Publié le 18 Jun 2019 - 19:23
RAPPORT ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTE

Pas de lien entre l’infection à Vih et les méthodes contraceptives

 

Une vaste étude clinique, menée dans quatre pays africains, a permis de constater qu’il n’existait pas de différence significative quant au risque d’infection par le Vih entre les utilisatrices de trois méthodes contraceptives (Dmpa-intramusculaire, implant à libération de lévonorgestrel et  Diu au cuivre).

 

Publiée hier dans ‘’The Lancet’’,  l’étude Echo menée par l’Organisation mondiale de la santé (Oms) dans quatre pays confrontés à des situations de forte incidence du Vih – l’Afrique du Sud, l’Eswatini, le Kenya et la Zambie - a montré  qu’il n’y a pas de lien entre l’infection à Vih et les méthodes contraceptives.

Il s’agit de trois méthodes dont, selon le rapport, chacune présentait un niveau élevé d’innocuité et d’efficacité dans la prévention de la grossesse.

C’est, d’abord, le Dmpa-intramusculaire (Dmpa-Im), contraceptif injectable réversible purement progestatif, administré tous les trois mois. Il y a aussi l’implant à libération de lévonorgestrel, implant purement progestatif inséré sous la peau au niveau du bras, pouvant être utilisé pendant cinq ans. Enfin, le Diu au cuivre, dispositif inséré dans l’utérus, pouvant être utilisé pendant 10 à 12 ans.

Selon l’Oms, chez les 7 829 femmes qui ont pris part à l’étude, elle a constaté 397 infections par le Vih. Il n’y a pas eu de différence statistique dans le taux d’acquisition du Vih, parmi ces femmes. Cent quarante-trois infections ont touché des femmes utilisant le Dmpa-Im, 138 des femmes utilisant le Diu au cuivre et 116 des femmes utilisant l’implant à libération de lévonorgestrel. Le taux d’infection par le Vih a été plus élevé chez les femmes de moins de 25 ans, quelle que soit la méthode de contraception utilisée.

Ce taux élevé d’infection par le Vih chez les femmes et en particulier les jeunes femmes, souligne le rapport, confirme la nécessité de renforcer l’intégration de la prévention du Vih dans les services de contraception comme dans les autres services de santé sexuelle et reproductive. Il peut notamment s’agir de services de dépistage du Vih et d’orientation vers la thérapie antirétrovirale pour les femmes positives pour le Vih, du dépistage chez le partenaire, de la promotion de l’utilisation du préservatif et de la prophylaxie préexposition (PrEp).

L’incidence élevée du Vih constatée est supérieure au seuil suggéré par l’Oms pour proposer la PrEp, qui devrait désormais être envisagée dans les pays où l’incidence du Vih est supérieure à 3 %, le cas échéant.

‘’Il est essentiel de disposer de services de grande qualité sans stigmatisation’’

D’après l’étude, actuellement, 214 millions de femmes des pays en développement veulent éviter une grossesse, mais n’utilisent pas une méthode moderne de contraception. Alors qu’il est essentiel de disposer de services de grande qualité et intégrés qui sont conçus en consultation avec les femmes, qui respectent les droits humains des femmes et des filles, protègent leur vie privée et sont prodigués sans stigmatisation, discrimination, violence, ni coercition.

‘’Indépendamment des données issues de l’étude Echo, le choix limité de contraceptifs dont disposent les femmes n’est pas satisfaisant. Nous espérons que ce résultat fera réagir et permettra de donner la priorité aux femmes. Les femmes veulent davantage de choix autres que le Dmpa’’, a soutenu Yvette Raphaël, membre du Groupe consultatif communautaire mondial pour l’étude Echo.

A son avis, il est indispensable d’étendre la gamme des moyens contraceptifs de qualité pour répondre aux besoins actuellement insatisfaits. Car, dit-elle, si les femmes disposent d’un large choix de méthodes contraceptives acceptables et efficaces, les filles et les femmes peuvent décider elles-mêmes d’avoir ou non des enfants, combien et à quel moment. ‘’Permettre aux femmes et aux filles de prendre des décisions éclairées est un principe fondamental, quand on fournit des informations sur la contraception ou des services de contraception. Les conclusions de l’étude vont dans le sens d’un accès régulier à toutes les méthodes ayant fait l’objet de l’étude pour toutes les femmes, y compris celles qui sont très exposées au risque d’infection à Vih’’, a déclaré le Dr James Kiarie du Département santé reproductive et recherche de l’Organisation mondiale de la santé.

L’étude a toutefois constaté que l’incidence de l’infection à Vih, parmi l’ensemble des femmes participantes, était élevée, de 3,8 % en moyenne par an. Ce qui indique que le Vih représente toujours un risque individuel important et un problème de santé publique pour de nombreuses femmes dans ces pays. C’est pourquoi ‘’l’étude met en lumière la nécessité de renforcer les efforts de prévention du Vih dans ces pays où la charge de morbidité est élevée, en particulier pour les jeunes femmes’’, a soutenu Rachel Baggaley du Département Vih et hépatite de l’Oms. Il convient, à son avis, de proposer un dépistage du Vih et divers moyens de prévention de l’infection à Vih, dans le cadre des programmes de services de contraception.

En effet, au cours des 25 dernières années, tandis que l’épidémie de Vih s’installait dans de nombreux pays, un certain nombre d’études observationnelles ont suggéré la possibilité d’un risque supérieur d’acquisition du Vih chez les utilisatrices de progestatifs seuls injectables, en particulier le Dmpa-Im.

Toutefois, du fait des limites inhérentes à la conception de ces études, il n’a pas été possible de déterminer si les infections par le Vih étaient dues au type de méthode contraceptive utilisée ou à d’autres facteurs. ‘’Après des décennies d’incertitudes, nous disposons finalement de données scientifiques solides sur le lien éventuel entre la contraception hormonale et le risque de Vih issues d’un essai clinique randomisé rigoureux’’, a déclaré la professeure Hélène Rees, Directrice exécutive du Wits Reproductive Health and Hiv Institute de l’université de Witwatersrand, à Johannesburg.

VIVIANE DIATTA

Section: