Partout où le football se pratique, les arbitres ne sont pas épargnés par les critiques acerbes des entraîneurs ou supporters. Au Sénégal, les ''hommes en noir'' n’y échappent guère. Seulement ici, c’est leur niveau qui est tout bonnement remis en cause.

''Oh ! Il n’y a pas de hors-jeu, tu ne connais rien'', pouvait-on entendre de la tribune couverte. Ces cris de protestations avaient envahi le stade Demba Diop de Dakar lors du nul (1-1) entre le Port autonome de Dakar (Pad) et l'As Pikine (2e, journée de Ligue 1). L'arbitre Souleymane Niasse de la Commission régionale des arbitres  (Cra) de Fatick avait sifflé, sur une occasion de but de l’As Pikine, un hors-jeu inexistant. Suffisant pour que son assistant soit bombardé de projectiles.

Les stades de foot du Sénégal sont très souvent animés. Si ce n'est pas le son des tam-tams qui détend l'atmosphère ou les joueurs qui offrent du beau spectacle, ce sont les cris stridents du public à l'encontre des arbitres qu'ils interpellent.

À chaque journée de championnat (Ligue 1 et Ligue 2), ces cris de contestation sur des décisions arbitrales couvrent les stades. Tellement certaines d'entre elles sont surprenantes. La dernière en date, c’est le match de la 3e journée de Ligue 1 opposant Yeggo à Diambars. Lors de cette affiche remportée (2-1) par le champion du Sénégal en titre, l’arbitre Daouda Kébé de la (Cra) de Dakar a provoqué la colère des joueurs de Yeggo en faisant preuve d’indécision.

Celui-ci, après avoir sifflé un but pour l’équipe de Saly, l’a refusé, pour ensuite le valider. Nouha Cissé, président du Casa Sport, s'est aussi plaint de la prestation des arbitres à l’issue du match nul (0-0) contre Touré Kunda (5^e j). ''L’arbitrage n’a pas été à la hauteur de la qualité des matches que nous voudrions livrés, a-t-il jugé sur la prestation du trio de la Cra de Kaolack. Notre football gagnerait à avoir un arbitrage de qualité''. Voilà qui relance le débat sur le niveau des arbitres sénégalais.

''Pas prophètes chez eux''

Sur le plan international, les arbitres sénégalais jouissent d'une bonne cote. Deux d'entre eux ont eu l'honneur de diriger des finales de Coupe d'Afrique des Nations (Can) en moins de dix ans. Falla Ndoye avait sifflé celle remportée (2-1) par la Tunisie sur le Maroc en 2004 et Badara Diatta a dirigé le premier sacre de la Zambie face à la Côte d'Ivoire en 2012 (0-0 ; 8 tab 7). Tout récemment, l'assistant Djibril Camara a été sélectionné pour la prochaine Coupe du monde prévue au Brésil en juin 2014.

Cependant au plan local, ils n'inspirent pratiquement confiance à personne. Pour une bonne frange des supporters, l’arbitrage sénégalais n’a pas un bon niveau. ''Le niveau de l’arbitrage est extrêmement bas, a soutenu un supporter de l’As Saloum (Ligue 2), Thierno Cissé.

Si les joueurs sénégalais ne marquent pas beaucoup de buts dans les championnats locaux, c’est en partie à cause des arbitres qui ne laissent pas l’avantage lors des occasions de but’’. C’est dans ce sens qu’abonde le jeune Ndiaga Fall, supporter de la Jeanne d’Arc de Dakar (National 1), de même que Balla Moussa Sonko du Casa Sport. ''C’est souvent les arbitres qui créent la tension dans les stades, parce qu’ils sifflent des positions de hors-jeu inexistantes'', disent-ils.

Mactar Kinta Diop, ancien arbitre : ''l'arbitrage sénégalais se porte bien''

Critiqués très souvent, les arbitres sénégalais ont toutefois des avocats parmi les amateurs du foot local. ''Nous avons de bons arbitres. Ce n’est pas facile de faire ce métier (arbitrage)’’, a dit Issakha Mbodj, coach adjoint du Port.  Cependant, il trouve que parfois les hommes en noir manquent de concentration sur certaines actions''. Modou Ndiaye, supporter du Jaraaf, partage le même avis : ''Le niveau de l’arbitrage sénégalais est acceptable dans l’ensemble. Le problème est que dès fois, les arbitres manquent de courage sur certaines décisions’’. Pour l'ancien arbitre Mactar Kinta Diop, ''l'arbitrage sénégalais se porte bien''.

À chaque week-end de championnat, dit-il, ''les arbitres se comportent correctement'', même s'il reconnaît que ''quelquefois, certains arbitres passent à côté de leur match''. M. Diop juge que les critiques à l'encontre des arbitres sont quelque part ''objectives''. Concernant les difficultés qu'éprouveraient les ''hommes en noir'' sur les positions de hors-jeu, il pense que la loi 11 (relative à l'arbitrage) est ''bien maîtrisée'' au Sénégal. ''C’est exagéré de dire que le niveau de l’arbitrage est trop bas'', estime tout simplement Chérif Abdourahmane, inconditionnel de l'Us Gorée. Ce dernier reconnaît tout de même qu’''il reste beaucoup de choses à parfaire''.

Badara Diatta : ''Parfois, on les accuse à raison''

Considéré comme l’un des meilleurs sifflets sénégalais à l’heure actuelle, Badara Diatta a soutenu, sur Xibaaru.com, que ''le niveau de l’arbitrage de football est bon au Sénégal''. Selon lui, c’est pour cette raison que les arbitres sénégalais sont sollicités au niveau continental et mondial. D'ailleurs, l'arbitre Malang Diédhiou officie au Championnat d'Afrique des Nations (Chan) 2014 qui se déroule présentement en Afrique du Sud.

En revanche, l’arbitre international qui a dirigé la finale de la Coupe d'Afrique des Nations (Can) 2012, reconnaît que ''ses collègues doivent persévérer car on les accuse souvent à tort mais d’autres fois, on les accuse à raison''. Et pour y arriver, M. Diatta estime que ''seule la formation peut apporter de réelles satisfactions à l’arbitrage sénégalais''.

Pour certains techniciens locaux, notamment Ibrahima Diarra (Casa Sport) et Mbaye Badji (Yeggo), ''le problème des arbitres doit se régler entre eux.

LOUIS GEORGES DIATTA (STAGIAIRE)