Publié le 22 May 2012 - 11:02
BIENNALE DAK’ART EXPO IN

Dans le mystérieux univers de Joe Ouakam

 

17, rue Jules Ferry. L’adresse commence à être bien connue du public de la Biennale de l’art africain contemporain Dak’art. Elle est celle de l’atypique artiste Joe Ouakam. «Enquête» y a fait un tour et vous plonge dans l’univers d’un homme considéré comme «bizarre» ou «fou», mais qui en est si loin. Reportage.

 

On ne peut se perdre. Tout le monde à la rue Jules Ferry connaît la maison d’Issa Samb dit Joe Ouakam. Non pas parce que l’artiste possède une belle bâtisse, mais plutôt par la notoriété de l’homme en question. Le visiteur découvre un tout autre cadre dès qu’il dépasse le pas de la porte. Un grossier désordre l’accueille. Des bois rappelant des sculptures en perte d’éclat et de formes gisent un peu partout. Joe Ouakam ne cherche pas de logique dans la disposition des éléments. Ni à séduire son hôte. Cela ne l’intéresse pas. Pour lui, «la chose matérielle n’est pas importante», témoigne Aleth Lablanche, commissaire de cette exposition qui entre dans le cadre du «In» de la 20e édition de Dak’art.

 

La poussière, la salissure et le caractère désuet des objets formant son environnement confortent les propos du commissaire de l’exposition. Lesquels objets sont pour la plupart des habits sales, des morceaux de tissus, un amas de feuilles d’arbres, un tas de bois mort, des feuilles. En somme, tout et rien à la fois, dans une formidable mixture artistique. «Joe ne fait pas une sélection des objets qui doivent figurer ici. Ce sont des choses qui existent. Comme les feuilles d’arbre que vous voyez là ou des objets que lui apportent des gens qui viennent le voir», indique Mme Lablanche. La négligence dans l’entretien des objets s’explique, selon elle. Joe Ouakam a une forte envie de montrer que «l’Homme n’est que poussière» et qu’il n’est pas important de s’attacher aux valeurs matérielles.

 

 

''L’homme-poussière''

 

Dans ce décor qui peut donner des frissons ou un sentiment d’apaisement, c’est selon, se distingue un petit cimetière conçu par cet artiste doté d'une dimension spirituelle insoupçonnée. Des croix gisent un peu partout sur le sol. Leur entretien est également négligé. Comme pour dire qu’il y a certains morts qui sont oubliés. Ce qui fait penser à une double mort : celle de la personne en tant que telle, et celle d'une vie passée sur terre.

 

De l'autre côté de la grande cour, s’illustre, de par sa vieillesse, un tas de livres et de feuilles cloîtrés sur une bibliothèque poussiéreuse. Des documents qui semblent ne plus jamais devoir s'ouvrir au vu de leur état. Mais cette grisaille ne dérange pas l’artiste. C’est son monde, et il s’y identifie à merveille. Même si le tout semble éclectique et laisserait croire que Joe Ouakam a des similitudes avec Faust dans ce décor mystique.

 

Dans un autre registre, le visiteur peut trouver des explications dans les tableaux exposés par l’artiste. Les peintures exhibées trahissent un certain anticonformisme de l’homme. Il s’affranchit délibérément de certaines pesanteurs, préférant s’interroger sur la condition humaine. Une vision qui n’est pas forcément celle vécue par la masse de ses semblables.

 

BIGUÉ BOB

 

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