Publié le 28 Nov 2022 - 18:32
ROUTES ACCIDENTOGÈNES

Les inquiétudes des députés 

 

Les débats, lors du vote du budget du ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, ont été vampirisés par la lancinante question des accidents routiers et de l’état défectueux des routes.

 

Les routes tuent plus de 700 personnes par an, selon les chiffres officiels. Les spécialistes de la question soulignent que le chiffre réel est beaucoup plus alarmant, puisqu’il serait de 5 000, voire bien plus par an. Ils expliquent que les chiffres donnés ne concernent que ceux qui meurent sur le coup et passent sous silence ceux qui ne survivent pas à leurs graves blessures consécutives à ces accidents.

Lors du vote du budget du ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, le député Alioune Sall, entre autres, a posé la question au ministre. Selon lui, les routes sénégalaises sont les plus mortelles du continent, avec 700 morts par an, dont 97 % sont imputables à des défaillances humaines. En plus de sanctionner, il faut, dit-il, donner les véritables causes, puisque le Sénégal ne respecte pas les conventions routières internationales. ‘’L’obtention des permis est facile dans ce pays. Il y a une mauvaise volonté politique dans ce sens. Il y a aussi les permis à points qui ne régleront pas le problème. L’état catastrophique des routes du pays et un parc automobile vieux sont aussi des causes de ces accidents. Il y a des épaves qui circulent comme les ‘ndiaga ndiaye’. Les contrôles techniques confiés à Veritas, alors que nous avons des expertises locales’’, s’est offusqué le député.

Ndèye Satala Diop a, elle, parlé des surcharges dans les véhicules. Ce qui est une menace pour les clients. Elle demande que l’État prenne des mesures pour y mettre un terme. Sa collègue Mame Diarra Fam s’est, elle, offusquée du fait qu’il n’y ait que trois routes, à Pikine, depuis l’indépendance. ‘’C’est un impair qu’il urge de corriger. Ce département ne mérite pas cela. Pikine a choisi ses députés à l’Assemblée nationale parmi l’opposition, car le département n’est pas satisfait de vous. Donc, il faut régler cela. Nous n’avons que Tally Bou Bess, Tally Bou Mak et Tally Icotaf’’, a martelé la députée.

Dans le même ordre d’idées, Cheikh Aliou Bèye a souligné que Pikine, en termes d’infrastructures, n’est pas bien loti. Le TER, dit-il, a créé de l’insécurité et de l’insalubrité au niveau de la commune de Diameugueune-Sicap-Mbao qu’il dirige. Abdoulaye Diop de renchérir que cette partie de la banlieue dakaroise est un parent pauvre en termes d’infrastructures, pour une ville qui a été créée en 1952. Le député ajoute que les cars ‘’ndiaga ndiaye’’ et les ‘’cars rapides’’ ne doivent plus circuler, car ils font partie des causes d’accidents de la circulation.

GMS et les 18 autoponts à 137 milliards

Prenant la parole, Guy Marius Sagna s’est lui appesanti sur la question des 18 autoponts qui vont être construits. Le député souligne qu’ils ont été facturés à 137 milliards F CFA, alors qu’il y avait une autre offre qui avait été faite par une autre entreprise pour un montant de 52 milliards F CFA. Soit une différence de 85 milliards. Selon lui, cette entreprise a perdu ce marché au profit d’une entreprise étrangère, sans explication valable. ‘’C’est un crime, ce que vous êtes en train de faire au peuple sénégalais. Vous les poignardez dans le dos. Une différence de 85 milliards F CFA, c’est vraiment trop. C’est cela le vrai détournement. Ayez de la pitié pour ce peuple’’, a tonné M. Sagna. 

Lors de sa prise de parole, le président de la majorité parlementaire a semblé répondre à GMS. Il a souligné que si l’on chasse les entreprises étrangères du Sénégal, le secteur privé va perdre 10 % de son pouvoir. Ce qui représente, selon Me Oumar Youm, une perte de l’emploi de 50 %. Ce qui va constituer une catastrophe, selon lui. 

Par ailleurs, des députés ont plaidé pour le retour du chemin de fer, pour relier Dakar à l’intérieur du pays. Ils souhaitent aussi l’interdiction du transport des gros-porteurs la nuit.

Le ministre : ‘’Beaucoup des interventions ont une dose politico-politicienne’’

Répondant aux différentes interpellations des députés, le ministre Mansour Faye a assuré que les doléances des populations qui lui ont été transmises seront prises en charge, de concert avec les partenaires. ‘’Beaucoup des interventions ont une dose politico-politicienne. Ce qui est normal. Nous avons pris note et nous allons accompagner les endroits où se trouvent ces doléances et dans l’urgence. Parmi elles, il y en qui sont prises en charge à 50 %. J’ai effectué dernièrement l’état des travaux. Concernant les différents programmes qui sont en train d’être exécutés, tout est clair’’, a assuré le ministre.

Ensuite, il a répondu sur les autoponts. Une réponse qui laisse circonspect : ‘’Concernant les 18 autoponts, il ne faut pas qu’il y ait des amalgames. Tous les financements ont respecté les normes des instances de contrôle du pays. L’entreprise dont Guy parlait ne pouvait pas être sélectionnée, car elle avait promis de remplir une partie. Ce qui ne nous arrangeait pas. L’actuelle entreprise a accepté de tout prendre en charge. Ce qui explique pourquoi elle a été choisie. Nous n’avons rien à cacher, mais nous allons remplir notre mission comme il le faut‘’, a-t-il assuré.

S’agissant du réseau ferroviaire, le ministre s’est appesanti sur le dernier-né : ‘’Tout le monde sait que le TER est une réussite. Personne ne peut en douter. Je tenais juste à dire que c’est un projet qu’on va phaser, pour améliorer les conditions. Le Dakar - Bamako, les financements font état de 3 000 milliards pour avance de démarrage. Au niveau national, concernant le réseau, 100 wagons ont été réparés. La voix métrique sera réhabilitée et ce programme va démarrer en 2023. Les grands trains vont rouler, sous peu. Nous y travaillons, surtout le Petit train bleu qui va circuler entre Dakar - Thiès et Mékhé. Petit à petit, on verra.’’

Parlant du transport interurbain, Mansour Faye a déclaré que l’État va devoir subventionner Dakar Dem Dikk. Mais, ajoute-t-il, ‘’à terme, avec le BRT, le TER, la réorganisation du transport urbain, il y aura une amélioration de la mobilité du transport à Dakar’’.

Il a aussi répondu sur l’état du parc automobile et indiqué que sept autres centres techniques vont être installés à l’intérieur du pays. Ils seront opérationnels dans quelques mois, annonce-t-il. Avant d’embrayer sur les services de transport effectués par les véhicules ou engins dénommés ‘’Allo Taxi’’, ‘’Wat Gaïndé’’ ou ‘’Tiak Tiak’’. Il souligne qu’ils sont juridiquement illégaux et indique que les structures de son département sont en train de réfléchir sur la régulation de leurs activités, pour qu’ils puissent bénéficier d’agréments pour le transport. ‘’Il faut qu’on regarde comment les encadrer, car beaucoup de jeunes y travaillent’’, déclare Mansour Faye.

VOTE DU BUDGET DU MINISTÈRE DES INFRASTRUCTURES, DES TRANSPORTS TERRESTRES ET DU DÉSENCLAVEMENT

Une baisse de 19 456 000 000 F CFA sur les crédits de paiement notée

Les députés de l’Assemblée nationale ont voté, avant-hier, le budget du ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement qui s’élève à 925 078 513 903 F CFA. Une baisse de 19 456 000 000 F CFA sur les crédits de paiement a été notée cette année.

Le budget du ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, pour l’année 2023, qui est de l’ordre de 925 078 513 903 F CFA en autorisations d’engagement et 277 730 324 230 en crédits de paiement, a été voté avant-hier par les députés. Il s’articule autour de quatre programmes que sont : Développement, gestion et entretien des infrastructures routières ; Développement, gestion et entretien des réseaux ferroviaires ; Développement et modernisation des services de transport ; et Pilotage, gestion et coordination administrative.

Cette année, il est noté une baisse de 19 456 000 000 FCFA sur les crédits de paiement du ministère. La tutelle explique qu’elle découle du choix délibéré du gouvernement d'opérer une baisse de 165,6 milliards F CFA sur le budget général de 2023 des dépenses d'investissements pour les réorienter vers les dépenses liées au renforcement du capital humain, avec une revalorisation substantielle des salaires pour un montant de 236 milliards F CFA (soit une augmentation de 22,8 % de la masse salariale), et le renforcement du pouvoir d'achat des populations à travers deux mesures : une subvention de 450 milliards F CFA pour l'énergie et de 100 milliards F CFA pour les denrées de première nécessité.

S’agissant du budget 2023 du ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, Mansour Faye confie que les 925 milliards F CFA d'autorisations s'effectuent sur une période annuelle ou pluriannuelle, alors que le montant de 277,730 milliards F CFA de crédits de paiement constitue la limite des ressources servant à payer, en cours d'exercice, des dépenses certifiées conformes.

Il indique, en outre, que cinq projets majeurs d'infrastructures routières sont inscrits dans les perspectives en matière d'investissements du ministère, d'ici 2025. Il s'agit de la route Mbour - Fatick - Kaolack pour un montant de 405 milliards F CFA, de l'autoroute Dakar – Tivaouane - Saint-Louis pour 434 milliards F CFA, du Programme spécial de développement (PSD) pour 453 milliards F CFA, du prolongement de la VDN jusqu'à Diamniadio pour 92 milliards F CFA et du viaduc de Cambérène et la route des Niayes pour respectivement 50,8 F CFA et 58 milliards F CFA. Concernant ce dernier projet, l'accord de financement avec la Banque chinoise de développement (CDB) sera signé incessamment, informe-t-il.

Le PSD doté de 453 milliards F CFA pour 5 ans

Sur les travaux d’infrastructures routières en cours ou qui vont démarrer dans un proche avenir, Mansour Faye renseigne que bon nombre d’entre eux sont pris en charge à travers le Programme spécial de désenclavement (PSD) financé à hauteur de 453 milliards F CFA pour une durée de cinq ans. Mais, en attendant que le financement soit mis en place, dit-il, l’État a élaboré un montage financier et a pu lever, de concert avec des établissements bancaires, un financement de 86 milliards F CFA permettant ainsi de payer les avances de démarrage des travaux.

Ainsi, souligne le ministre, le montant de 96 milliards F CFA versé dans le compte de l’Ageroute entre dans ce cadre. Il précise aussi que le PSD n’intervient pas dans les zones où d’autres programmes sont en cours. Ils concernent, révèle Mansour Faye, le Programme de connectivité des zones agricoles (PCZA), dont le démarrage est prévu durant le premier semestre de l’année 2023, le Programme de désenclavement des zones agricoles et minières (PDZAM), l’autoroute Mbour - Fatick qui prévoit le contournement des autoroutes, réalisations de bretelles, entre autres. 

Quant à la gestion de Dakar Dem Dikk, le ministre a confirmé la situation déficitaire de cette entreprise qui fonctionne avec moins de 60 % de ses bus. Et pour sortir de cette crise, selon le ministre, le gouvernement a prévu un plan de restructuration et un programme de renouvellement de 1 400 bus avec l'acquisition, dans un premier temps, de 200 bus, avant la fin du premier trimestre 2023.

Un milliard de recette par mois pour le TER

Concernant les interpellations sur le TER par des députés de l’opposition, il a informé qu'environs 60 000 passagers sont transportés par jour et que les recettes collectées et déposées dans un compte séquestre s'élèvent à 9,6 milliards F CFA, à fin octobre 2022, soit près d'un milliard de recettes par mois. Il a, en outre, précisé que le TER est un service public déficitaire, car les prix appliqués sont sociaux et ne permettent pas de couvrir les charges d'exploitation. ‘’Sur les recettes et l'impact du TER sur l'endettement du pays, je précise que le coût du TER, dans sa première phase, s'élève à 780 milliards F CFA, dont 114 milliards pour les indemnisations des populations impactées’’, déclare le ministre.

CHEIKH THIAM

 

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