Publié le 18 Jul 2012 - 13:39
ANALYSE POLITIQUE

‘’Le Quinquennat des malentendus’’

 

 

Cent jours. Déjà ! La période de vacance que nous nous étions imposée, le temps que le nouveau régime trouve ses repères et marque son territoire politique, est passé tellement vite ! L’échéance psychologique des Législatives est, à présent, derrière nous et nous allons pouvoir, mettre en perspective les premiers balbutiements de l’An I du régime de Macky Sall… L’essentiel des pouvoirs sont en place ! L’Exécutif et le Législatif ont reçus l’onction sacrée de la volonté populaire alors que le Judiciaire s’en donne à cœur joie, au travers d’audits tous azimuts, pour (se) donner l’illusion d’une Justice indépendante du sempiternel cordon ombilical du Parquet…

 

Premier malentendu de ce quinquennat s’il en est : les Audits !

Débusquer les pilleurs de la République est une supplique perceptible chez tous les Sénégalais affamés de Justice et de Méritocratie. Ils veulent que, plus jamais, personne ne s’accapare le Bien Commun au profit de politiciens prébendiers roulant carrosses de marque allemande et propriétaires de multiples logis au luxe tropézien !

 

Les Sénégalais veulent aussi manger plus et mieux, se soigner et éduquer leurs enfants en toute dignité. Les hommes et femmes du ‘’Pays de la Téranga’’ tiennent surtout à voir se remettre en branle l’’’ascenseur social’’ qui permettait, par le biais de l’Ecole de la République, aux plus méritants d’entre nous, d’accéder aux délices et servitudes de l’aristocratie républicaine ! C’est surtout pour cela qu’ils ont changé de président de la République…

 

Que Youssou Ndour et Mimi Touré se le rappellent ! Leur détestation de Karim Wade ou de tel autre ponte du régime libéral sortant ne nous intéresse guère ! Car elle n’est porteuse d’aucune valeur ajoutée intellectuelle, économique ou même financière au profit du mieux-être de notre peuple. Les ministres de la République qu’ils sont, ne peuvent et ne doivent donner à croire que la Justice de ce pays pourrait s’appuyer sur autre chose que l’auguste rigueur de la Loi. Qu’il y aurait, dans l’athée religion du Temple de Thémis, d’autres cantiques que les dogmes sacrés de la présomption d’innocence, de l’instruction à charge et à décharge et de la juste peine !

 

Autre malentendu et non des moindres ! Macky Sall est-il le président le mieux élu de l’Histoire de la République ou Abdoulaye WADE a-t-il fait l’objet d’un plébiscite populaire, sans nul autre pareil, dans le rejet des outrances et de l’arrogante gabegie de son régime ? Nul ne pourra jamais y répondre. Je serais, pourtant, porté à adhérer à la seconde hypothèse !

 

Si Macky veut réussir, nous le lui souhaitons, qu’il fasse le pari pascalien de croire cela ! Il sera, quels que soient les dés du jeu politique, le principal gagnant de cette séquence capitale de l’Histoire du Sénégal. C’est cela qui lui permettra de nous offrir la République Humble, Juste et Travailleuse dont notre pays a tant besoin ! C’est ainsi qu’il construira, au jour le jour, l’image du grand Président ayant marqué définitivement le subconscient de ses compatriotes ! Croire, n’en déplaise à son égo, qu’il n’est au Palais de la République que parce qu’on en a chassé Me Wade, fera de Macky Sall l’homme qui fera entrer le Sénégal dans la vraie Emergence. C’est aussi cela qui, enfin, lèvera l’ambigu malentendu de son élection !

 

Le second tour des élections Présidentielles et les Législatives ont été gagnées par ‘’La Coalition des malentendus’’ !

 

Malentendus, pour la Présidentielle, entre Ousmane Tanor Dieng – qui a commis l’impardonnable faute politique d’enfermer le mythique Parti socialiste dans une coalition sans en assumer le leadership- et Moustapha Niasse qui a cru, jusqu’au bout à son destin présidentiel. Malentendus entre les leaders de ‘’Benno Bokk Yaakaar’’ et le ‘’Mouvement du 23 Juin’’ qui, base historique du mouvement social ayant mené à la chute de Me Wade, n’a pas su capitaliser sur la victoire politique dont il est le seul artisan ! Malentendus entre Macky Sall et ces leaders politiques qui, en passant sous les fourches caudines de leur soutien sans faille au second tour, espéraient, naïvement, un maroquin ministériel. Regrets et rancœurs…

 

Malentendus, autour des Législatives, entre la liste du Parti démocratique sénégalais et celle de ‘’Bokk Guiss Guiss’’ autour des reliques d’un parti à l’avenir compromis ! Admiration pour les ‘’derniers Mohicans’’ qui seront restés fidèles, jusqu’au bout à leurs convictions politiques et à leur mentor ! Que l’opprobre s’abatte sur ces ‘’renégats’’ de la République, assidus des réunions diurnes de l’Immeuble Tamaro où l’on faisait croire au Prince qu’il serait le quatrième président du Sénégal et qui, Judas de la Christique Libérale, ont crucifié leur foi sur l’autel de leurs vils intérêts… Haro !

Ces mêmes Législatives ont vu arriver à l’Assemblée nationale une coalition dont le seul béton politique est fait de sable d’arrière-pensées et de ciment de malentendus ! Rien qui soit de l’ordre de la pensée politique ou de l’alliance programmatique ne fait le socle de cette ‘’majorité parlementaire’’ ! Moustapha Cissé Lo a bien raison de disputer, d’une façon bien malhabile d’ailleurs, la présidence de l’Assemblée nationale à Moustapha Niasse… La dernière année du mandat présidentiel risque de réserver de bien désagréables surprises à l’Alliance des forces du progrès !

 

Ah ! Enfin le dernier des malentendus qui soit !

Quelle sera, in fine, la durée de ce mandat présidentiel ? Sept ans, comme le stipule la Constitution et l’a entériné le suffrage universel, ou cinq comme le voudrait le Président Macky Sall ? A moins que la ‘’majorité parlementaire’’ du président ne lui refuse la possibilité de limiter son mandat à cinq ans… Ce serait une gageure car que nous a-t-on seriné qu’il était vital que les Sénégalais donnent les moyens de gouverner au régime apériste ! Ou alors que le peuple soit convoqué à référendum sur le sujet. Avec le risque politique de voir ‘’le souverain des souverains’’, qui a donné des signes de lassitude électorale aux dernières Législatives, ignorer royalement cette invite de trop en fragilisant, inéluctablement, une présidence commençante…

 

Un malentendu de plus ! Un malentendu de trop qui aurait pu être épargné au Sénégal et aux Sénégalais… Dans une vraie République, des sujets qui engagent autant acteurs et forces politiques auraient dû faire l’objet de la concertation la plus large possible… Ne l’avoir pas fait est une erreur politique ! Ce n’est d’ailleurs plus une affaire de malentendus…

Mais plutôt de ‘’malentendant’’ !

 

 

Mohamed Joseph Henri Sarr

 

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