les trottoirs a nettement augmenté. Au milieu de ce monde fait de strass et de paillettes, l’on distingue des tenues ternes sur des gens qui ne devraient pas être là à cette heure.

En effet, des dames sillonnaient le long du bouchon pour, disent-elles, demander de quoi nourrir leurs familles. Aussi tard fût-il, elles mangeaient leurs sandwichs délicatement, discutant par-ci, jetant un regard par-là pour aborder les quelques personnes attentives à leur demande. Et à ce moment, cette route dont la circulation y était fluide à 00h est prise d’assaut par les jeunes Dakarois.  Et un des chargés de l’accueil au ‘’Duplexe’’ nous édifie sur le changement de situation. ‘’Nos clients viennent généralement à partir de 2h du matin. A cette heure-ci, ils viennent petit à petit mais la vraie soirée commence à 2h’’, informe-t-il. Avant cette heure, sur la route de l’aéroport, on y notait un calme plat. Pas un seul passant, encore moins de voitures qui bloquent la circulation.

Au restaurant Five, c’est une jeune fille au commerce facile et sourire aux lèvres qui nous accueille avec une pensée pour le référendum. ‘’Cela ne change en rien les plans des jet-setteurs puisque ceux qui ont l’habitude sortent toujours et rien ne peut les en empêcher. Ici, on ne note pas un grand changement. C’est peut-être ce qu’on essaye de faire croire aux gens mais il n’en est rien’’, assure-t-elle. C’est ainsi dire que la tension, quoique palpable à la fin de la campagne référendaire, ne semble concerner qu’une partie infime de la population dakaroise. Et le Dakar qui ne dort pas en est resté épargné. OUI ou NON, c’est selon. Et voilà qu’après tout, le débat est mis fin !

AMINATA FAYE

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