Publié le 22 Mar 2023 - 12:11
TRAFIC SEXUEL À KÉDOUGOU

Les chiffres de l’horreur

 

Il est démontré depuis longtemps qu’un trafic sexuel sévit dans les zones aurifères de Kédougou. Mais une étude récente de l'Initiative africaine de programmation et de recherche pour mettre fin à l’esclavage (Apries) du Centre de recherche et de sensibilisation sur la traite des êtres humains (CenHTRO) de l'université de Géorgie, démontre que près de 20 % des personnes se livrant au commerce du sexe dans les régions aurifères du Sénégal sont victimes de formes graves de trafic sexuel.

Ainsi, la ruée vers l'or comporte de considérables inconvénients. ‘’Les principaux entretiens menés dans le cadre de l'étude intitulée "Trafic sexuel sévère dans les régions d'extraction de l'or de Kédougou, Sénégal" décrivent ces communautés minières comme hyper masculines, avec des populations importantes de jeunes travailleurs masculins et des croyances qui associent le travail de l’or et la souillure. Suivant des croyances et attitudes locales, certains mineurs pensent que le fait de rendre visite à des individus engagés dans des activités sexuelles commerciales augmente leurs chances de découvrir de l'or’’, lit-on dans un communiqué.

Face à cette forte demande, ‘’des criminels font venir des femmes à Kédougou, contre de fausses promesses, pour les induire dans des situations de trafic sexuel grave, défini par le département d'État américain comme des actes sexuels commerciaux induits par la force, la fraude ou la coercition, ou dans lesquels la personne n'a pas atteint l'âge de 18 ans’’.

Ainsi, la majorité des victimes (68 %) viennent du Nigeria, selon le rapport. Treize pour cent des survivant(e)s viennent du Sénégal, 12 % du Mali et 8 % de pays d'Afrique de l'Ouest. ‘’Les survivant(e)s ont raconté qu'on leur avait fait de fausses promesses d'emplois bien rémunérés en dehors du Nigeria. Mais au lieu de cela, elles ont été emmenées au Sénégal, où elles ont déclaré avoir été forcées de se livrer au commerce du sexe pour payer les dettes de voyage et les frais de subsistance’’, révèle l’étude menée. 

"Nous avons identifié deux itinéraires qui sont utilisés pour transporter les filles. Étant donné qu'il y a environ six pays entre le Nigeria et le Sénégal, il est possible que les femmes ne soient pas seulement exploitées à leur destination au Sénégal, mais probablement tout au long du long voyage routier entre les deux pays", a déclaré le directeur du CenHTRO, David Okech, chercheur principal de l'étude. 

Entre entretiens qualitatifs et enquêtes quantitatives, les chercheurs ont tenté de mener leur étude. "Notre collecte de données quantitatives a impliqué des entretiens avec plus de 550 femmes engagées dans le commerce du sexe à Kédougou, que nous avons contactées par le biais d'un échantillonnage dirigé par les répondants", a déclaré Jody Clay-Warner, co-investigateur de l'étude et professeur de sociologie Meigs à l'UGA. "Cette approche nous a permis non seulement d'obtenir des informations détaillées sur le vécu et la situation  de ces femmes, mais aussi d'estimer le taux global de trafic sexuel dans cette population. Les données qualitatives provenant des membres de la communauté et des responsables locaux complètent les données quantitatives pour donner une image complète du problème de la traite sexuelle dans cette région".

 

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