Pour une sécurité sociale plus juste au Sénégal

‘’Un travail temporaire ne devrait jamais signifier une vie temporaire’’
1. Un système sénégalais à bout de souffle
Au Sénégal, les travailleurs en CDD (Contrat à durée déterminée) ou en intérim reçoivent une indemnité de fin de contrat équivalente à 7 % de leur rémunération brute totale, en plus des congés payés. Bien que cette indemnité semble protectrice, elle présente plusieurs dysfonctionnements majeurs :
• Pénalisation des salariés :
• L’indemnité gonfle artificiellement la dernière fiche de paie, entraînant
des retenues sociales plus lourdes (CSS, IPRES, CFCE).
• Exemple concret : Un travailleur gagnant 200 000 F CFA/mois voit son dernier salaire augmenter à 214 000 F CFA (avec les 7 %), mais les cotisations sociales supplémentaires réduisent son net perçu.
• Charges patronales excessives :
• Les PME, qui recourent massivement à l’intérim pour rester flexibles, subissent des coûts imprévus en fin de contrat.
• Conséquence : Certaines entreprises préfèrent recruter dans l’informel, pour éviter ces charges.
• Aucune protection post-contrat :
• Une fois le contrat terminé, plus aucun revenu n’est versé, plongeant les travailleurs dans une précarité financière brutale.
→ Une réforme profonde est indispensable pour sécuriser les travailleurs sans étouffer les entreprises
2. Notre proposition : Une assurance chômage temporaire mutualisée
Nous proposons de remplacer l’indemnité de fin de contrat par une allocation chômage mensuelle, versée entre deux missions.
Comment cela fonctionnerait ?
• Montant : 50 % du salaire moyen des six derniers mois, plafonné à 150 000 F CFA/mois.
• Durée :
• 2 mois pour un contrat de moins d’un an.
• 4 mois pour 1 à 3 ans d’ancienneté.
• 6 mois pour plus de 3 ans.
• Financement :
• Une cotisation de 1 % prélevée sur les salaires bruts, mutualisée via la CSS ou une nouvelle Caisse d’Assurance Emploi.
• Exemple : Un salarié à 200 000 F CFA/mois cotiserait 2 000 F CFA/mois pour bénéficier de 100 000 F CFA/mois en cas de chômage.
• Conditions d’éligibilité :
• Avoir travaillé au moins 6 mois sur les 12 derniers.
• Être enregistré auprès de la CSS.
→ Un système simple, solidaire et durable
3. Les meilleures pratiques internationales
France : L’assurance chômage pour les intérimaires
• Conditions : 910 heures travaillées sur 24 mois (soit environ 6 mois à temps plein).
• Montant : 57 % du salaire brut moyen, pendant 6 à 24 mois.
• Exemple : Un intérimaire gagnant 1 500 €/mois touche 855 €/mois pendant 6 à 24 mois.
Danemark : Le modèle de ‘’flexisécurité’’
• Système unique : Licenciement facile pour les entreprises, mais indemnités chômage élevées (jusqu’à 90 % du salaire pendant 2 ans).
• Formation obligatoire pour les chômeurs
• Exemple : Un salarié perdant son emploi touche 2 500 €/mois (sur un salaire de 3 000 €) et suit des formations gratuites.
Canada : L’assurance-emploi pour les saisonniers
• Conditions : De 420 à 700 heures travaillées selon la région.
• Montant : 55 % du salaire, jusqu’à 60 semaines.
• Exemple : Un ouvrier agricole gagnant 3 000 $/mois reçoit 1 650 $/mois pendant l’hiver.
Suisse : Un modèle strict, mais efficace
• Conditions : 12 mois de cotisation sur 24.
• Montant : 70 à 80 % du salaire, jusqu’à 2 ans.
• Particularité : Les chômeurs doivent postuler activement, sous peine de sanctions.
4. Pourquoi cette réforme est cruciale pour le Sénégal ?
• Protéger les jeunes et les femmes
• 60 % des chômeurs sénégalais ont moins de 35 ans.
• Les femmes, souvent en CDD dans les industries ou la restauration, sont les plus vulnérables.
• Soutenir les PME
• Les charges sociales imprévues dissuadent l’embauche formelle.
• Une cotisation prévisible (1 %) serait plus gérable que les 7 % actuels.
• Réduire l’informel
• Aujourd’hui, 80 % des emplois sont non déclarés.
• Une assurance chômage attirerait les travailleurs vers le formel.
5. Fatou, 29 ans : Le parcours du combattant d’une intérimaire
Fatou, diplômée en logistique, enchaîne depuis trois ans des CDD de 6 mois dans une société pétrolière.
• Aujourd’hui :
• À chaque fin de contrat, plus aucun revenu.
• Elle survit grâce à sa famille ou des petits boulots informels.
• Trois mois d’attente en moyenne avant une nouvelle mission.
• Et si le Sénégal avait une assurance chômage ?
• Après 6 mois de travail, elle toucherait 100 000 F CFA/mois pendant 2 mois.
• Elle pourrait chercher un nouvel emploi sereinement, sans précarité.
« Je ne demande pas la charité, juste la dignité. Travailler dur devrait donner droit à une sécurité, même temporaire »
6. Conclusion : Bâtir un Sénégal où le travail protège
Le modèle actuel pénalise tout le monde :
• Les travailleurs, livrés à eux-mêmes après un CDD.
• Les entreprises, étouffées par des charges imprévues.
L’assurance chômage temporaire est la solution :
✔ Sécurise les parcours professionnels.
✔ Encourage l’embauche formelle.
✔ S’inspire de modèles qui fonctionnent.
Il est temps d’agir pour un Sénégal plus juste et plus productif.
Papa Abdoulaye Ndiaye
Gestionnaire de Paie & RH
ndiayepapaabdoulaye@outlook.com
77 262 21 28