La ''Déclaration de Ziguinchor'' proclamée hier en toute solennité

La Casamance a été hier la capitale des droits humains. Cette partie sud du pays, en proie à un conflit armé qui dure depuis 31 ans, a abrité les festivités de l’anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Une déclaration dite de Ziguinchor a été proclamée en la circonstance.
La ''Déclaration de Ziguinchor'' a été déclinée sous forme de douze commandements par les forces vives qui ont participé à la célébration du 65e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du 20e anniversaire de la Déclaration de Vienne, à Ziguinchor. Cette déclaration recommande d’encourager les organisations de la société civile et les institutions académiques à intégrer dans leurs agendas l’éducation aux droits humains, en mettant un accent particulier sur la notion de dignité humaine.
Il est également demandé de recourir aux mécanismes nationaux, régionaux et internationaux des droits humains pour la mise en œuvre et le respect du droit à la dignité par les États. La ''Déclaration de Ziguinchor'' recommande aussi de favoriser la synergie entre tous les acteurs, dans la recherche de solution aux déplacements et migrations forcées de populations engendrées par le conflit casamançais. Aussi de promouvoir le respect de la liberté d’information et la transparence dans le but de lutter contre toute forme de gestion non démocratique et de détournement des biens publics et des ressources du pays.
A Ziguinchor, il est également demandé le renforcement des mécanismes de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants. Tout comme le renforcement des capacités des forces de sécurité, en gestion des droits de l’homme. Privilégier le triptyque paix, dignité humaine et droits humains, tout comme vérité, justice et réconciliation.
Aussi, encourager la participation des femmes et des jeunes aux négociations de la paix. Un aspect également non négligeable est relatif à la prise en compte des besoins des victimes du conflit, de même que ceux visant à la réparation juste pour les victimes civiles et la reconstruction de la région. La ''Déclaration de Ziguinchor'' recommande aussi de sensibiliser les populations de la région, notamment les personnes déplacées à cause du conflit sur la nécessité d’enregistrer leurs enfants à l’état-civil et de les aider à le faire.
Il s’agira aussi d’exiger de l’État et du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC - rébellion), le respect de tous les engagements pris, dans le cadre des négociations de paix en Casamance. Le 12e commandement vise à encourager le dialogue entre les religions, d’une part, et entre l’État et le MFDC de l’autre, pour parvenir à une paix durable et à la cohabitation pacifique entre les communautés en Casamance.
LA DECLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HOMME Historique et évolution du mouvement des droits humains
L’histoire retient que c’est sans doute la Grande-Bretagne qui a porté le mouvement des droits de l’homme. Une évolution qui traverse le temps et qui a été profondément marquée par des textes toujours en vigueur. En 1215, la ''Magna carta'' (Grande charte) a été le premier texte proclamant les droits de l’homme. Une lutte obtenue par les barons, ces autorités britanniques détenteurs de pouvoirs, aux dépens du roi Jean-sans-terre. La ''Magna carta'' est donc la consécration du mouvement d’opposition des grands barons contre l’autorité royale au Royaume-Uni, au 13e siècle. Le pays ne s’en limitera pas là, puisqu’en 1628 sera adoptée la ''Pétition of rights'' (Pétition des droits). Elle sera suivie, en 1679, par l’acte d’Habeas corpus qui parle des garanties procédurales, lors des détentions. L’Habeas corpus vise en somme à protéger l’individu, contre les arrestations arbitraires. Les britanniques ne s’en arrêteront pas là et vont adopter le ''Bill of rights'' (Déclaration des droits), en 1689, puis ''l’Acte d’Establishment'' sera adopté en 1701 et il réaffirme le devoir de respect des droits et libertés de l’homme, à travers la couronne et le parlement. Autant de textes qui consacrent des conquêtes du Parlement britannique, dans sa lutte contre le pouvoir royal. La Grande-Bretagne passera ensuite le témoin du mouvement de reconnaissance des droits de l’homme aux États-Unis d’Amérique. Tout a commencé avec les jeunes États qui se sont émancipés de la tutelle britannique. Il s’agit de la Déclaration de la Virginie, en juin 1776. Puis, de la Déclaration d’indépendance des États-Unis, le 4 juillet 1776. En France, le mouvement s’est imposé, avec la proclamation, le 26 août 1789, par les révolutionnaires français, de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC). L’adoption le 10 décembre 1948 de la DUDH va marquer une étape décisive et témoigner d’un regain d’intérêt pour les droits de la personne. Un intérêt résultant de l’horreur engendrée par les atrocités commises pendant la seconde guerre mondiale par les régimes totalitaires d’Europe, à l’image de l’Allemagne nazie, de l’Italie fasciste et de l’Extrême-Orient avec le japon. Il faut noter cependant que l’Afrique n’a pas été en reste, dans la défense des droits fondamentaux. Mieux, avec la charte du Mandé, communément appelée la charte du Kouroukan Fuga, adoptée en 1236, juste après la bataille de Kirina dans l’empire du Mali, l’Afrique a démontré à la face du monde son respect efficient des droits de l’homme. Un texte qui ressemble de façon troublante à la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée le 10 décembre 1948. |
Amadou NDIAYE (Envoyé spécial à Ziguinchor)