Publié le 30 Jan 2014 - 20:51
OUTRAGE A UN SUPÉRIEUR

Aly Haïdar obtient la tête d'un Commandant des Eaux et Forêts

 

Le différend opposant l’ex-ministre de l’Environnement et actuel ministre de la Pêche Aly Haïdar au commandant des Eaux et Forêts Papa Momar Faye, qui avait en charge le Projet national de semences forestières (PRONASEF), a atterri hier à la barre de la Cour d’appel de Dakar. Un procès que le ministre risque de perdre, si  la Cour suit le réquisitoire du parquet général.

 

Le  commandant des Eaux et Forêts de Kaolack, Papa Momar Faye, risque de sortir victorieux du procès qui l’oppose à l’actuel ministre de la Pêche Aly Haïdar. Car, le parquet général a demandé que le Commandant Faye soit relaxé. Les faits remontent au temps où le ministre avait en charge le département de l’Environnement, alors que le commandant pilotait le Projet national de semences forestières (PRONASEF).

Aly Haïdar semble avoir commis une maladresse dans sa démarche, en n’ayant pas porté plainte lui-même. Il avait mandaté le directeur des Eaux et Forêts. Cette démarche risque de lui coûter cher au procès. Le verdict sera rendu le 26 mars prochain. Le parquet général estime que le directeur des Eaux et Forêts n’est pas habilité à porter plainte au nom du ministre.

Dès l’entame du procès, Me Demba Ciré Bathily a relevé le fait, en laissant entendre que ‘’le directeur des Eaux et Forêts n'a aucune qualité pour porter plainte. C'est le ministre lui-même qui s'estime outragé qui doit porter plainte’’. Et outre ce fait, le parquetier est resté dubitatif quant aux faits d’outrage à un supérieur reprochés à l’officier supérieur militaire. ‘’Nous ne sommes pas convaincus que les propos tenus par le commandant Faye aient porté atteinte à son honorabilité. 

C'est le Conseil de discipline qui devait être saisi, au lieu de traîner le commandant Faye devant cette juridiction’’, a déclaré le parquetier. Le commandant Mamadou Birane Wane, défenseur militaire, a abondé dans le même sens. Il considère que ‘’le dossier se résume à une simple affaire de discipline qui n'avait pas lieu d'atterrir à la barre’’. ‘’Au lieu de notifier une note de service au commandant Faye, on lui a envoyé un e mail, alors que cela est contraire au règlement. S'il ne l'avait pas vu, il ne serait jamais informé de son affectation’’, a soutenu le juriste.

‘’Réhabilitez-le Monsieur le juge !’’

En fait, le différend opposant le Commandant à son ministre de tutelle d’alors est parti de l’affection du militaire à Bambey, suite à un incident de parcours, après 35 ans de service. Selon le commandant Wane, l’officier s’est senti frustré et s’est révolté contre la manière dont il a été affecté. C’est pourquoi ‘’le Commandant s’est rendu à la télévision juste pour critiquer la manière dont il a été affecté’’.

Sur sa lancée, le défenseur militaire a indiqué que leur client a bel et bien rejoint son nouveau poste, le 15 novembre, alors que le délai de rigueur était le 5 décembre’’. Mais, s’est désolé Me Assane Dioma Ndiaye, ‘’son prédécesseur et le préfet lui ont fait savoir qu'ils n'avaient pas reçu notification de son affectation à Bambey’’. 

A en croire Me Ndiaye, le préfet a fait savoir à leur client qu’il ne pouvait pas lui établir un procès-verbal d'affectation, sous le prétexte qu’il a reçu une décision contraire’’. A ses yeux, l’on veut ‘’briser la carrière de leur client, en l’affectant dans un petit secteur’’. Et de conclure : ‘’Nous ne sommes pas surpris, si le dossier est devant cette juridiction, sinon le crime ne serait pas parfait. La  hiérarchie voulait l'éliminer. Réhabilitez-le Monsieur le juge !’’.

‘’Incapables et ignorants’’

Toutefois le témoignage de Abdoulaye Baldé n’a pas fait les affaires du Commandant des Eaux et Forêts. Le témoin a soutenu avoir entendu à la radio le prévenu militaire taxer le ministre Aly Haïdar et son directeur de cabinet ‘’d'incapables et d’ignorants’’. Ce que Oumar Guèye considère comme des ‘’propos désobligeants vis-à-vis d’un supérieur’’. Le directeur des Eaux et Forêts a enfoncé le clou.

Daniel André a laissé entendre que la démarche du Commandant ne sied pas à un officier supérieur. ‘’Cela est incompatible avec le statut de militaire. Sa sortie publique n'est pas autorisée par le règlement de discipline général qui impose le droit de réserve aux militaires’’, a fustigé le directeur. Il considère que les propos du militaire sont ‘’outrageants envers la hiérarchie’’. Il a ajouté que le Commandant avait d'autres moyens de recours que de s'adresser à la presse’’.

PAPA MOMAR FAYE, COMMANDANT DES EAUX ET FORÊTS

‘’On me tue, mais on ne me déshonore pas''

Conservateur des parcs nationaux, spécialiste de faune marine, terrestre et continentale, le Commandant Faye n’a pas pris de gants pour fustiger l’attitude de la tutelle, par ricochet le fonctionnement de son service, lors de son procès.  Le Doctorant et expert en économie verte, diplômé d'études supérieures en sciences de gestion, souligne que ‘’depuis 40 ans, c'est le même procédé.

Il n'existe pas de commission d'affectation’’. Il accuse sa tutelle de refuser de lui donner son grade de lieutenant-colonel qu’il dit avoir acquis ‘’de manière patriotique’’.

Sur son affectation, à l’origine des poursuites enclenchées contre lui, le soldat soutient que son profil ne répond pas à celui d'un chef de secteur. ‘’J'ai travaillé pour mon pays, sans une seule fois être sanctionné.  Depuis 15 mois, je ne travaille pas. Je reste chez moi. On m'a traduit en conseil de discipline’’, fustige-t-il.

Le prévenu décrie également la situation dans laquelle se trouve le service des Eaux et Forêts. ‘’Rien ne marche au niveau du service  et de la direction des Eaux et Forêts. Tout a été bouleversé au niveau de la hiérarchie. On a mis des lieutenants à la tête des capitaines’’, avance le Commandant.

Qui poursuit avec hargne : ‘’Nous sommes dans une administration où les gens font ce qu'ils veulent. Il faut que l'on revoie notre mode de gestion qui n'est pas performant pour notre pays. Tous les forestiers le savent et le connaissent’’.

Il n'a pas l'intention de se laisser faire. ‘’On me tue, mais on ne me déshonore pas. Mon père était un tirailleur. J'ai le sang d'un soldat qui circule dans mon corps’’, s’enorgueillit-il. Avant de s’apitoyer sur le sort de sa fille malade et surtout du fait qu’on lui aurait refusé l'imputation budgétaire. ‘’Et si elle mourrait, qu'est-ce qu'il allait dire ?’’, s’interroge-t-il. 

FATOU SY

 

 

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