Publié le 28 Jan 2014 - 22:54
CONCESSION DES SITES D’IMPLANTATION DE STATIONS SERVICES

L’autoroute à péage  « un territoire colonial ? »

 

En 2006, pour raisons d’utilité publique, les stations services Elton et Shell ont été démantelées parce que se situant sur la tracé de l’autoroute à péage. Ces entreprises, dans une démarche citoyenne, avaient accompagné les autorités de l’époque et, accepté le fait qui importait plus que le chiffre d’affaire à réaliser sur ces sites, estimé à des milliards de francs.

L’autoroute à péage Dakar-Diamniadio,  ouverte depuis le 1er Aout 2013 avec un tronçon de 25 Km, absorbe un trafic  journalier moyen de 15.000 véhicules. Elle constitue l’un des axes les plus attractifs du Retail Network permettant à elle seule de capturer les volumes les plus intéressants de la région de Dakar qui constituent plus de 70% du volume national.

Nous savons tous que la gestion de ladite autoroute est confiée au Groupe français Eiffage via sa filiale SENAC S.A., suivant un Partenariat Public Privé (PPP) quoique l’Etat sénégalais ait pu mobiliser plus de 193 milliards pour son financement sur un coût total  de 380,2 milliards (sources : Les Afriques du 01/08/2013).

Ces rappels sont déterminants dans la situation présente parce qu’ils éclairent sur les actes qui sont posés relativement à la concession  des sites de l’autoroute Dakar-Diamniadio et  expliquent les inquiétudes manifestées par les acteurs de la distribution des hydrocarbures.

En effet et contre attente, avons-nous appris que le Groupe Eiffage/SENAC aurait affecté 3 (trois) points de vente à la multinationale française TOTAL qui, par ce fait, aurait un monopole sur cet axe si attractif qu’est le péage. 

Nous ne dénions pas  à TOTAL  le droit d’ériger des stations sur l’autoroute, nous demandons seulement que de telles décisions résultent de procédures transparentes au vu des enjeux. Il ne saurait être question ici et maintenant que nous assistions,  impuissants,  à un retour d’ascenseur, un échange de bons procédés entre ces deux multinationales françaises quand on sait qu’Eiffage a réalisé  une plateforme pour  TOTAL  pour 312 millions d’euros dans le continent.

L’octroi des sites au groupe pétrolier français sans appels d’offre semble obéir à cette logique. Aussi et selon certaines sources, TOTAL serait actionnaire dans le Groupe Eiffage. Si c’est le cas, nous sommes là en présence d’un réel conflit d’intérêt.

Mieux, la cohérence voudrait que les sociétés dont les stations-services ont été démantelées pour la construction de l’autoroute à péage,  soient prioritaires dans la concession des sites une fois l’axe rouvert.

A notre niveau et de l’avis de tous les autres professionnels du sous-secteur de la distribution des hydrocarbures, aucun appel d’offres n’a été lancé invitant les uns et les autres à soumissionner pour l’édification de stations services sur l’autoroute à péage.

Dès lors, nous interpelons l’Etat du Sénégal, propriétaire des sites, régulateur du sous-secteur et garant du droit à la concurrence,  d’arrêter le processus d’affectation des sites à TOTAL et d’organiser les appels d’offre. Aussi et dans ce sens, invitons-nous l’Etat du Sénégal à veiller à ce  que les sociétés sénégalaises de distribution pétrolière à capacité certaine, puissent elles aussi s’implanter  sur l’axe pour une concurrence régulière.

Le Groupe Eiffage / SENAC est concessionnaire de l’autoroute à péage, c’est-à-dire de la voie bitumée et des dépendances, ce  qui lui octroie le droit d’y ériger des peines et soins. Son droit doit se limiter à cela.

Les terres restent une propriété de l’Etat du Sénégal et à ce titre, il doit avoir un droit de regard sur leur affectation.

L’autoroute à péage est une vitrine du Sénégal et à ce titre, doit être ouverte toutes les entreprises y compris celles détenues par des Sénégalais. Autrement ce serait un déni à l’expertise locale.

Au nom de la concurrence, il est impérieux que l’Etat arbitre le secteur et ne point garder un silence coupable qui favoriserait l’abus de position dominante d’une société filiale d’un groupe étranger et par conséquent, vouée à rapatrier ses bénéfices. Un tel état de fait est préjudiciable à toute économie.

Ameth GUISSE

Administrateur de Société

Email : amathguisse@yahoo.fr

 

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