Publié le 9 Sep 2020 - 21:04
PLAN D’URGENCE CONTRE LES INONDATIONS

Macky Sall casque 10 milliards de francs CFA

 

Après avoir convoqué, hier, une réunion de crise sur les inondations, au palais de la République, le chef de l’Etat a annoncé une aide financière directe de trois milliards de francs CFA aux sinistrés et sept autres pour les services publics de lutte contre les inondations. 

 

Le président de la République compte sortir le chéquier pour réconforter les sinistrés, victimes des pluies diluviennes qui se sont abattues durant le weekend au Sénégal. Pour accompagner les efforts des services publics dans leur plan d’aide d’urgence, Macky Sall a décidé de mettre en place un budget d’urgence de 10 milliards de francs CFA. Dans la matinée, il avait convoqué une réunion de crise au palais de la République, sur les dégâts causés par les fortes précipitions tombées sur tout le territoire national et qui ont occasionné la mort de 6 personnes.

‘’Les trois (milliards) serviront d’appui direct aux populations sinistrées, sur la base de rapports des gouverneurs, préfets et sous-préfets, en relation avec les maires. Ces trois milliards serviront d’appui financier direct par famille, mais aussi d’achat de produits phytosanitaires, de matelas et de vivres pour ceux qui ont perdu jusqu’à leurs rations mensuelles’’, a assuré le chef de l’Etat, lors d’une adresse à la nation. ‘’Les sept autres milliards, dit-il, serviront à accompagner les services des sapeurs-pompiers, de l’Onas pour l’évacuation des eaux de pluie’’.

Après avoir déclenché le plan Orsec samedi, le président de la République a aussi promis de se rendre dans la banlieue pour constater lui-même l’ampleur des dégâts, à l’image du ministre de l’Intérieur qui a déjà effectué des visites de terrain. A cet effet, Macky Sall se ‘’réjouit que les sapeurs-pompiers, l’Onas et les services de l’Etat soient déjà à pied d’œuvre. Nous allons mobiliser des ressources nouvelles pour que le travail soit fait. Dans les régions également, des dégâts ont été importants. Mais le dispositif est en place, car les 14 gouverneurs, les préfets, les sous-préfets, toute l’administration des sapeurs-pompiers, l’armée au besoin, tout le monde sera mobilisé pour venir à bout de ces eaux stagnantes ou ruisselantes qui ont fait beaucoup de dégâts’’.

Une guerre contre les inondations dans laquelle il demande à l’ensemble des ministres, les maires, présidents de conseils départementaux, responsables et cellules politiques d’être aux côtés des populations pour leur apporter soutien et réconfort

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‘’Face à ces fléaux mondiaux…’’      

Alors que le chef de l’Etat se satisfait de la réponse apportée par les services, le gouvernement a fait l’objet de vives critiques, avec de nouveaux épisodes d’inondations frappant le Sénégal. Un problème que Macky Sall se vantait même d’avoir résolu en quatre ans. Ce retour des inondations, selon lui, n’est que la conséquence des changements climatiques. Et, rappelle le président de la République, ‘’nous devons savoir que face à ces fléaux mondiaux, il y a deux maitres-mots : l’adaptation qui inclut un changement de comportement par l’arrêt de la construction sur des voies d’eau, et l’atténuation qui constitue les réponses que nous apportons’’. 

Les inondations constituent l’un des fléaux les plus graves au Sénégal. En 2009, elles avaient engendré un impact financier estimé à plus de 44 milliards de francs CFA dont 24 milliards de dommages et 20 milliards de pertes. Pour les dommages, les secteurs les plus touchés sont le logement, la santé, l’agriculture, l’éducation et le transport. Les pertes concernent principalement le commerce, les infrastructures urbaines, communautaires, le logement, l’énergie et le transport.

Après son arrivée au pouvoir en 2012, le président Macky Sall avait lancé un plan décennal de lutte contre les inondations pour un montant de 750 milliards de francs CFA. Son exécution et son efficacité ont été mises en doute, après les pluies enregistrées ce weekend. Mais, selon Macky Sall, n’eût été l’action d’infrastructures construites dans le cadre de ce plan, beaucoup plus de citoyens seraient dans une situation regrettable.

Dans le même sillage, il a ajouté que ‘’le gouvernement va présenter prochainement la situation du Plan décennal de lutte contre les inondations et surtout un nouveau schéma pour que des financements supplémentaires soient trouvés afin de boucler ce programme’’.

En Conseil des ministres, la semaine dernière, il avait demandé un rapport sur ce qui a été fait, dans le cadre de ce plan.  

TROIS QUESTIONS A BIRAHIME SECK, COORDONNATEUR DU FORUM CIVIL

‘’Les structures étatiques ont failli dans la gestion des inondations’’

Que pensez-vous de la sortie du président de la République Macky Sall sur les inondations ?

Dans un contexte qui a vu la mort de personnes, le président de la République devait choisir un cadre plus solennel pour s’adresser au peuple. Le peuple sénégalais mérite plus de respect et de considération que d’organiser des réunions ministérielles pour annoncer une évaluation. Nous attendons de l’Etat, c’est-à-dire les structures qui ont géré la question des inondations, mais également de l’Assemblée nationale qui a autorisé les montants injectés pour lutter contre les inondations, de nous donner une évaluation.

On ne doit pas attendre qu’il y ait mort d’homme dans des inondations pour organiser des séances d’évaluation. Le Plan décennal de lutte  contre les inondations concerne la période entre 2012 et 2020. Sur les huit ans déjà écoulés, où sont les rapports d’évaluation qui ont été produits par les différents organes de l’Etat en charge de la lutte contre les inondations ? C’est là où l’on constate la faillite de l’Etat dans la bonne gestion de cette question. Donc, nous attendons la publication des rapports d’évaluation, des montants alloués aux différentes structures et les entreprises qui ont effectué ces différents travaux.

Macky Sall a expliqué, en partie, ces inondations par les changements climatiques…

Les services météorologiques ont alerté sur les volumes d’eau que le Sénégal devait recevoir cet hivernage. Ils n’ont pas été écoutés par les autorités concernées. C’est pourquoi nous pensons qu’il serait assez léger d’invoquer les changements climatiques pour justifier le sinistre que vivent les populations. On ne peut pas désigner les Sénégalais comme les responsables de ces inondations, lorsqu’ils occupent des lieux non aedificandi. Les Parcelles-Assainies de Keur Massar ont été fournies par des structures de l’Etat comme la SN/HLM, avec des papiers légaux. La responsabilité de l’Etat est entièrement engagée.

Les 10 milliards promis par le président pourront-ils régler le problème ?

Nous avons l’impression que pour faire face aux difficultés des populations, le gouvernement ne pense qu’à la solution alimentaire. C’est un indicateur du degré de pauvreté dans lequel vit la majeure partie des Sénégalais. L’on ne peut pas tout le temps sortir le chéquier pour trouver des solutions durables.

Lamine Diouf

 

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