Publié le 14 Apr 2025 - 23:32
Santé au Sénégal

Un système à bout de souffle, des solutions à concrétiser

 

Accéder à des soins de santé de qualité reste un défi quotidien pour de nombreux Sénégalais, En 2023, près de 47 % des Sénégalais vivaient en milieu rural, selon l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). Un chiffre lourd de conséquences en matière de santé, tant l'accès aux soins y reste difficile. Entre pénurie de personnel, hôpitaux sous-équipés et maladies évitables encore trop présentes, le système de santé sénégalais montre ses limites. Pourtant, des pistes de solutions existent. À condition d’y mettre les moyens.

Les infrastructures de santé sont encore très inégalement réparties. 70 % des médecins exercent à Dakar, qui ne regroupe pourtant qu’un quart de la population nationale. Dans certaines zones reculées, un seul médecin peut être responsable de plus de 30 000 habitants, bien au-delà des normes recommandées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui fixe le ratio idéal à un médecin pour 10 000 habitants.

D’ailleurs, beaucoup de malades doivent parcourir de longues distances, parfois plusieurs heures à pied ou en charrette, pour atteindre un poste de santé, souvent mal équipé. Cette inaccessibilité géographique est l’un des principaux freins à la prise en charge précoce des maladies.

Dans des régions comme Kolda, Matam ou Tambacounda, se rendre à un poste de santé peut signifier marcher des kilomètres. "Nous n’avons qu’un seul poste de santé dans tout le village, et le médecin n’y vient qu’un jour sur deux", témoigne Aissatou, habitante de Vélingara.

En 2022, le Sénégal comptait environ 0,7 médecin pour 10 000 habitants, contre une moyenne de 1,5 en Afrique subsaharienne et plus de 30 dans les pays développés. Le manque de personnel touche aussi les infirmiers, les sage-femmes et les spécialistes.

Cette situation s’explique par un manque de formation, une mauvaise répartition géographique, mais aussi par le phénomène de "fuite des cerveaux" : de nombreux professionnels de santé formés au Sénégal choisissent de partir travailler à l’étranger, où les conditions sont plus avantageuses.

Malgré des progrès, le Sénégal continue de lutter contre des maladies qu’on aurait pu espérer maîtrisées. Le paludisme reste l'une des premières causes de consultation dans les structures de santé. En 2022, plus de 900 000 cas ont été enregistrés dans le pays.

La mortalité infantile est également préoccupante : 37 décès pour 1 000 naissances vivantes, selon l'UNICEF. Quant à la mortalité maternelle, elle s’élève à 236 décès pour 100 000 naissances, bien au-dessus des objectifs fixés par les Nations unies.

Ces chiffres traduisent des carences dans la prévention, l’accès à l’eau potable, l’assainissement et la sensibilisation des populations.

La Couverture Maladie Universelle (CMU), lancée en 2013, devait permettre à tous les Sénégalais, en particulier les plus démunis, d’accéder aux soins. Dix ans plus tard, seuls 47 % de la population sont effectivement couverts, selon les dernières données du ministère de la Santé.

D’ailleurs, l’accès universel et équitable aux soins est au cœur de la vision Sénégal 2050. Le programme prévoit la gratuité progressive des soins de santé de base pour les couches les plus vulnérables : enfants, femmes enceintes, personnes âgées et indigents. L’objectif est d’éliminer les barrières économiques à l’accès aux soins tout en renforçant les infrastructures sanitaires, en particulier dans les zones rurales, pour combler les inégalités territoriales criantes.

Beaucoup de familles continuent donc de payer leurs soins de manière informelle, avec un reste à charge estimé à plus de 60 %, l’un des plus élevés en Afrique de l’Ouest. Ce coût élevé pousse de nombreux malades à renoncer aux soins. Par ailleurs, la revalorisation des professionnels de la santé est essentielle. Le recrutement massif, la formation continue, l’amélioration des conditions de travail et la revalorisation salariale sont envisagés dans le programme de la vision Sénégal 2050 pour redonner confiance et dignité à ceux qui portent le système à bout de bras.

Aujourd’hui le droit à la santé pour tous reste encore un objectif à atteindre au Sénégal. Si des avancées notables ont été réalisées, elles restent fragiles face à la croissance démographique et aux inégalités persistantes. Pour relever ces défis, il faudra une volonté politique forte, des investissements durables, mais aussi l’engagement des communautés elles-mêmes. La santé ne peut plus attendre.

Moussa Ba

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