Publié le 10 Sep 2013 - 20:30
POST-POINT PAR MOMAR DIENG

Opportunisme illimité !

 

 

En termes d'éthique au ras des pâquerettes, on en prend plein la figure, ces jours-ci, sans être demandeur ! Après la tambouille Sidiki Kaba, infecte jusqu'à la démesure, c'est la nomination d'Abdoulaye Daouda Diallo au ministère de l'Intérieur qui donne le hoquet. Cette mesure présidentielle aurait dû fortement secouer le landernau politique sénégalais, au regard des clameurs bruissantes d'un passé récent contre Abdoulaye Wade qui avait eu la très mauvaise idée de nommer Ousmane Ngom au même poste. Au contraire, il se trouve que de preux chevaliers de la démocratie, de l'équité et de la transparence, hier dénonciateurs outranciers (à juste titre d'ailleurs !) des «forfaitures» de l'ancien régime, se sont patiemment transformés en laudateurs réalistes du successeur de Me Wade, sur le même terrain, sur la même question. Sur le même principe.

De la déroute urbaine des Libéraux aux élections locales de mars 2009, au scrutin présidentiel de mars-avril 2012, les partis politiques, mouvements citoyens et associatifs, organisations membres de la coalition Benno Siggil Senegaal ou venues d'ailleurs, n'ont jamais cessé de combattre pour ce «principe» de neutralité du ministère de l'Intérieur. La «vérité», pour eux, ne pouvait être concrétisée que dans le choix, sinon consensuel, du moins acceptable d'un ressortissant de la société civile sénégalaise exempt de tout indice négatif. Comme à son habitude, Wade tînt bon et c'est Ousmane Ngom qui supervisa la tenue de tous les scrutins, au mépris des recommandations des Assises nationales. Bilan : tout le monde s'est dit satisfait ! Finalement, il n'y avait pas de quoi fouetter un chat ou un chien... Il est vrai que la mobilisation militante de l'opinion publique a pu décourager toutes les tentatives, virtuelles ou réelles, de détourner le sens des suffrages.

 

A quoi servent les principes ?

Aujourd'hui, alors qu'un militant radical de l'Alliance pour la République (APR) va prendre la direction du ministère de l'Intérieur, Benno Siggil Senegaal, à l'exception de quelques individualités restées constantes sur le principe, végète dans ses petits souliers. Ses principaux leaders ayant choisi de se terrer, des seconds couteaux sont envoyés au front pour défendre le choix partisan du président Sall. Il est vrai qu'ils sont au pouvoir depuis dix-sept mois. Dieu merci, ils se portent tous bien, à des degrés divers, selon la qualité et la masse des strapontins qui leur ont été alloués sous forme de quotas.

Une certaine morale publique enseigne comme peu ou pas inconvenante de «gêner» un président de la République qui a été si généreux avec ses alliés jusqu'à mécontenter son propre parti. Et comme la tranquillité politique dans la gestion du pouvoir a son prix, on sacrifie donc les principes sacrés d'hier sur l'autel d'une Alliance qui n'est pas loin d'être sacrée ! L'humanité doit une fière chandelle à celui qui, le premier, décréta que le pouvoir rend fou.

En fin de compte, en agrégeant le cas Kaba à celui-là et à bien d'autres, on se (re)demande à quoi vraiment croient les politiciens de notre pays. Sous cet angle-là, il est normal qu'ils accumulent les échecs au pas de charge, vivant aux crochets et aux frais des contribuables qui, eux, n'arrêtent pas de se faire des soucis : «Mais à quoi servent-ils, ces politiciens ?» On peut tout autant se demander : à quoi servent les principes ? A les adapter aux intérêts du moment. Ça a au moins la vertu d'être simple à comprendre.

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