Publié le 3 May 2013 - 00:28

De la question du financement des universités sénégalaises

J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt l’émission à la RTS consacrée au financement des universités sénégalaises. La palette d’acteurs était bien choisie, le débat bien orchestré mais des questions de fonds n’ont pas été abordées ou alors très rapidement telles que l'arrimage des curricula des universités avec le marché de l'emploi. Une question fondamentale, celle de la place de l’éducation dans le projet politique et social de l’actuel Gouvernement, elle, n’a même pas été soulevée.

 

Pourtant cette question, à mon avis, devait servir de fil conducteur au débat. En effet, ma position par rapport à cette question, c’est que l’éducation doit rester un droit et non un privilège. Je pense aussi que l’éducation doit être au cœur de tout projet d’avancement d’une société. En tout cas, tous les pays dit développés ont, à un moment de leur histoire, décidé de faire de l’éducation un pilier de développement. C’est le cas de la province québécoise qui, suite au rapport Parent, a mis en œuvre un projet de restructuration de l’éducation qui a donné naissance à un réseau de collèges et d’universités québécois. Le rapport Parent s’est surtout illustré par un principe fondamental : celui de permettre l’accessibilité aux études à toutes les couches socio-économiques.

 

Les résultats ne se sont pas fait attendre. La société québécoise a pu compter sur une population éduquée pour réaliser son projet de développement. Plus récemment, les dragons asiatiques nous ont donné la preuve que l’éducation constitue un investissement rentable. À ma grande surprise, les débatteurs invités à cette émission n’ont pas parlé de cette dimension somme toute importante de l’éducation. Pire, il a semblé s’établir un consensus autour du principe de la hausse des frais de scolarité. J’ai trouvé cette tendance particulièrement inquiétante dans un pays où près de la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.

 

Concernant, l’uniformisation des frais de scolarité entre les étudiants locaux et les étudiants internationaux, j’ai trouvé que la sacro-sainte Téranga sénégalaise a quand même des limites. J’ai trouvé cette dernière proposition particulièrement aberrante car dans les pays qui semblent inspirer les tenants de la hausse des frais de scolarité, les étudiants internationaux ne payent pas les mêmes frais de scolarité que les locaux. Dans les universités américaines, les étudiants internationaux payent presque six fois plus que les étudiants locaux. Idem pour les étudiants internationaux, sauf exception, inscrits dans les universités québécoises.

 

Cette mesure est compréhensible et tout à fait justifiée si l’on part du principe que c’est l’argent des contribuables de ces pays qui finance leur système éducatif. À mon avis, les acteurs impliqués dans la gestion de nos universités devraient plus chercher à remédier à la discordance qui existe entre le contenu des programmes offerts dans les universités et le marché de l'emploi. Un système éducatif pertinent est un système capable de répondre aux attentes des sortant-es et de la société. J’inviterai aussi les étudiant-es à situer leur argumentaire par rapport aux enjeux sociétaux de l’éducation. Ils pourront ainsi marquer plus de points concernant la défense de leurs droits.

 

Pour terminer, je rappellerai que le monde actuel est marqué par l’économie du savoir. Qui a le savoir a le pouvoir ! Même si le Fonds monétaire international et la Banque mondiale contraignent nos États à des restrictions budgétaires, nous devons nous battre pour financer adéquatement notre éducation en tenant compte de nos réalités socio-économiques.

 

NDÈYE FATY SARR,

QUÉBEC, CANADA

 

 

Section: 
CONTRIBUTION DE LA CELLULE SOCIOLOGIE DE L’UN-CHK Hommage au Maître, Pr. Abdou Salam FALL
JURISTE THIOUNE - JURISTE NDIAYE : Pour un Sénégal du droit citoyen : quand la justice doit redevenir un levier de confiance
GUINÉE : La patience stratégique du Général Mamadi Doumbouya face à GAC, un acte fondateur de souveraineté minière
SÉNÉGAL Riche mais classé pauvre par des indicateurs biaisés par le FMI
INONDATIONS DANS LA PRESQU’ILE DU CAP-VERT : Une malformation congénitale
Que faire de la dette impayable du Sénégal ?
Le projet de loi portant statut et protection des lanceurs d’alerte permettra-t-il de renforcer la lutte pour la transparence et contre la corruption au Sénégal ?
L’option de ne jamais poster sur les réseaux sociaux (RS) est révélatrice
LA VÉRITÉ SURVIT À ELLE-MÊME : So long Sarr Diagne
COMMENT ATTEINDRE LA SOUVERAINETÉ MONÉTAIRE TOUT EN RESPECTANT LES NORMES DE L’UEMOA : La solution, les stablecoins
FMI-Sénegal : un jeu du mille-pattes
CHRONIQUE DE L’IMPROVISTE : Portes closes, regards froids : spectacle d’un accueil
Mettre un terme aux effets dévastateurs de la “générosité” des deux présidents-politiciens
Pourquoi faut-il censurer le Conseil constitutionnel ?
Crève, la culture !
Au-delà du redressement : construire un État souverain et transformateur
Pour une République intergénérationnelle, éthique et engagée.
LES CONSEQUENCES ECONOMIQUES DE SONKO : La nakba économique d’un agenda de sabotage systemique
L’intelligence du monde en héritage : Vernadsky, Teilhard, Senghor, Kane (Émission littéraire Impressions) ou le génie du don noosphérique
FMI-Sénegal : Un jeu du mille-pattes