Publié le 25 Jan 2020 - 20:38
61è EDITION MAGAL DE GADE YELLE

A la découverte de Serigne Goumba Asta Amar

Cérémonie officielle du magal de Gade Yelle édition 2019

 

En ce jour marquant la célébration de la 61ème édition du Magal de Gade Yelle, EnQuête vous fait découvrir une des grandes figures de cette communauté des Darmankos, également appelés Darmankours. Fondateur de ce fief des Narou Kajoor, Serigne Goumba Asta Amar fut un disciple privilégié de Cheikh Ahmadou Bamba. 

 

Quand les gens courent derrière l’avoir, lui ne vivait que pour le Seigneur, le Savoir. En Cheikh Ahmadou Bamba, il avait une foi inébranlable. Né en 1850 sur les terres du Cayor, Serigne Goumba Asta Amar, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est le bâtisseur de l’emplacement actuel de Gade Yelle, un village situé au cœur du Cayor. C’était en 1920, sur instruction de Cheikh Ahmadou Bamba à la suite d’une sollicitation de prière. Une tâche loin d’être aisée à l’époque. En effet, une méchante épidémie de peste commençait à faire des ravages dans le patelin comme dans beaucoup d’autres localités du Sénégal. Face à l’inquiétude grandissante, le notable, disciple de Bamba, va rencontrer son marabout pour solliciter des prières.

Ce dernier lui recommande alors de faire déménager les habitations, de l’est vers l’ouest. ‘’Les dignitaires étaient réticents. Certains croyaient qu’il le disait juste pour faire main basse sur les terres. Après son installation, Serigne Touba lui envoie son petit frère, Mame Cheikh Anta, qui lui remit du sable à verser sur les nouvelles terres. Il lui conseilla également de construire une mosquée’’, rapporte le khalife de Gade Yelle, Serigne Mourtada Amar. Dès lors, il pouvait foncer et donner corps à la recommandation de son guide. Quelque temps après, tout le village le suivit. Sauf le chef qui, par fierté, n’a pas voulu rallier. Il a fallu que Serigne Goumba profite de son absence pour aller récupérer ses affaires pour les installer dans les nouvelles habitations. Bien avant même cet épisode, d’autres dignitaires de la famille avaient quitté Gade Yelle pour fonder leurs propres villages. Il en est ainsi de Mame Ma goumba Bator Amar qui s’est établi à Ngandeck Dakhar ; Mame Medina Amar qui a créé Ndiiné…

Mais, l’histoire entre Serigne Touba et Mame Goumba remonte à bien plus longtemps. La première fois, ils s’étaient rencontrés au cœur du Cayor. Le Cheikh, qui venait de fonder le mouridisme, était en tournée pour son implantation. L’enfant de Gade Yelle, lui, était dans le coin pour apprendre le tafsir (traduction du Coran), auprès de Serigne GorMak Diaw. Atteint de conjonctivite, il se réfugie à Namène, où il avait des proches. Un mal pour un bien. Celui-ci était, en effet, loin de se douter que cette vilaine infection le mettrait sur le chemin de l’homme du 18 Safar. ‘’Etranger au terroir,  Serigne Touba était à la recherche d'un endroit où se reposer. Il fut ainsi dirigé vers un grand arbre, où était assis Mame Goumba.  A la vue du saint homme, ce dernier se leva, lui teint son cheval et l’accueillit avec tous les honneurs’’. Le marabout lui demanda alors ses origines et lui recommanda de nettoyer la chambre « NANEMA BARRISAL NAIKBI TAI WOUTI SSOUFFOU DIAKA SOTTISSI », avant de lui fournir des prières pour ses yeux. En même temps, il lui donna le secret du ‘’ Allahou nourousamawatiwalardi’’.

Après cette première rencontre fortuite, les deux hommes se sont séparés, avant de se retrouver bien plus tard, à Mbacké Kajoor. Cette fois, la rencontre a été bien voulue et provoquée. Comme un signe du destin, ses yeux étaient redevenus tout rouges. Mais contrairement à la première rencontre avec le fondateur du mouridisme, cette fois, il ne ressent pas de douleur particulière. Le plus curieux, disait Mame Goumba Asta, c’est que ses yeux étaient aussi froids que rouges. ‘’J’ai l’impression qu’ils ont juste la nostalgie de ce saint homme que j’avais rencontré, quand j’étais à l’école coranique’’, renchérissait-il. Ainsi avait-il rallié Mbacké Kajoor pour faire acte d’allégeance.

Depuis, il s’est noué, entre eux, une relation presque fusionnelle, qui avait fini par marquer ses congénères. Un jour, les populations, qui lui faisaient entièrement confiance, lui confiant même leurs biens, sont venus tout récupérer, pensant qu’il serait capable de l’offrir à son marabout’’. A l’origine de leur méfiance, Serigne Goumba venait de faire cadeau à son maitre d’un très beau cheval, de race ‘’naarougoor’’, avant de rentrer à pied, du Djolof à Gade Yelle. C’est d’ailleurs au cours de cette visite que son guide l’a mis en relation avec Serigne Massyla Faty Khary. Comme par coïncidence les termes sonnent bien : Massyla Faty Khary ; Goumba Asta Makhary. Il leur avait ainsi instruit, qu’en cas de décès de l’un, c’est l’autre qui doit effectuer la prière mortuaire.

Aujourd’hui, s’il y a des leçons à retenir de sa vie, c’est bien son amour pour le Coran et les khassaides. Quand il a senti que son heure de quitter ce bas monde était arrivé, il avait appelé toute sa descendance pour apprécier leur niveau. Après les avoir évalués, il les a tous confiés à Serigne Mor Farouma AMAR, son fils ainé. Il fit également appeler son chanteur préféré, Mademba Lam Mbaye pour lui psalmodier  le ‘’jaalibatoul marakhite’’. Avant même la fin de cette récitation, arrivée à hauteur de « Yarabana Bachir Khalilikale Khabibie » il rendit l’âme. Comme s’il avait senti que son binôme s’apprêtait à disparaitre, Serigne Massyla Faty Khary se pointa à bord de son cheval. Il dit : ‘’Konmane la bant bi dale’’. A la disparition de Mame Goumba en 1925, à l’âge de 75 ans, Serigne Mor Farouma Amar prit la relève. 

MOR AMAR

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