Publié le 25 May 2022 - 19:43
MAUVAISE QUALITÉ EAU À MBACKÉ

Le Lanac épingle la Sen’Eau

 

Les doutes des habitants de la commune de Mbacké sur la qualité de l’eau qui leur est servie par la Sen’Eau sont fondés. L’eau est riche en chlorure et en sodium, selon le Laboratoire d’analyse et de contrôle (Lanac) qui a fait des analyses sur requête du tribunal. Cette eau augmente la tension artérielle, endommage le cœur et les reins, et ainsi provoque des maladies comme l’hypertension artérielle et l’AVC.

 

Les populations de la commune de Mbacké souffrent de la mauvaise qualité de l’eau qui leur est servie par la Sen’Eau. Dans la commune de Mbacké, en plus de cette qualité douteuse, les habitants souffrent le martyre pour accéder au liquide si vital et si précieux pour la vie. Cette insécurité hydrique dans la localité menace constamment la paix, la cohésion et la santé des populations.

Pour défendre leur dignité d’êtres humains et avoir un accès satisfaisant à l’eau, le collectif And Sopi Ndoxum Mbacké a vu le jour en juin 2019. Depuis lors, il a mené plusieurs initiatives citoyennes pour amener les autorités étatiques et la Sen’Eau à mettre fin à l’insécurité et à leur misère hydrique, en s’acquittant de leurs obligations contractuelles.  Pour faire respecter les droits des habitants, le collectif a saisi la justice.

C’est ainsi que le tribunal de grande instance de Diourbel a, par requête, saisi le Laboratoire national d’analyse et de contrôle (Lanac) du ministère du Commerce, de la Consommation et des Petites et moyennes entreprises pour faire une expertise sur la qualité de l’eau distribuée dans la commune de Mbacké par la Sen’Eau. 

Répondant à cette saisine, le directeur général du Laboratoire d’analyse et de contrôle, par correspondance en date du 17 mai 2022, écrit : ‘’Faisant suite à la réquisition du tribunal de grande instance hors classe de Diourbel relative à l’attestation de la conformité aux normes de l’OMS de l’eau potable de Sen’Eau distribuée aux populations de Mbacké, le Lanac a, le 28 avril 2022, analysé quatre échantillons d’eau dans les quartiers de Mbacké Khéwar, Mbacké Escale, Mbacké Pallène Est et Mbacké Pallène Centre. Les résultats de ces analyses ont, suivant les rapports d’analyse 719E/2022, 720E/2022, 721E/2022 et 722E/2022, révélé la présence élevée de chlorure et de sodium sur les quatre échantillons d’eau de la Sen’Eau. Ce qui atteste de la non-conformité de ces paramètres aux normes du Sénégal, de l’Union européenne (UE) et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)’’.

Par conséquent, le Lanac invite, ‘’au regard de ce qui précède et dans la perspective de soulager les populations de Mbacké, à entreprendre des actions urgentes de dessalement des eaux de Sen’Eau distribuées dans la localité’’. Car, prévient le laboratoire, ‘’les eaux très riches en chlorure et en sodium sont déconseillées aux personnes astreintes à un régime pauvre en sel et souffrantes d’hypertension artérielle et d’insuffisance rénale. La consommation de ces eaux favoriserait la rétention d’eau et accroîtrait la quantité de sang circulant dans les artères augmentant la tension artérielle. Cela a pour effet d’endommager le cœur et les reins, et ainsi provoquer des maladies comme l’hypertension artérielle, l’AVC, ainsi que l’insuffisance cardiaque et rénale. Ces eaux très riches en chlorure et en sodium seraient également responsables du cancer de la vessie, du risque de survenue de fausses couches, des maux de ventre et de douleurs d’estomac et du déséquilibre de la flore intestinale’’.

Une situation commune à la zone Centre

 D’ailleurs, en 2020, interpellé sur la mauvaise qualité de l’eau servie à la population de Mbacké, lors du comité régional de développement consacré aux projets de son département dans la région de Diourbel, le ministre Serigne Mbaye Thiam avait répondu que les mesures idoines allaient être prises pour le règlement de cette question. Il ajoutait que la situation n’était pas propre à la commune de Mbacké, mais à l’ensemble de la zone Centre. Il terminait en invitant les populations à payer les factures d’eau délivrées par la Sen’Eau.

À ce jour, les populations s’impatientent. Face à la presse, samedi dernier, docteur Moustapha Mbodj, Président de l’association And Soppi Ndoxu Mbacké, a demandé aux populations ‘’d’intensifier la lutte pour l’accès à une eau potable’’. Car, a-t-il ajouté, ‘’l'eau est non-potable et elle est source de beaucoup de maladies. Cela fait deux ans que la population demande une eau de qualité. Des décisions de justice sont venues nous donner raison et des analyses ont été faites par des laboratoires dont l'Institut Pasteur de Dakar, qui a confirmé que l'eau était impropre à la consommation. La Sen'Eau a proposé de mettre une usine de traitement. Ensuite, elle a dit qu'elle allait implanter des forages à 45 km de Mbacké. Mais jusque-là, nous attendons qu'elle respecte ses engagements. Mis à part l'électricité et l'eau de javel, l'entreprise ne consent aucune dépense. Par conséquent, nous ne lui devons rien. Au contraire, c'est elle qui devrait penser à indemniser les populations pour ce tort de plus de 20 ans causé à la population". 

Ainsi, le président d'And Sopi Ndoxu Mbacké souligne : ‘’La Sen’Eau joue du dilatoire, alors que le temps est son propre ennemi, à cause des pertes qu’elle subit.’’ Il fait remarquer que ‘’cette eau commercialisée par la Sen’Eau à Mbacké avait fait l’objet d’un procès au tribunal de grande instance de Diourbel, en 2020. La Sénégalaise des eaux avait été priée de résoudre ce problème, parce que les expertises faites par des laboratoires engagés montrent que le liquide précieux proposé aux foyers est loin de répondre aux normes de l'Organisation mondiale de la santé et qu'elle est impropre à la consommation. Dans son verdict, le tribunal de grande instance de Diourbel avait accédé à la requête de l’association And Soppi Ndoxu Mbacké, impliquant l’Institut Pasteur pour satisfaire à l'expertise, non sans lui demander de jauger la qualité de l'eau, au regard des normes internationales fixées pour attester de la potabilité d'une eau’’.

Il poursuit : ‘’Le tribunal avait aussi demandé à la société de payer aux dépens. Mieux, les résultats d’une étude faite en 2019 de la Cellule stratégique et de développement industriel de Mbacké, un organisme à but non lucratif qui regroupe les professeurs Babacar Faye et Cheikh Diop de la faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odontostomatologie de l’université Cheikh Anta Diop, Abdou Karim Fall de l’Irca et Mame Fatou Saër Mbacké  sur la qualité des eaux de robinet et la prévalence des maladies hydriques au niveau des quartiers Escale, Palène Centre, Palène Est, Eau de forage, ont montré que la quasi-totalité des paramètres physicochimiques ne sont pas conformes aux normes recommandées par l’OMS, surtout le taux de chlorure qui est ici particulièrement élevé’’.

BOUCAR ALIOU DIALLO (DIOURBEL)

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