Publié le 8 Sep 2020 - 14:04
INONDATIONS AU SÉNÉGAL

Démission du gouvernement pour négligence

 

Le Sénégal renoue avec les inondations. Cette année, qui allait rentrer dans l’histoire, comme l’année la plus catastrophique avec tous les pays du monde affectés par la pandémie du coronavirus. À cela, vient s’ajouter les fortes pluies de toute une saison enregistrée en une journée. Il faut se rendre à l’évidence : les dirigeants n’ont pas assez pris ce problème au sérieux. Au Sénégal, la manière de gouverner se dégrade à une vitesse vertigineuse face à des dirigeants arrogants, qui ne demandent jamais pardon aux populations, mais qui trouvent toujours des excuses face à leur échec. N’est-il pas temps d’instaurer la culture de démission au Sénégal ?

 
Le Sénégal s’enfonce. On peut quand même éviter le désastre total. Les politiques que l’on propose aux mêmes problèmes depuis l’indépendance, sont-elles appropriées aux problèmes posés ? Je suis loin d’en être certain. L’accord est unanime sur un point essentiel : la manière de faire la politique au Sénégal, n’a pas apporté la stabilité et encore moins la solution aux problèmes des populations. Néanmoins, on ne peut pas qualifier cela de l’échec africain. L’héritage politique n’était nullement conçu en fonction des problèmes dont faisaient face nos populations. Il se fondait sur l’espoir hypothétique que la manière de régler les problèmes en Europe pourrait être reprise par les dirigeants africains au lendemain des indépendances.
 
Officiellement, tout le monde s’accorde sur le fait que l’éducation, la santé, et l’assainissement sont des priorités dans notre pays. Mais, nous constatons tous que leur mise en place reste une chose facile, pourtant impossible. On note des retards monumentaux. Et tandis qu’une classe politicienne profite visiblement de sa nouvelle richesse, la majeure partie de la population demeure dans la pauvreté. L’Etat a encore massivement démontré son incapacité à protéger ses populations. On devait exiger la démission de ce gouvernement qui a attendu que les populations meurent avant de faire appel aux secours.
 
On ne peut pas qualifier cela de hasard. Ce gouvernement a été rattrapé par son passé. Quand le président Sall a initié le Plan Sénégal Émergent (PSE), il a voulu se focaliser dans la construction d’infrastructures pour favoriser le développement économique. Hélas, mal conseillé et voulant faire mieux et plus grand que son prédécesseur, qui fut aussi son mentor, il a mal alloué les ressources mobilisées. Ces investissements improductifs sont les raisons principales du sous-investissement dans la santé, l’éducation et l’assainissement. On ne peut pas construire des infrastructures de dernière génération autour de bidonvilles. Un pays qui fait face à des problèmes d’autosuffisance alimentaire, d’éducation, d’accès à l’eau potable, aux soins médicaux et à l’assainissement, ne devrait pas investir des milliers de milliards dans des éléphants blancs.
 
La région de Diourbel est l’une des régions les plus mal assainies du pays, sans compter son retard sur le plan de l’éducation. Cette région, a-t-elle besoin d’une autoroute de 416 milliards de FCFA, alors que son assainissement est mal fait ? Pourquoi le président a préféré mettre cette somme sur une autoroute, qui pourrait un jour devenir utile, au lieu d’assainir la région ou de la doter d’assez de médecins ou d’hôpitaux de dernière génération ? On aurait également pu moderniser les hôpitaux déjà existants et équiper les hôpitaux départementaux. Aucune étude n’a été faite pour en connaître le retour sur investissement, car le président peine à avoir de bons résultats à Touba et il fallait que ce projet voie le jour.
 
D’un montant de plus de 750 milliards, le programme décennal de gestion des inondations (PDGI) a été mis en place en 2012, car avant son ascension au magistère suprême, l’actuel président a eu à gérer les problèmes d’inondations. En 2009, pendant que les dépenses somptuaires se multipliaient, plus de 30 000 maisons étaient détruites par les inondations, entraînant le déplacement de plus de 250 000 habitants. À cela s’ajoute une perte de 44,5 milliards FCFA à l’échelle nationale dont 35,5 milliards pour la région de Dakar. Conséquemment, le Plan ORSEC fut déclenché et cela a été un échec. Il a fallu l’appui budgétaire de la France pour un montant de 150 millions de dollars et celui de la Chine pour un montant de 100 millions de dollars sans négliger les dons financiers et matériels des Etats-Unis par le biais de l’USAID.
 
Après les fortes pluies du 26 août 2012, le bilan du plan ORSEC a fait état de 26 morts, 264 000 personnes sinistrées, le déplacement de 5 000 familles. Deux jours plus tard, le 28 août 2012, l’actuel président sénégalais, Macky Sall, dissout le Sénat et affecte les fonds destinés à son fonctionnement pour la lutte contre les inondations et le 19 septembre 2012, le président convoque un Conseil présidentiel sur les inondations. Il en fait une priorité et approuve le PDGI (2012-2022) pour un montant de 700 milliards de FCFA et engage le gouvernement à mettre en œuvre la phase urgente du PDGI (2013-2014) pour un montant de 66 milliards de FCFA. Huit ans plus tard, aucun des objectifs n’a été atteint. Ces dernières années, le Sénégal avait une mauvaise pluviométrie due à un dérèglement climatique et son gouvernement a préféré croiser les doigts pour que cela continue. Hélas, les choses ont changé et on fait face à la faillite collective du gouvernement.
 
Avec la pandémie qui a mis à genoux l’économie de la plupart des pays du monde, le Sénégal a fait face à des dépenses d’urgence non prévues et à cela s’ajoute les inondations. Le gouvernement, trouvera-t-il les ressources nécessaires pour faire face à un virus politisé dont on ne connaît pas la durée et venir au chevet des sinistrés ? Sachant qu’il est impossible de faire marche en arrière pour corriger les mauvais investissements du PSE, il devient impératif que la dette soit annulée pour permettre de nous endetter pour faire face à ces multiples problèmes urgents.
 
Gouverner, c’est prévoir ; et ne rien prévoir, c’est courir à sa perte. Emile de Girardin
 
Mohamed Dia

 

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