Déni de réalité !
Ce pouvoir est encore plus obtus qu'on pouvait le soupçonner ! A travers une «chronique quotidienne» sur les très graves événements survenus vendredi, samedi et dimanche, il démontre qu'il n'a par devers lui aucun ressort original capable d'expliquer avec crédibilité l'avalanche de morts, de blessés, de casses, qui s'abat sur le Sénégal. En cela, les accusations du porte-parole de la présidence sénégalaise sont un déni de réalité de la part d'un régime autiste. Et comme tout pouvoir qui croit être sur un fil de rasoir, il sombre dans la violence verbale primaire pour n'avoir pas à faire les choix douloureux qui éloignent de la catastrophe ambiante.
Or, la seule catastrophe constante à l'heure actuelle, c'est que des policiers aux ordres du ministère de l'Intérieur et du président de la République ont tiré des coups de feu et autres grenades lacrymogènes qui ont tué une dizaine de Sénégalais pourtant en phase avec leurs droits constitutionnels.
Regarder vers des candidats à la présidence de la République pour trouver les causes de cette explosion populaire est une caractéristique singulière d'un pouvoir en difficulté qui refuse de regarder la réalité en face hors le canevas de la répression. Le président Mohamed Ben Ali, imbu de sa toute-puissance alors que la terre tunisienne tremblait sous ses pieds, était intervenu à la télévision pour accuser Al-Qaïda d'être à l'origine du soulèvement populaire qui allait imploser son régime et le contraindre à fuir vers le Qatar. On sait ce qu'il est advenu de lui quarante-huit heures plus tard !
Ce que fait le porte-parole du Palais depuis soixante douze heures renvoie à l'opinion l'image d'un soldat préposé à faire de la diversion par rapport à trois facteurs qui empoisonnent la vie du régime : la candidature illégale du président Abdoulaye Wade, l'excès de pouvoir développé à propos des manifestations à la Place de l'indépendance, les tueries et tortures qu'exerce la police sur le peuple des citoyens-manifestants. Pris au piège de l'absurdité, le Palais se refuse à apporter de vraies réponses à ces vraies questions simplement parce que, de vraies réponses, il n'en a pas. Et au fond, c'est toute la structure gouvernementale qui s'affaisse, soutenu par un clan de ''communicateurs'' davantage préoccupés par des prébendes matérielles que par l'expression intégrale d'une démocratie qu'ils ont contribué à ensevelir dans notre pays depuis douze ans. Cet aveuglement n'est pas gratuit : son seul but reste l'accaparement continu du Pouvoir.
Cette stratégie qui consiste à accuser chaque jour un candidat à la présidentielle de comploter contre le pays est ridicule et lassante à la fin. Mais c'est fatalement ainsi : chaque régime de par le monde a ses hommes de mains.
Momar Dieng