Publié le 10 Jan 2013 - 08:20
ÉMEUTES DE L’ÉLECTRICITÉ DU 27 JUIN 2011

Les cinq jeunes de Yeumbeul entrevoient la liberté, après 18 mois de prison

 

 

Après 18 mois passés en prison, les cinq jeunes de Yeumbeul arrêtés lors des émeutes de l'électricité du 27 juin 2011 pourraient recouvrer la liberté, le 22 janvier prochain. Si du moins, le tribunal correctionnel de Dakar suit le parquet qui a requis, hier, une peine de 2 ans dont 6 mois à l’encontre de 4 prévenus et la relaxe pour les 2 restants.

 

Mines tristes, visages éprouvés par les 18 mois de détention préventive, les cinq jeunes de Yeumbeul, interpellés lors des manifestations contre les coupures d’électricité du 27 juin 2011, scrutent les 14 prochains jours avec impatience. Car, ils pourraient tous recouvrer la liberté et le sourire qu’ils ont perdu depuis le 8 juillet 2011, date de leur inculpation pour les préventions de rassemblement illicite ayant causé des dommages à la propriété d’autrui, de destruction de biens appartenant à l’État, de violences et voies de fait sur des agents de la force publique dans l’exercice de leur fonction. Présentés comme des jeunes du M23, le substitut du procureur a vite fait de rectifier en soulignant que les prévenus sont des manifestants. Ce que ces derniers ont reconnu, puisqu’ils ont affiché leur étonnement lorsqu’ils ont été interpellés par rapport à leur appartenance au mouvement dirigé par Alioune Tine.

 

Toujours est-il que ces jeunes de Yeumbeul ont été arrêtés, suite aux émeutes relatives aux coupures d’électricité, survenues dans la nuit du 27 juin 2011 dans plusieurs localités du pays. Face à la récurrence des coupures d’électricité constatées à l’époque, les populations ne cessaient de manifester tous les jours. La manifestation du 27 juin a été la plus violente, car plusieurs actes de vandalisme avaient été commis sur des édifices privés et publics. C’est sur ces entrefaites que les prévenus ont été appréhendés à Yeumbeul dont la mairie et l’agence Senelec ont été saccagées.

 

Un seul prévenu a reconnu les faits

 

A la barre, Ousseynou Sylla, 26 ans (célibataire sans enfants) et Cie ont contesté les faits. Seul Youssoupha Cissé les a reconnus. Mais le frigoriste de 27 ans, condamné en 2003 à un mois de prison pour vol, s’est empressé d’ajouter qu’il n’a commis aucun acte de vandalisme. Il reconnaît avoir juste manifesté pour exprimer son ras-le-bol par rapport aux délestages qui l’empêchaient de travailler.

Khalifa Gaye, âgé de 29 ans et marié, a soutenu qu’il prenait de l’air devant sa maison au moment de son arrestation. ‘’J’ai subi une opération de la poitrine deux jours avant les manifestations. J’étais tranquillement assis devant ma maison et les policiers m’ont embarqué’’, s’est défendu le prévenu tout en précisant que les limiers n’ont rien voulu savoir lorsqu’il leur a présenté ses documents médicaux. Assane Diop, désigné comme le chef de gang et le principal instigateur des opérations, qui incitait les jeunes à la révolte populaire, à travers des jets de pierre et injures publiques, a clamé son innocence. ‘’Le jour des faits, j’étais dans mon atelier en train de travailler. Quand je rentrais vers 18 heures, j’ai croisé le chemin des policiers qui cherchaient les coupables. Ils m’ont arrêté en soutenant m’avoir reconnu à travers la caméra de surveillance’’, a déclaré, pour sa part, Abdoulaye Ndiaye, un charretier de 23 ans.

 

Quant à Ousseynou Sylla, arrêté avec un ordinateur portable appartenant à la mairie de Yeumbeul, il a indiqué avoir pris l’appareil des mains d’enfants et comptait le restituer. ‘’Je suis parti le restituer, mais l’ambiance n’était pas favorable. Le lendemain c’était un lundi et j’étais parti au magal de Kazu radjab. Je suis revenu le mercredi et je voulais attendre le lendemain, malheureusement la police est venue m’arrêter’’, a-t-il soutenu. Non convaincu par cet argument de défense, le parquet a requis, contre lui et Youssoupha Cissé, 2 ans dont 6 mois fermes. Avant de demander que Assane Diop, Khalifa Gaye et Abdoulaye Ndiaye soient renvoyés des fins de la poursuite.

 

Le parquet s’insurge contre l’absence des policiers-témoins

 

Pour la défense, leurs clients doivent tous être relaxés. ‘’Ils ont été arrêtés sur la base de simples dénonciations’’, a argué Me Mouhamadou Bamba Cissé. Avocat de Khalifa Gaye, Me Mouhamadou Moustapha Dieng a brandi les certificats médicaux de son client pour appuyer sa plaidoirie. Quant à Me Mame Adama Guèye, il a axé sa plaidoirie sur l’absence de preuves, mais surtout sur la longue détention préventive dont les prévenus ont fait l’objet. Une détention prolongée surtout par l'absence des trois policiers-témoins, qui n’ont jamais répondu à la convocation du tribunal. Même hier, les trois limiers étaient absents tout comme l’agent judiciaire de l’État. Une absence ayant causé de multiples renvois et dénoncée d’ailleurs par le représentant du parquet. Délibéré le 22 janvier prochain. Si le tribunal suit le parquet, Ousseynou Sylla, Youssoupha Cissé, Assane Diop, Abdoulaye Ndiaye et Khalifa Gaye auront passé 18 mois en prison pour rien…

 

FATOU SY

 

 

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